La pratique du pèlerinage en Provence
à la fin du Moyen Âge et au début de
l’époque moderne d’après les enseignes
et les ampoules
iti
on
s
Olivier THUAUDET*
Mots clés : pèlerinage, Moyen Âge, enseigne de pèlerinage, ampoule de pèlerinage, métal
Éd
Résumé : La pratique du pèlerinage en Provence et au départ de Provence est documentée par les sources écrites, mais également par
des objets achetés par les pèlerins dans les sanctuaires visités. La plupart sont des enseignes et des ampoules en étain, en plomb ou
en alliage des deux métaux. L’étude de ces pièces métalliques révèle la multiplicité des moules, la persistance des motifs au cours du
temps et participe à renseigner sur la renommée des sanctuaires et l’étendue de celle-ci. À la fin du XVe siècle et au XVIe siècle, la forme
et le décor de certaines enseignes évoluent et annoncent l’apparition des médailles en alliage cuivreux. L’analyse des contextes de
découverte des enseignes, ampoules et médailles révèle des différences dans la symbolique des objets.
Keywords: Pilgrimage, Middle Ages, pilgrim badges, pilgrim phials, metal.
R
S
Abstract: Pilgrim badges and phials as evidence of pilgrimage in Provence at the end of the Middle Ages and Early Modern Period.
Pilgrimage in Provence and from Provence is well documented from written sources but also from the artefacts pilgrims would acquire
in the sanctuaries they visited. Most of those artefacts are badges and phials made of tin, lead, or an alloy of these two metals. The
study of these metallic elements reveals the diversity of moulds as well as the long use of the motifs throughout time. It also contributes
to a better understanding of the reputation of the sanctuaries and its geographical extent. At the end of the 15th and in the 16th c., the
shape and ornemental motifs of some of the badges evolve, foreshadowing the apparition of the copper alloy medallions. The analysis
of the context of discovery reveals the diversity in the objects’ symbolism.
N
Schlüsselwörter: Wallfahrt, Mittelalter, Pilgerzeichen, Pilgerampullen, Metall
* Aix-Marseille Université, CNRS, membre associé du LA3M UMR 7298, 13094 Aix-en-Provence.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
©
C
Zusammenfassung: Wallfahrtswesen in der Provence am Ende des Mittelalters und zu Beginn der frühen Neuzeit im Spiegel der
Pilgerzeichen und Pilgerampullen. Das Wallfahrtswesen der Provence – Wallfahrten in der Provence selbst und von der Provence
aus – ist in Schriftquellen belegt, aber auch durch Objekte, die die Pilger bei ihren Besuchen der Gnadenstätten kauften. Überwiegend
handelt es sich dabei um Pilgerzeichen und Pilgerampullen aus Zinn, aus Blei oder aus Legierungen beider Metalle. Die Untersuchung dieser Metallfunde zeigt die Vielzahl der Gussformen, die Beständigkeit ihrer Motive und liefert Erkenntnisse zur Popularität
der Heiligtümer und zur Größe ihres Einflussbereiches. Am Ende des 15. und im 16. Jh. ändern sich die Form und die Gestaltung
einiger Pilgerzeichen und kündigen so das Erscheinen der Medaillen aus Kupferlegierungen an. Die Analyse der Fundkontexte von
Pilgerzeichen, -ampullen und -medaillen macht deutlich, dass es Unterschiede in der Bedeutung der Objekte gab.
89
Olivier ThuaudeT
1. PARTIR EN PÈLERINAGE :
POUR QUELLES RAISONS ?
iti
on
s
La Provence a compté de nombreux sites de pèlerinage5,
auxquels on accédait de manière permanente ou, peut-être, de
façon temporaire, lors de processions annuelles par exemple.
Tous n’ont pas forcément perduré jusqu’à nos jours et la
présence de reliques ne constitue probablement pas toujours
un élément suisant pour engendrer des visites fréquentes6.
L’invention7, la reconnaissance ou le transfert de reliques8
ont parfois été réalisés pour asseoir ou conirmer un lieu de
pèlerinage. En outre, pour assurer une continuité dans les
visites ou promouvoir un sanctuaire, les autorités religieuses
ont favorisé la rédaction de Livres de miracles comme ceux de
saint Gilles9, de sainte Marie-Madeleine10, d’Urbain V11 pour
ne citer qu’eux, ou bien encore la rédaction de la vie d’un saint
comme le Roman de saint Trophime12, les Vies d’Elzéar et de
Delphine de Sabran13 ou la Vie de sainte Douceline14.
Ces mêmes autorités octroyaient également des indulgences 15 pour encourager les croyants à se déplacer vers les
lieux saints et les inciter, entre autres, à participer aux frais
de construction, de développement ou d’entretien des édiices
visités 16. L’intérêt est essentiellement inancier, la venue de
pèlerins ayant un impact sur le commerce local : ils dépensent
de l’argent en se logeant, en achetant de nouvelles chaussures,
des enseignes, de la nourriture, en faisant un don monétaire
ou matériel – un cierge par exemple. Ainsi, en 1154, le pape
Anastase IV accorde une indulgence aux chrétiens qui visitent
le tombeau de saint Gilles17. Les papes d’Avignon ont souvent
eu recours à ce dispositif18. Les évêques ont également mené
90
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
Éd
Le territoire provençal a connu de multiples centres de pèlerinages. De nombreux Provençaux les visitaient aux côtés
de pèlerins d’autres origines. Ils n’hésitaient pas non plus à
entreprendre des voyages à longue distance à destination de
sanctuaires réputés. Les fouilles archéologiques en Provence et
à l’extérieur de la région, ainsi que les sources écrites, prouvent
que des souvenirs religieux spéciiques étaient proposés dans
une partie des sanctuaires de Provence. Il s’agit généralement
d’enseignes ou d’ampoules, ordinairement en matériau
blanc – étain, alliage d’étain et de plomb ou plomb –, plus
rarement, pour les enseignes, dans d’autres métaux comme
les alliages cuivreux ou les métaux précieux. Ces souvenirs
sont le témoignage ostensible d’une ferveur religieuse ou du
moins, à l’origine, de l’accomplissement d’un pèlerinage, et
peuvent détenir un pouvoir protecteur et thaumaturgique.
Ils fournissent de nombreuses indications sur l’activité des
sanctuaires et témoignent de leur aura. L’étude de la pratique
du pèlerinage en Provence à partir de ce mobilier nécessite
donc de prendre en compte l’ensemble des enseignes et
ampoules découverts en Provence, ainsi que les enseignes de
pèlerinages provençales retrouvées hors du territoire régional.
Les enseignes et ampoules de pèlerinage découvertes en
Provence ou en provenant n’ont, jusqu’à présent, fait l’objet que
de recherches peu étendues. La première étude d’envergure,
dépassant donc la simple mention d’un objet, œuvre de
Dominique Carru et Sylvain Gagnière, paraît en 1992. Vingtet-une enseignes et ampoules découvertes à Avignon y sont
répertoriées 1. Dominique Carru complète ce corpus par un
court article consacré à une nouvelle enseigne en 19982. En 2001,
Philippe Ferrando ajoute quatorze objets inédits découverts à
Fontvieille (Bouches-du-Rhône) et à Avignon 3. Les travaux
de ce chercheur, diicilement accessibles, sont inconnus de
Denis Bruna lorsque, deux ans plus tard, il publie un rapide
inventaire descriptif des enseignes trouvées le long de la Via
Tolosana, en Provence et en Languedoc4. Cinquante enseignes
de sanctuaires provençaux, ou découvertes en Provence, y
sont signalées. Notre présente étude rassemble cent quinze
enseignes, dont quatre-vingt-trois exemplaires métalliques,
ainsi que quinze ampoules. Nous y avons adjoint les résultats
d’un important dépouillement bibliographique, des recherches
en archives et une enquête dans la documentation de fouille.
L’objectif est de replacer la pratique du pèlerinage, l’achat et
l’utilisation des enseignes et ampoules dans le contexte de
la Provence de la in du Moyen Âge et du début de l’époque
moderne, mais aussi de donner des renseignements d’ordre
général sur les sanctuaires, lesquels ont fait l’objet d’un intérêt
variable.
1. Carru et Gagnière 1992.
2. Carru 1998.
3. Ferrando 2001a et 2001b.
4. Bruna 2003.
5. Se reporter à Baratier et al. 1969, carte 212, pour une carte des presque
cent vingt lieux de pèlerinage répertoriés pour la région Provence-Alpes-Côte
d’Azur durant l’époque moderne.
6. Régionalement, aucun recollement à grande échelle n’a été entrepris entre
les sources textuelles mentionnant des reliques et celles matériellement
conservées dans les églises de Provence.
7. Par exemple en 925, celles des reliques de saint Gilles et, en 1278, celles de
Marie-Madeleine.
8. Le 22 juin 1277, les reliques de saint Cannat, conirmé dans son titre d’évêque
de Marseille (titre accordé en 1122), et de saint Antoine font l’objet d’un acte
de translation à la Major de Marseille, en présence de l’archevêque d’Arles et
de l’évêque de Sisteron (Albanès et Chevalier 1899, t. 2, pièce 1255).
9. Duhil et al. (éd.) 2007.
10. Sclafert (éd.) 2009.
11. Albanès 1897.
12. Voir à ce sujet Zingarelli 1901 et Gazay 1913.
13. Pansier 1926.
14. Albanès 1879.
15. L’indulgence est la remise de tout ou partie des peines temporelles. Se
reporter à Rapp 2000 pour plus d’informations à ce sujet dans le contexte
avignonnais.
16. De nombreuses indulgences ont été accordées par les papes à ceux contribuant à l’entretien ou à la réparation de l’Œuvre du Pont d’Avignon, souvent
abîmé, voire détruit, par l’impétuosité du Rhône. En août 1455, le pape
Calixte III est le huitième à le faire (Pansier 1912b, p. 169, 170-173).
17. Carru et Gagnière 1992, p. 81.
18. Voir par exemple Albanès et Chevalier 1920 (pièce 969), Hayez 1985
(p. 25), Carru et Gagnière 1992 (p. 63) et Hayez 2003 (p. 87).
praTique du pèlerinage en
prOvence
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
Fig. 1 Localisation des lieux de découverte des enseignes issues de sanctuaires provençaux et des lieux de culte des enseignes mises au jour en Provence.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
©
C
N
R
S
Éd
iti
on
s
la
91
Olivier ThuaudeT
iti
on
s
San Nicola de Bari et au sanctuaire de la Bienheureuse Marie
de Montevergine à Avellino25. Certains pèlerins prévoient un
circuit de sanctuaires à visiter. Bien que la majorité des testaments ne cite qu’un ou deux sanctuaires, quelques-uns de ces
documents en mentionnent beaucoup plus et attestent alors un
intense parcours de vie dans la foi26.
Le pèlerinage peut aussi être accompli par un proche à qui
est délégué le devoir de l’efectuer à sa place27, éventuellement
contre dédommagement 28, ou par rétribution d’un pèlerin 29.
Dans un testament daté de 1402, la femme d’un apothicaire
aixois exige de son héritier un pèlerinage peu commun : celui-ci
doit se rendre, dans l’année suivant le décès, jusqu’au tombeau
de saint Pierre de Luxembourg dans l’église des Célestins à
Avignon, pieds nus et muni d’une image de cire d’un poids
de sept livres30. Quelques personnages importants parviennent
à faire annuler leur vœu : l’évêque de Marseille Pierre de
Montlaur se fait ainsi dispenser par le pape Honorius en 122331.
Dans les testaments aixois datés entre 1390 et 1450,
N. Coulet remarque que les objectifs principaux du pèlerin
sont l’obtention d’indulgences, le salut de l’âme et la pratique
pénitentielle 32. Dans la documentation provençale de
G. Veyssière, constituée de témoignages lors de procès en
canonisation de la seconde moitié du xive siècle 33 et de vies
de saints de la in du xiiie siècle et de la in du xive siècle34, sur
environ 700 miracles recensés, 550 sont d’ordre thérapeutique,
90 sont liés aux risques naturels, 60 à l’insécurité des temps35.
Il résulte de ces écrits, qui appellent bien évidemment à une
certaine prudence étant donné leur nature hagiographique, que
la plupart des personnes n’accomplissent un pèlerinage qu’une
fois le vœu réalisé. La diférence entre les raisons invoquées
dans les testaments et celles présentes dans les récits de miracles
s’expliquent certainement par le fait que le testateur prépare
l’au-delà et songe beaucoup plus, dès lors, à la rémission de ses
péchés et au salut de son âme.
Éd
ce genre de politique lors de conciles 19. Le commerce des
indulgences perdure encore au xvie siècle20. Ces « libéralités »
ont sans doute eu un efet, du moins à court terme, sur le
taux de fréquentation des édiices religieux concernés, mais
il n’est pas évident qu’elles aient toujours contribué, même
quand les sanctuaires détenaient des reliques, à en faire des
sites de pèlerinage importants. La renommée et le prestige
d’un lieu ainsi que l’ampleur des visites efectuées sont avant
tout la conséquence de la célébrité d’un saint ou des reliques
conservées, de la nature et du retentissement des miracles qui
s’y rapportent, de l’intensité des moyens déployés par le clergé
local pour inciter à la visite et favoriser l’accueil et l’hébergement des pèlerins.
Nombre de centres de pèlerinages majeurs sont situés hors
de Provence et ils en sont parfois très éloignés, tels que Rome,
Saint-Jacques de Compostelle ou Jérusalem. Pour entreprendre
ces voyages, longs et parfois périlleux 21, le pèlerin préfère
généralement partir avec un groupe pour se prémunir de l’insécurité, d’après le témoignage des miracles provençaux22. Il peut
éventuellement recourir à un itinéraire écrit pour se guider23.
Prenant en compte la dangerosité du trajet, il n’hésite pas, avant
son départ, à mettre de l’ordre dans ses afaires et à rédiger son
testament24. La sœur Elena de Sclavonia, béguine de Marseille,
le fait établir chez un notaire en 1301. Un an après le jubilé
de 1300, elle part en pèlerinage dans la péninsule Italienne
avec l’intention de se rendre à Rome pour visiter le tombeau
des saints Pierre et Paul, à Venise pour celui de saint Marc, et
continuer son périple en allant au Mont Saint-Angel dans les
Pouilles, au tombeau de saint François à Assise, à la basilique
92
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
19. En 1363, le concile d’Apt octroie des indulgences à ceux qui visitent, à
Arles, la nouvelle chapelle Saint-Barthélemy de la cathédrale Saint-Trophime
lors de certaines fêtes (Albanès et Chevalier 1901, no 3302). Deux ans
plus tard, ce même concile concède une indulgence de quarante jours sur le
temps de Purgatoire à tous les idèles qui visitent l’église de la bienheureuse
Marie à Saignon – qui conserve un fragment de la Croix – pendant les fêtes
de l’Invention et de l’Exaltation de la Sainte-Croix (Arnaud d’Agnel 1906,
p. 383-384).
20. En 1506, le pape Jules II en accorde une à tous ceux qui, par leur contribution inancière, permettent de terminer l’église de Saint-Gilles, sanctuaire
dont la renommée a fortement chuté. Au milieu du xvie siècle, une indulgence est donnée à ceux qui s’arrêtent à l’église Sainte-Croix d’Auriol, dans
les Bouches-du-Rhône, et qui y laissent une aumône (Raimbault 1921, p. 39
et 56).
21. En 1582 et 1583, sept personnes sont condamnées à mort et (sic) au
paiement d’une amende pour avoir attaqué ou participé à l’attaque de
quatre pèlerins romains au-dessus de Garron, dans le Var (AD Var, 1 B 344).
22. Veyssière 1994, p. 204.
23. Les quatre chemins déinis grossièrement par le Guide du pèlerin, daté
du xiie siècle, ne correspondent à aucune vérité historique et ce guide était
pratiquement inconnu jusqu’à sa première publication par J. Vielliard
en 1938 (Péricard-Méa 2000, p. 16, 185). Il existe de nombreux « guides »
de difusion très restreinte rédigés à l’attention des pèlerins partant vers
Jérusalem, Rome et Saint-Jacques (Koldeweij 2006, p. 88-93) : par exemple,
le dernier folio d’un manuscrit de la bibliothèque de Carpentras livre un itinéraire en 58 étapes vers Saint-Jacques-de-Compostelle, avec pour point de
départ Avignon (Pansier 1930).
24. Par exemple, testent avant de partir à « Saint-Jacques en Galice », en 1386,
deux pêcheurs marseillais (AD BDR Marseille, 351 E 123, fol. 105r-107r et
fol. 111v-114r), en 1414, le boulanger Honorat Sperelli (AD BDR Marseille,
351 E 167, fol. 4r à 6v), en 1428, le noble Jean Forbin (AD BDR Marseille, 351
E 236, fol. 276r-279v), en 1430, Gonzales Velho (AD BDR Marseille, 351 E
239, fol. 263r-253v).
25. Michaud 2009, p. 323-324.
26. Le testament de 1475 de Delphine Lagier, femme de laboureur, consigne
une liste de neuf pèlerinages : Saint-Lazare-de-Marseille, Notre-Dame-deMoustiers, Saint-Jean-de-Signes, Saint-Jean-de-Garguier, Saint-Elzéar-d’Apt,
Sainte-Marthe-de-Tarascon et Saint-Louis-d’Arles, ainsi que deux sanctuaires
hors de Provence, Notre-Dame-du-Puy et Rocamadour (Coulet 1972,
p. 251).
27. En 1414, par testament, la femme du seigneur de Collongue impose à son
mari le romipetagium de la bienheureuse Marie-Madeleine à Saint-Maximin
(Ribbe 1898, p. 176).
28. Le chanoine d’Aix, Guillaume de Littera, spéciie dans son testament, en
1423, que s’il n’a pu de son vivant réaliser le pèlerinage à Saint-Jacques de
Galice, son héritier devra le faire à sa place et recevra une forte somme d’argent
à cet efet (Ramière de Fortanier 1979, p. 71).
29. Le marchand lorentin Pierre Viviani teste à Salon en 1483 et lègue une
somme d’argent destinée à rémunérer un pèlerin qui se rendra au SaintSépulcre (Paillard 1969, p. 29).
30. Coulet 1972, p. 249.
31. Albanès et Chevalier 1899, pièce 228.
32. Coulet 1972, p. 248-249.
33. Procès en canonisation du cardinal Pierre de Luxembourg, inhumé à
Avignon, de la comtesse Delphine de Puimichel, dont le corps est conservé à
Apt, du pape Urbain V, dont la sépulture est à Marseille.
34. La Vida de Douceline, fondatrice des béguines de Marseille, et les Vies
occitanes de Delphine et Elzéar.
35. Veyssière 1994, p. 199.
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
©
36. La communauté de Brignoles envoie à Saint-Antoine d’Arles, en 1491, un
pèlerinage portant un cierge de 25 livres pour que la ville soit épargnée par la
peste. Trois ans plus tard, elle fait envoyer deux pèlerinages, l’un à Notre-Dame
de Plumier, l’autre à Saint-Antoine d’Arles, pour arrêter l’épidémie en cours
dans la cité (Biraben 1976, t. 2, p. 70).
37. Valon 1935, p. 32 et 37.
38. Ibid., p. 51.
39. Ibid., p. 40 ; Ganshof 1966.
40. Ibid., p. 33, 41, 45-47, 51.
41. AD Var, 1 B 270, fol. 158r.
42. À Avignon, il visite l’église des Célestins dans laquelle est conservé le corps
du bienheureux Pierre de Luxembourg et la tombe du pape Clément VII.
À Arles, il prie devant les reliques de saint Antoine. À l’abbatiale Saint-Victor
de Marseille, il vénère le chef du saint, celui de saint Martin, de la chaire
des Saints Innocents, une côte de saint Lazare, une dent de saint Pierre, la
croix de saint André dont il est possible de baiser un morceau par dévotion.
Dans l’arrière-pays, il s’arrête ensuite à « l’oratoire où la glorieuse Madeleine
demeura avant d’aller faire pénitence sur le Mont de la Baume », puis à SaintMaximin où il se recueille devant le reliquaire contenant la tête de Madeleine
(Breton 1991, p. 50, 54).
Fig. 2 Localisation des enseignes provenant de sanctuaires hors de
Provence.
2. LES ENSEIGNES ET AMPOULES
DE PÈLERINAGE DÉCOUVERTES EN
PROVENCE OU EN PROVENANT
Les enseignes étudiées sont précédées d’une courte notice sur
les sanctuaires et organisées selon la localisation d’est en ouest
de ces derniers. Quelques considérations sur des sanctuaires
provençaux de grande importance, pour lesquels il n’est pas
encore connu d’enseignes de pèlerinage, sont également
présentées. Par convention, sauf mention contraire, l’ensemble
des objets présents dans ce chapitre, est en matériau blanc,
c’est-à-dire en étain, en alliage d’étain et de plomb ou potentiellement en plomb (seules des analyses de composition
permettraient d’identiier précisément le matériau). Beaucoup
d’enseignes ont été retrouvées hors stratigraphie, ou dans
des contextes d’une iabilité incertaine. Les datations stylistiques proposées par les chercheurs ont été reprises avec leur
éventuelle argumentation. Il est nécessaire de les considérer
avec prudence. En efet, les moules peuvent avoir été utilisés
pendant de longues périodes. De même, dans le long terme,
l’image d’une enseigne, même archaïque, a pu être préférée
lors de la production à celle d’une iguration plus récente. Elle
met l’accent sur le caractère ancien du sanctuaire, sa pérennité
et se fait, dès lors, le témoin de la continuité des bienfaits du
lieu.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
Éd
Le pèlerinage peut être une afaire personnelle, communautaire36 ou le résultat d’une décision de justice. La jurisprudence de l’Inquisition cathare reconnaissait dans la première
moitié du xiiie siècle deux sortes de pèlerinages, quatre majeurs
avec Rome, Saint-Jacques de Compostelle, Saint-homas de
Cantorbéry, les trois rois à Cologne, et vingt mineurs dont, en
Provence, Saint-Gilles, l’abbaye Saint-Pierre de Montmajour
à Arles, la Sainte-Baume et Saint-Maximin 37. Dans le comté
de Flandres, la pratique du pèlerinage expiatoire, apparue à
partir du milieu du xiiie siècle, devient courante au xive siècle,
léchit au xvie siècle pour disparaître au xviie siècle. Les guerres
de Religion seraient la cause principale de cet abandon38. Le
sanctuaire provençal de loin le plus connu de ces tribunaux
est celui de Saint-Gilles, mais il y eut aussi Saint-Maximin,
Notre-Dame des Doms à Avignon, la Sainte-Baume, SaintLouis de Marseille, Saint-Victor de Marseille, Saint-Pierre
de Luxembourg à Avignon et, enin, les Saintes-Maries-dela-Mer 39. Le condamné, une fois la sentence ordonnée, se
déplace jusqu’au(x) sanctuaire(x) qui lui a/ont été désigné(s)
et doit en rapporter des lettres attestant de ses visites. Il peut
également racheter la sentence selon une grille tarifaire 40.
Aucun document ne permet de prouver, contrairement à une
opinion commune, le jet de l’insigne du ou des pèlerinage(s)
dans une rivière.
Les tensions qui agitent la société dans la seconde moitié du
xvie siècle obligent certaines personnes à faire reconnaître leur
catholicité. C’est le cas de Louis Cavalier. Ce docteur en droit
et avocat au Siège, à Draguignan, bien que reconnu catholique,
s’en va, en 1569, à « Sainct-Mayxemin, en romavage, voyr la
Saincte Ampole » probablement pour écarter tout doute dans
l’esprit d’éventuels suspicieux, et ainsi, se faire oublier quelque
temps41.
La visite des sanctuaires peut aussi être afaire d’opportunité,
par exemple pour un marchand passant dans les environs. Le
cardinal d’Aragon, lors de son retour en Italie, en 1517, proite
de sa traversée de la Provence pour s’arrêter en de nombreux
endroits vénérer les reliques42.
s
prOvence
on
praTique du pèlerinage en
iti
la
93
Olivier ThuaudeT
94
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
on
iti
Éd
Deux des plus célèbres centres de pèlerinage provençaux, bien
que relativement récents, sont le couple grotte de la SainteBaume et abbaye de Saint-Maximin, deux sites concernés par
la présence de Marie-Madeleine. Sainte Marie-Madeleine,
témoin important de la vie du Christ, est célébrée depuis le
xie siècle à Vézelay, où son corps aurait été déplacé depuis
Saint-Maximin à la in du ixe siècle, mais la vie de disciple
et de pénitente qu’elle aurait menée en Provence a donné
naissance à un pèlerinage dans la grotte de la Sainte-Baume,
où elle se serait réfugiée pendant 30 ans après avoir été chassée
de Béthanie. Saint Louis y passe en 1254 avant de partir en
croisade43. Les lieux à visiter à la Sainte Balme sont ainsi décrits
par le notaire nîmois Étienne Borrely en 1677 : « le rocher où la
Magdeleine reposoit, la chapelle qui est au derrière du rocher
et le Saint Pilon »44. La création du pèlerinage à Saint-Maximin
est, quant à lui, l’œuvre de Charles II. Avant de devenir comte
de Provence et roi de Sicile, le prince de Salerne entreprend en
1279 de mettre au jour le « vrai » corps de la sainte. Ce dernier
est reconnu comme tel par le pape Boniface VIII en 129545.
L’abbaye conserve, ainsi que le décrit Étienne Borrely, « la
sainte Ampoule, la teste de la Magdeleine et ses cheveux dans
une ampoule, son bras et autres reliques très précieux »46. Le
développement du culte doit beaucoup à Charles II, mais aussi à
Jean Gobi l’Ancien, prieur du couvent royal de Saint-Maximin,
qui compila des miracles en un livre dans le premier tiers du
xive siècle. L’objectif fut d’illustrer les mérites de la sainte et
d’attester la présence de son corps à Saint-Maximin. D’après
le contenu des miracles, la plupart des pèlerins venaient du
comté de Provence, du Gard, de l’Hérault, mais aussi d’Italie, et
les maladies tiennent une place prépondérante dans la formulation des motifs47. Rois de France, personnages puissants48
et anonymes49 s’y pressent durant les xive, xve et xvie siècles.
En février 1478, par exemple, le roi René vient au pardon de
Saint-Maximin et sa petite ille y achète des enseignes. Des
exemplaires en matériau précieux sont acquis ou fabriqués par
la suite (ig. 3). Le pèlerinage perd de son importance durant
l’époque moderne : en 1780, Jean-Pierre Papon précise : « bien
que les pèlerinages de la Sainte-Baume ne soient plus aussi
fréquents qu’ils l’étaient autrefois ; il y a peu de personnes
parmi le peuple, qui s’en dispensent la première année de leur
mariage : et si ce voyage n’est pas stipulé dans le contrat, il
est du moins regardé comme une preuve de la tendresse des
époux pour leurs femmes »50.
s
2.1. LES SANCTUAIRES DE SAINTE MARIEMADELEINE
43. Sclafert (éd.) 2009, p. 22-24.
44. Puech 1885, p. 463.
45. Sclafert (éd.) 2009, p. 26-29.
46. Puech 1885, p. 463.
47. Sclafert (éd.) 2009, p. 29-33, 44-45, 57-59.
48. Se reporter à Faillon 1865, p. 494, 1509-1511 et à Breton 1991, p. 4.
49. Par exemple, en 1471, Jean Morel, homme à tout faire au service d’un
notaire de Cucuron, prend congé de son employeur pour quelques jours et,
avec une avance de six gros sur son salaire, part en direction de ces lieux saints
(Audisio 1988, p. 156).
50. Papon 1780, p. 59. Charles de Ribbe témoigne également de cette
tradition, mais il ne cite pas ses sources et cet auteur généralise souvent à partir
de quelques données éparses (Ribbe 1898, p. 177).
Fig. 3 Dépenses du roi René et de son fils le duc de Calabre en
enseignes, bourdons de marche et autres objets relatifs à des lieux
de pèlerinage. A + no = ARNAUD D’AGNEL 1908 ; L + no = LECOY DE LA MARCHE
1875.
Six enseignes du pèlerinage de Marie-Madeleine de SaintMaximin sont actuellement répertoriées : cinq exemplaires
rectangulaires en matériau blanc fabriqués par la fonte et un
spécimen confectionné dans une feuille d’argent estampée.
Une première enseigne en matériau blanc, fortement
rognée, a été trouvée dans la Seine à Paris en 1849. Son état
actuel, similaire au dessin d’Arthur Forgeais en 1863 (ig. 4,
no 1a), difère quelque peu du dessin de Éugène Hucher en
1853 (ig. 4, no 1b), mais ce dernier comporte des erreurs. Une
seconde enseigne, datée stylistiquement de la in du xiiie ou du
début du xive siècle51, a été trouvée sur les berges de la Tamise,
à Londres (ig. 4, no 2)52, une troisième est conservée au musée
Carnavalet (ig. 4, no 3)53. Une quatrième pièce, provenant du
Mont Saint-Michel, est datée stylistiquement du xiiie siècle
par Arthur Forgeais (ig. 4, no 4) 54. La dernière, attribuée au
51. Santiago de Compostela, p. 316, no 216.
52. Spencer 2010, p. 239, ig. 246f.
53. No 367, tiroir 2 du médaillier de Forgeais. L’objet est très abîmé.
54. Forgeais 1865, p. 229-231.
praTique du pèlerinage en
prOvence
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
Éd
iti
on
s
la
©
C
N
R
xvie siècle par l’abbé Desnoyers, fut ramassée dans le lit de
la Loire à Orléans, au début des années 1870. Elle a disparu,
vraisemblablement lors de l’incendie du musée de l’Orléanais
en 194055.
Ces objets en matériau blanc reproduisent une femme
prosternée devant le Christ (ig. 4, no 1), ou allongée sous une
table à laquelle prend place le Sauveur (ig. 4, no 2 à 4) qui, dans
un cas au moins, bénit de la main droite (ig. 4, no 4). La scène
se déroule dans la maison de Simon le Pharisien, au moment
du repas : « Et se plaçant par derrière, à ses pieds, tout en
pleurs, elle se mit à lui arroser les pieds de ses larmes ; et elle les
essuyait avec ses cheveux, les couvrait de baisers et les oignait
de parfum » (Luc 7, 37-38). Quatre enseignes (ig. 4, no 3 à 4)
igurent deux personnages supplémentaires, qui peuvent être
identiiés par comparaison avec une enseigne du Mont SaintMichel (ig. 4, no 4) : saint Pierre, reconnaissable à sa clef, remplit
une coupe. Au centre, de la table, Simon tient un couteau et fait
les honneurs de la table. L’une des « clefs conjuguées » perçues
par l’abbé Desnoyers sur la pièce d’Orléans 56 pourrait bien
être ce couteau. Dans la partie supérieure de l’objet londonien
(ig. 4, no 2), trois petits arcs dans une excroissance rectangulaire igureraient le sanctuaire de Saint-Maximin57. L’inscription
55. Desnoyers 1876, p. 174.
56. Inscription sur la pièce d’Orléans (Desnoyers 1876, p. 174).
57. Santiago 1985, p. 316, no 216.
est variable : + SIGILLV[M BEATE MAR]IE MADELENE
(ig. 4, no 2), + SIGILLVM BEATE MARIE MAGDALVME
(ig. 4, no 2) ou [SIGNUM BEATE M]ARIE M[AGDALENE]58
éventuellement suivi de SANCTI MAXIMIN[I] (ig. 4, no 1) qui
donne la localisation du sanctuaire. L’iconographie et la forme
des autres pièces, très semblables, ne laissent aucun doute sur
leur origine commune59. Sur l’enseigne parisienne, deux écus
encadrent la scène, l’un aux armes de Sicile-Tarente à gauche
– semé de France au lambel de gueules à la cotice d’argent –
l’autre de Provence à droite – d’or à quatre pals de gueules.
Leur présence pourrait être liée, selon Arthur Forgeais et Denis
Bruna60, à une lettre du 29 avril 1354 de Louis de Tarente et de
sa femme Jeanne, à destination des magistrats de Saint-Maximin,
suite à une plainte émanant du prieur du couvent et des artisans
habilités à procéder à la fabrication des enseignes61. Selon la
coutume alléguée et remontant au moins à l’année 1311, le prieur
remet les moules (ferrum ou ferrus) à enseignes de pèlerinage
aux personnes de son choix, le produit de la vente des objets
obtenus est ensuite vraisemblablement partagé entre les parties.
Il n’y a donc d’autres marchands autorisés à faire ce commerce
58. Desnoyers 1876, p. 174.
59. A. Forgeais hésite entre une attribution à Vézelay ou à Saint-Maximin pour
l’objet de Normandie (Forgeais 1863, p. 205-207).
60. Ibid., p. 205-207 ; Bruna 1996, p. 170-171 ; Id. 2003, p. 69.
61. Faillon 1865, t. 1, p. 971, t. 2, p. 963-968 ; Carru et Gagnière 1992, p. 57.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
S
Fig. 4 Enseignes des sanctuaires de sainte Marie-Madeleine ; no 1a, Seine (Pont-au-Change), Paris, musée national du Moyen Âge à Paris, dessin :
E. Hucher (HUCHER 1853) ; b, même objet, dessin : A. Forgeais (FORGEAIS 1863) ; no 2, Tamise (barrage de Vintry), Londres, London Museum à
Londres, cl. London Museum (SPENCER 2000, p. 239, fig. 246f) ; no 3, Seine, Paris, dessin, musée Carnavalet à Paris, dessin : O. Thuaudet ; no 4, Mont
Saint-Michel, Normandie, lieu de conservation inconnu, dessin : A. Forgeais (FORGEAIS 1863) ; no 6, Livre d’heures d’Oiselet, troisième quart du
XVe siècle, Bibliothèque royale de La Haye (ms 77 L 60), cl. Bibliothèque royale de La Haye (BRUNA 1998, p. 47).
95
Olivier ThuaudeT
semblable, de 3,6 cm de diamètre (ig. 5), était cousue sur
le dernier feuillet d’un livre d’heures exécuté, entre 1485 et
1490, pour Antoine Bourdin, sergent et garde du château
de Beaucaire, receveur particulier au diocèse de Nîmes 63.
Quatre autres enseignes et une véronique peinte sur un petit
rectangle de parchemin – une autre est encore en place – ont
également été arrachées du feuillet.
2.2. LES SANCTUAIRES MARSEILLAIS
Éd
iti
on
s
La sépulture de saint Victor, mort en 303, devint très tôt un
lieu de pèlerinage. Présent dès la in de l’Antiquité, son rayonnement atteignait la Touraine et le Poitou, comme l’attestent
notamment les écrits de Grégoire de Tours et de Venance
Fortunat64. Il semble perdurer à la in du Moyen Âge, mais
peut-être avec moins d’intensité, ce qui pourrait expliquer
l’absence actuelle d’enseignes de pèlerinage pour ce sanctuaire.
En octobre 1365, Urbain V part en pèlerinage à l’abbaye de
Saint-Victor : il y avait été abbé avant son élection à la papauté65.
Il s’y fait inhumer et un pèlerinage s’y établit. À Marseille
est également conservé le corps de saint Louis de Marseille,
évêque de Toulouse, mort à Brignoles et inhumé dans l’église
des Frères mineurs de Marseille, canonisé en 1317. Il fut aussi
l’objet d’un pèlerinage.
N
R
S
2.3. LES SANCTUAIRES AVIGNONNAIS
96
dans le pays que ceux sélectionnés par le sacristain. Cependant,
peu après la peste de 1348, des commerçants se ixent dans la
ville de Saint-Maximin et font graver des moules pour leur
propre compte. Le couple comtal enjoint alors aux magistrats
de faire respecter le droit coutumier des religieux. Les armoiries
symbolisent-elles cette décision et garantissent-elles que cette
enseigne est un produit autorisé ?
La dernière enseigne répertoriée est une mince tôle d’argent
circulaire, estampée, cousue au moyen de huit perforations en
bordure, parmi 22 autres plaquettes de diférents sanctuaires,
sur le dernier feuillet du livre d’heures d’Oiselet, daté du
troisième quart du xve siècle (ig. 4, no 5) 62. Dans un cadre
constitué d’un cercle cordé et d’un cercle uni, Marie-Madeleine
igure auréolée, les mains jointes en un geste de prière, lanquée
de quatre anges la transportant vers le ciel. Une enseigne
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
Fig. 5 Livre d’Heures, Bibl. Inguimbertine, Carpentras, ms. 59, fol. 110r,
cl. Bibl. Inguimbertine.
62. Bruna 1998, p. 147.
La ville d’Avignon, centre religieux de premier plan au bas
Moyen Âge, est la destination de nombre de pèlerins. La plupart
viennent pour prier sur la dépouille de Pierre de Luxembourg
dans l’église des Célestins et devant une statue de la Vierge
hautement vénérée à Notre-Dame-des-Doms. Un témoignage
transcrit dans le procès en canonisation de Pierre de Luxembourg, ouvert en 1390, interrompu au décès de Clément VII en
1397 et jamais repris, fait état de l’existence d’un culte rendu
au corps de la bienheureuse Marie d’Espérance conservé dans
l’église Notre-Dame d’Espérance à Avignon. Il mentionne,
d’une part, que ce dernier sanctuaire est délaissé par les idèles,
d’autre part, que le culte rendu au cardinal connaît un succès
retentissant. Il perdure encore au xviie siècle66.
2.3.1. Les sanctuaires de saint Pierre de
Luxembourg
Pierre de Luxembourg, d’origine germanique, est nommé
évêque de Metz à quinze ans par Clément VII qui le fait ensuite
venir à Avignon et le nomme cardinal-diacre. Il meurt, dans
sa dix-huitième année, en 1387 à Villeneuve-lès-Avignon. Sa
grande piété et son humilité sont reconnues. Il a demandé
de surcroît à être enterré parmi les pauvres au cimetière
Saint-Michel. Peu après son inhumation le 5 juillet, de grandes
foules se pressent autour de sa sépulture. Un commerçant de
63. Ibid., p. 142-143.
64. Moulinier 1997, p. 607, 609, 611.
65. Hayez 1987, p. 21.
66. Feuillas 1985.
praTique du pèlerinage en
prOvence
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
iti
on
s
la
Éd
Fig. 6 Enseignes du sanctuaire de Pierre de Luxembourg ; no 1, Dordrecht (Pays-Bas), collection particulière, cl. H. J. E. Beuningen (BRUNA 2003) ;
no 2, Saint-Georges, Lyon, Rhône, cl. J.-M. Degueule, (GALTIER et al., fig. 231) ; no 3, Environs de Grenoble ?, Isère, lieu de conservation inconnu,
dessin : L. Maxe-Werly (LABANDE 1899) ; no 4, Provenance inconnue, Musée Calvet, cl. L. H. Labande (LABANDE 1899).
67. Brun 1935, p. 100.
68. Vallet de Viriville 1858, p. 344-346.
69. Laclotte et Thiébaut 1983, p. 240.
70. Chobaut 1943, p. IV-V.
71. Janninck et al. 1719, p. 79, no CCI et CCII.
pour la majeure partie, originaires du diocèse d’Avignon et des
diocèses limitrophes72. Néanmoins, la procédure, mise en place
peu de temps après le décès du cardinal, accroît la renommée
de ce saint homme et elle se propage par la suite beaucoup plus
largement. Le sanctuaire devient d’ailleurs la destination de
pèlerinages pénitentiels depuis les Flandres et la Wallonie73 et
de ce fait, une enseigne de Pierre de Luxembourg a été découverte à Dordrecht, aux Pays-Bas74 (ig. 6, no 1).
Quatre objets ont été répertoriés pour le sanctuaire
d’Avignon. Outre la pièce susmentionnée, un deuxième
artefact (ig. 6, no 2) a été découvert en position intrusive dans
un niveau daté de la in xiie-début xiiie siècle sur le site de
Saint-Georges à Lyon75. La première enseigne prend la forme
d’une arcade gothique en ogive, la seconde, celle d’une nef
aux murs surmontés de pinacles. Une enseigne ou médaille
circulaire qui pourrait avoir été trouvée dans les environs de
Grenoble (ig. 6, no 3)76. Un coin cylindrique en acier, de 3,3 cm
de diamètre pour 12,5 cm de haut, surmonté d’un appendice
destiné à l’emmanchement, ayant servi à la fabrication d’une
« médaille » ou d’une « enseigne » à l’eigie du bienheureux
72. Veyssière 1987, t. 1, p. 19-21, t. 2, p. 390-392 ; Veyssière 1994, p. 209.
73. Valon 1935, p. 40.
74. Beuningen et Koldeweij 1993, p. 188 ; Bruna 2003, p. 1.
75. Galtier et al. 2013, p. 283
76. Maxe-Werly 1898, p. 52. L’objet est connu par une reproduction en
métal établie d’après un estampage en papier d’étain. Le terme de « médaille »
employé par L. Maxe-Werly instille un doute : s’agit-il réellement d’une
médaille ou d’une enseigne circulaire, comme le pense Denis Bruna (Bruna
2003, p. 71). Dans ce dernier cas, l’objet originel serait en tôle et quelques-uns
des grènetis visibles dans le cadre marqueraient l’emplacement de perforations pour une ixation par couture.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
©
C
N
R
S
la succursale avignonnaise de la compagnie Datini rapporte à
la mi-juillet que « le savant comme l’ignorant, l’idiot, le pauvre
y vont comme ils iraient à un grand pardon, et cela le matin, à
midi et le soir. Songez que chaque nuit 200 personnes dorment
et veillent par dévotion en cet endroit. Beaucoup de malades y
sont allés et, la neuvaine faite, ont été complètement guéris »67.
Une chapelle de bois est inancée en 1389 par Marie de Blois,
veuve de Louis Ier d’Anjou. La même année, le roi Charles VI
venu à Avignon pour requérir auprès du pape la canonisation
de Pierre de Luxembourg, fait disposer une statue de cire
grandeur nature à son image devant le tombeau du cardinal,
pour le remercier d’une guérison68. En 1394, sous l’impulsion
de Clément VII, est entreprise la construction de l’église des
Célestins dans laquelle sont ensuite transférés les restes du
bienheureux69. La fabrication d’enseignes à l’eigie du cardinal
a probablement débuté rapidement, le succès inancier étant
assuré par la fréquentation. En 1447, le roi René fait acheter
à Avignon des enseignes d’argent de saint Pierre de Luxembourg (ig. 3). Des images de papier (signa sive imagines) sont
également vendues. En 1441, leur fabrication est coniée par les
Célestins au maître cartier Gillet Courier, originaire du diocèse
de Meaux et habitant la cité papale70. Elles semblent avoir eu
un pouvoir particulier pour prémunir le décès des femmes lors
de l’accouchement, d’après les témoignages rapportés dans le
procès en canonisation en 139771. Ce procès, interrompu cette
même année, montre que les pèlerins venus témoigner sont,
97
Olivier ThuaudeT
L’« enseigne » répertoriée à Dordrecht (Pays-Bas) (ig. 6,
no 1) est datée par Louis-Honoré Labande de l’extrême in du
xve siècle et le coin d’Avignon (ig. 6, no 4) de la première moitié
du même siècle80. Dans ce cas, la peinture du musée du Petit
Palais, dont l’exécution est ixée aux années 1470-1475, qui
présente de nombreuses similitudes avec les objets étudiés, s’inspirerait des enseignes et autres images produites à destination
des pèlerins.
2.3.2. Notre-Dame-des-Doms
Éd
Fig. 7 Peintre provençal, Le bienheureux Pierre de Luxembourg,
vers 1470/1475, Musée du Petit Palais à Avignon (cl. O. Thuaudet).
iti
on
s
Le sanctuaire de Notre-Dame-des-Doms abrite une statue
de la Vierge hautement vénérée, qui fut emportée par les
chanoines81 lors de l’expulsion du chapitre par les Catalans en
1409, dans le cadre du conlit qui opposait les Avignonnais au
pape Benoît XIII. En 1316, Jean XXII octroie une indulgence
à ceux visitant le lieu lors de certaines fêtes82. Il fut également
une destination de pèlerinages pénitentiels83.
Une enseigne de Notre-Dame-des-Doms a été mise au jour
à Avignon, rue Pasteur, lors de travaux de voirie (ig. 8). L’objet
est de forme globalement rectangulaire et ses œillets de ixation
ont disparu. Un cadre, disposé sur trois côtés, comprend
l’inscription S[IGNVM] BEATES M[ARIAE] DE DOM[O]
AVINIONIS. Une Vierge couronnée, tenant dans sa main
droite un sceptre et dans son bras gauche l’Enfant, auréolé,
prend place sous un portail à deux colonnes torses à chapiteaux
– ornés d’une feuille d’acanthe ? Un clocher composé de quatre
étages d’arcades à deux ou trois baies surmonte le tout. De
part et d’autre de celui-ci se détachent deux probables candélabres. D’après Dominique Carru, « le style, la découpe du sujet,
et la graphie des lettres de la légende (E en onciale romane),
permettent d’en situer la fabrication vers la in du xiiie siècle ou
durant le siècle suivant, mais à coup sûr avant 1405 », puisqu’à
cette date, le clocher s’efondre et que sa reconstruction ne
s’achève ensuite, avec un résultat quelque peu diférent, qu’au
milieu du xve siècle 84. Une précision est nécessaire : ce n’est
pas tant la fabrication de l’objet qui peut être ainsi datée, mais
la période d’exécution de l’empreinte originelle, puisque le
moule a très bien pu rester en service après les travaux, ou
même être reproduit ultérieurement à l’identique, une fois le
premier exemplaire devenu inutilisable85. Mais, cette méthode
de datation n’est pas non plus iable, car les graveurs ont certainement fait le choix d’un rendu approximatif du bâtiment.
98
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
appartient, selon Louis-Honoré Labande, aux collections du
musée Calvet (ig. 6, no 4)77.
Ces objets igurent le récit de l’extase du saint à Châteauneuf,
tel qu’il est rapporté par le dossier en vue de la canonisation.
Plongé dans une longue oraison, le bienheureux Pierre de
Luxembourg, voit apparaître devant lui le Christ sur la croix.
Sa tête est dirigée vers l’apparition par un ange sur une pièce
(ig. 6, no 3). Un tableau daté vers 1470-1475, autrefois disposé
au-dessus du tombeau et actuellement conservé au Musée du
Petit Palais d’Avignon, a servi de modèle à ces enseignes, à
moins que ce soit le contraire (ig. 7)78. Pierre y est représenté le
regard levé en direction de l’apparition divine située au-dessus
d’un prie-Dieu. Le prie-Dieu sur lequel repose un livre ouvert
est couvert d’un tissu arborant sur le côté un écu aux armes
des Luxembourg, d’azur au lion de gueule rampant couronné
d’or, surmonté d’un chapeau cardinalice à cordons, terminés
par vingt houppes, rappelant la dignité du personnage. Sur
deux objets, le meuble, sans tissu, est richement ouvragé de
motifs architecturaux gothiques. L’enseigne lyonnaise est la
seule sur laquelle l’écu est déplacé derrière le saint (ig. 6, no 2). Il
est sommé d’un chapeau cardinalice d’où pendent deux cordons
à houppes. Le titre de bienheureux, octroyé oiciellement en
1527, lui avait déjà été donné par la ferveur populaire depuis
longtemps79. Il se retrouve dans une inscription au bas d’une
pièce – BEAT[VS] P[ETRVS] CARD[INALIS] (ig. 6, no 1) –,
dans un listel serpentiforme sommé d’un ange – BEATVS
PETRVS LVCEMBOVRG (ig. 6, no 3) – sur une autre. La
dénomination de saint qui apparaît sur le coin – S[ANC]TVS
P[ETRVS] DE LVCE[M]BVRGO (ig. 6, no 4) – est reprise dans
les comptes du roi René en 1447 (ig. 3).
77. L’objet pourrait provenir des anciens fonds de la monnaie d’Avignon et
avoir été donné au musée par la préfecture en 1835 (Labande 1899).
78. Pour plus d’informations sur ce tableau, se reporter à Laclotte et
Thiébaut 1983, p. 240-241.
79. Maxe-Werly 1898, p. 52.
2.4. LES SANCTUAIRES D’ARLES ET DE SA RÉGION
Les principaux lieux de pèlerinage sont l’église collégiale SainteMarthe de Tarascon et surtout l’abbaye de Montmajour. Il
convient également de citer Saint-Trophime d’Arles où repose
le premier évêque d’Arles et où le Guide du pèlerin conseille
80. Labande 1899, p. 410.
81. Pansier 1912a, p. 106.
82. Albanès et Chevalier 1920, pièce 904.
83. Valon 1935, p. 40 ; Ganshof 1966.
84. Carru 1998, p. 49, 52, 53.
85. Voir à ce propos Bruna 1996, p. 9.
praTique du pèlerinage en
prOvence
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
on
s
la
iti
Fig. 9 Enseigne de l’église Sainte-Marthe de Tarascon, Livre d’Heures,
Bibliothèque de l’Arsenal, ms 1776 A Rés., fol. Av., cl. Bibliothèque de
l’Arsenal (BRUNA 1998).
R
S
Éd
nommé Tarascon d’après la légende. Une grande attention fut
portée à la sainte au xve siècle ainsi que l’illustrent des travaux
commencés en 1436 sur le reliquaire87, la réalisation d’un
retable coniée en 1446 à Enguerrand Quarton88 et la sculpture
d’un gisant de la sainte par Francesco Laurana dans le troisième
quart du xve siècle89. Le reliquaire est pourvu de perforations
grâce auxquelles les pèlerins pouvaient toucher les reliques, les
mettre en contact avec des enseignes ou d’autres objets. Le roi
René éprouve une vénération pour la sainte (ig. 3), de même
que le roi de France Louis XI qui, en 1470, ofre à l’église une
châsse en or aujourd’hui détruite90.
Un livre d’heures du xve siècle à l’usage de Paris conserve, au
verso du premier feuillet, une enseigne de pèlerinage circulaire
obtenue par estampage d’une feuille d’argent (ig. 9). Dans un
cadre alternant baguettes cordées et cordons nus, sur fond d’un
semis de leur de lys, sainte Marthe, auréolée, vêtue d’un long
manteau, est igurée debout sur la Tarasque qu’elle asperge
d’eau bénite avec un goupillon. Douze trous ont été réalisés
en bordure pour la ixation par couture. Une pièce de broderie
igurant les instruments de la Passion autour du monogramme
du Christ, ainsi qu’une véronique, sont également disposés sur
le même folio91. Ce type d’enseigne en tôle perforée pour la
couture apparaîtrait dans les années 1460-147092.
C
N
Fig. 8 Enseigne de l’église Notre-Dame des Doms, rue Pasteur,
Avignon, Vaucluse, Service archéologique du Vaucluse, dessin :
D. Carru (CARRU 1998).
une halte86. Mais, aucune enseigne se rapportant à ce sanctuaire
n’a encore été retrouvée.
L’église collégiale de Tarascon conserve les reliques du corps de
sainte Marthe. Le territoire de l’actuel Tarascon était soumis à
la terreur de la Tarasque depuis de nombreuses années lorsque
Marthe, qui avait débarqué avec Marie-Madeleine à Marseille,
décida, sur la prière du peuple, d’aller capturer le monstre.
Elle le trouve en train de dévorer un homme, lui lance de l’eau
bénite et lui montre la croix. Le monstre aussitôt se soumet ;
elle lui passe alors sa ceinture autour du cou et le conduit
au village voisin où il meurt lapidé. Le lieu de la capture est
86. Vielliard (éd.) 1984, p. 34-35.
87. Arnaud d’Agnel 1908, no 2724.
88. Ibid., no 619.
89. Mognetti 1981, p. 171.
90. Esquieu 1979, p. 130.
91. Bruna 1998, p. 141.
92. Ibid., p. 129-130.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
©
2.4.1. L’église collégiale Sainte-Marthe de Tarascon
99
Olivier ThuaudeT
100
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
s
on
Éd
L’abbaye bénédictine de Saint-Pierre-de-Montmajour fut
fondée en 949. En 1019, l’abbé Rambert y institue le « pardon »,
à l’occasion de la consécration par l’archevêque d’Arles, Pons
de Marignane, de la crypte de la première église Notre-Dame,
alors en cours de construction. Cette crypte contenant un
fragment de la vraie croix est dédiée à la Sainte-Croix. La
cérémonie du « pardon » de Montmajour, célébrée le 3 mai,
jour de l’invention de la Sainte-Croix, accorde l’absolution des
péchés aux idèles qui y participent et qui laissent une ofrande
pour l’achèvement de l’édiice. Face au succès grandissant du
pardon, une chapelle-reliquaire à plan cruciforme, au vocable
de sainte Croix, fut construite à l’extérieur du monastère pour
le service des pèlerins vers 1170-118093. Ce pèlerinage, qui
donnait aussi lieu à une vénération à saint Pierre, concourut
à la prospérité du nouveau sanctuaire, de l’abbaye et de la
ville. Le 3 mai 1409, la cérémonie du pardon de Saint-Pierre
de Montmajour réunit, d’après l’arlésien Bertrand Boysset,
des pèlerins (romieus) du monde entier au nombre de 150 000
de ce qu’il en a vu et entendu. Elle est honorée de la présence
du roi Louis II, en noble compagnie, qui séjourne alors en
Provence pour préparer la conquête de Naples94. Ce chifre
est largement exagéré, mais il donne une idée de l’ampleur
de la manifestation. Un compte de péage de 1425 enregistre
12 000 pèlerins passant par Arles95. En 1504, il est institué une
indulgence plénière pour le pèlerinage à Montmajour.
Cas rare, la fabrication de souvenirs est renseignée. Par
contrat daté du 15 avril 1359, les religieux s’engagent à fournir
à un plâtrier d’Arles, maître Jean de Squire de Tournai, les
moules nécessaires à la fabrication des « images de saint Pierre »,
vraisemblablement des statuettes en plâtre, celles-ci devant être
vendues à bénéice égal entre les parties96. En 1424, un mercier
et un boulanger arlésien reçoivent le monopole de la confection
des images de saint Pierre et des clefs de plomb et d’étain97. Ces
personnes ne sont pas des artisans du métal, mais agissent en
tant que capitalistes. Elles ont très probablement délégué ou
employé des artisans, versés dans la confection des moules et
dans le travail de l’étain, du plomb et de ses alliages. N’était-il
fabriqué à cette occasion que des enseignes ?
Des niveaux d’occupation de maisons des xiiie-xive siècles,
rue du Limas à Avignon, ont permis, en 1989, la découverte
d’une enseigne à l’eigie de saint Pierre (ig. 10, no 1). Le cadre
pentagonal de cette pièce contient une légende agencée de
façon malhabile entre deux rangées de grènetis : + S[IGNVM]
SAN[C]TI PETRI MONTIS MAIORIS. Dans le champ, Pierre,
drapé, chaussé et coifé d’une mitre ou d’une tiare, assis sur un
trône stylisé, bénit de la main droite et tient une clef dans la
main gauche. Un globe surmonté d’une croix, sous son coude
droit, évoque probablement la situation de l’abbaye en terre
d’Empire. La dévotion à saint Pierre ne paraît pas être fondée
sur une légende quelconque. Saint Pierre étant le dédicataire
de l’abbaye, peut-être en possédait-elle des reliques ?
Les enseignes de la Sainte-Croix de Montmajour, en matériau
blanc, sont plus nombreuses et peuvent être regroupées en
trois types. Appartenant au premier type, un exemplaire a
été découvert au no 5 de la rue Collège-de-la-Croix, lors de
travaux de sondage, dans un sol remanié, aux abords d’une
ancienne livrée cardinalice d’Avignon (ig. 10, no 2). Cette croix
aux larges et courtes branches porte la iguration du Christ les
yeux ouverts, couronné, les membres droits, vêtu d’une longue
tunique s’arrêtant aux poignets et aux chevilles. La croix-support
comporte une inscription marginale : + SIGNVM S[AN]C[T]
E CRVCIS DE MONTE MAIORE. Huit œillets permettent
sa ixation. Trois fragments de branches, appartenant à une
enseigne similaire, ont été découverts par un particulier lors
de travaux dans son jardin au Castelet à Fontvieille (ig. 10,
no 3). Une telle iguration du Christ s’observe sur des cruciix
du xiie siècle, notamment celui de la cathédrale Saint-Martin
de Lucques, le Volto Santo, dont les plus anciennes enseignes
de pèlerinage reprennent l’image. L’enseigne de Montmajour
est peut-être la réplique d’un cruciix conservé à l’abbaye et
sujet de vénération98. Elle est attribuable au xiiie siècle d’après
des critères stylistiques avancés par Dominique Carru et
Sylvain Gagnière99.
Le second type d’enseignes de la Sainte-Croix de
Montmajour, trouvé lors des mêmes travaux au Castelet à
Fontvieille, montre cette fois-ci deux versions d’un Christ
seulement vêtu du perizonium, la tête nimbée et penchée vers
sa droite, les jambes repliées (ig. 10, no 1 à 7). Cinq enseignes
sont connues. Elles portent pour la plupart l’inscription latine
+ SIGNVM S[AN]C[T]E CRVCIE MAIORE – le E de CRVCIE
est disposé à l’envers du sens de lecture –, limitée extérieurement par une ligne de grènetis. Un fragment non classiiable
comporte les lettres TIS de MONTIS MAIORE (ig. 10, no 8).
Une première version igure le Christ mort, la tête tombante
(ig. 10, no 4 et 7). La seconde le présente vivant, de face avec
la tête légèrement relevée (ig. 10, no 5 et 6). L’absence presque
totale de percement des œillets placés aux extrémités d’un objet
démontre, d’après Paul Ferrando, que l’objet n’a pas été ini et
donc vendu 100. Cependant, de telles observations ne peuvent
constituer une preuve, comme le montre l’enseigne de Volto
Santo de Lucques découverte à Fox-Amphoux, qui n’a vraisemblablement pas été portée (ig. 16, no 5). Ces objets pouvaient
être conservés précieusement dans un sac ou une bourse.
Une dernière enseigne, assez fruste dans son dessin et
son modelé, découverte également au Castelet, appartient au
troisième type (ig. 10, no 9). De forme quadrangulaire, elle
reprend dans un encadrement de grènetis, entre une suite
de cinq arcs ou voûtes en partie inférieure et des hachures
en partie supérieure, l’iconographie du Christ sur la croix.
Trois petits traits situés au-dessus de la tête pourraient repré-
iti
2.4.2. L’abbaye bénédictine de Saint-Pierre-deMontmajour
93. Benoit 1927, p. 110 ; Gagnière 1981, p. 50 ; Stouff 1999, p. 32.
94. Bonnemant 1876, p. 127-128 ; Stouff 1999, p. 25-29. Le 1er décembre
1400, la femme du roi Louis II visite Saint-Trophime avec le prince de Tarente
et le comte de Prade (Bonnemant 1876, p. 60).
95. Ferrando 2001a.
96. Benoît 1927, p. 112-113 ; Baudat 1999, p. 18-19 ; Baudat 2001, p. 43.
Paul Benoît, qui ne donne pas l’origine de cette information, spéciie que les
religieux doivent également livrer le plomb, mais Michel Baudat ne mentionne
pas le plomb lorsqu’il fournit le renseignement et renvoie à un manuscrit du
chanoine Louis Bonnemant à la bibliothèque municipale d’Arles, qu’il ne m’a
pas été possible de consulter.
97. Stouff 1999, p. 29.
98. Cette hypothèse a été formulée pour la première fois par Carru et
Gagnière 1992, p. 77.
99. Carru et Gagnière 1992, p. 92.
100. Ferrando 2001a, p. 8.
praTique du pèlerinage en
prOvence
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
Fig. 10 Enseignes à l’effigie de saint Pierre et de la Sainte-Croix de l’abbaye de Montmajour ; no 1, Rue du Limas, Avignon, Vaucluse, Service
archéologique du Vaucluse, dessin : D. Carru (CARRU 1998) ; no 2, Rue Collège-de-la-Croix, Avignon, Vaucluse, Service archéologique du Vaucluse,
dessin : D. Carru (CARRU 1998) ; no 3, Castellet, Fontvieille, Bouches-du-Rhône, collection particulière, dessin : O. Thuaudet ; no 4 à 9, Castellet,
Fontvieille, collection particulière, dessins : O. Thuaudet.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
©
C
N
R
S
Éd
iti
on
s
la
101
102
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
Éd
iti
on
s
Olivier ThuaudeT
Fig. 11 Enseignes à l’effigie de saint Antoine de l’abbaye de Montmajour ; no 1, Le Castelet, Fontvieille, Bouches-du-Rhône, musée de l’Arles
antique, cl. O. Thuaudet ; no 2, Avignon, Vaucluse, collection particulière, dessin : P. Ferrando (FERRANDO 2001b) ; no 3, Musée Calvet, Avignon,
Vaucluse, collection particulière, dessin : P. Ferrando (FERRANDO 2001b) ; no 4, Alpes-de-Haute-Provence, cl. L. Berton (BERTON 2011) ; no 5, Villeveyrac,
Haute-Garonne, collection particulière, photo : auteur inconnu (http://artefacts-encyclopedie.org, ESP-9024) ; no 6, Lycée Ozenne, Toulouse,
Haute-Garonne, cl. H. Améglio (LASSURE et VILLEVAL 2002) ; no 7, Saint-Jean-Sainte-Eulalie, Puget, Hérault, cl. H. Améglio (LASSURE et VILLEVAL 2002) ;
no 8, La Condamine, Tressan, collection particulière, cl. auteur inconnu (http://artefacts-encyclopedie.org, ESP-9024) ; no 9, Le Castelet, Fontvieille,
Bouches-du-Rhône, collection particulière, dessin : O. Thuaudet ; no 10, Avignon, Vaucluse, collection particulière, dessin : P. Ferrando (FERRANDO
2001b) ; no 11, Ardèche, collection particulière, cl. L. Berton (BERTON 2011) ; no 12, Garage Régina, Avignon, Vaucluse, dessin : D. Carru (CARRU et
GAGNIÈRE 1992) ; no 13, Cabinet des médailles de la Bibliothèque de Marseille (GUILLAUME 1884).
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
sans doute les reliques de saint Antoine avec eux. En 1490,
les reliques sont transférées à l’église Saint-Julien à Arles, à
laquelle est adjoint le vocable de saint Antoine. Les restes saints
déménagent une dernière fois dans la nouvelle église SaintJulien-Saint-Antoine un an après sa consécration en 1662105.
Un bréviaire de 1514 mentionne la date du 11 juin comme la
fête de la translation des reliques du Dauphiné jusqu’à Arles106.
Les Arlésiens portent, jusqu’au xviiie siècle, une attention toute
particulière aux reliques de saint Antoine107, ainsi que l’attestent
également l’existence d’une foire de la Saint-Antoine et celle
de processions en son nom deux fois par an108. De tels cortèges
sont envoyés par la communauté de Brignoles en 1491 pour
demander à être épargné de la peste, en 1495 pour implorer
l’arrêt de l’épidémie 109 ou par celle d’Allauch en 1551 110. Les
délibérations municipales conservent la trace du passage de
quelques personnalités venues en pèlerinage111.
La fabrication d’enseignes pour le sanctuaire est illustrée
dans les archives par la notiication d’un contrat passé le
19 février 1490 entre les moines de Montmajour et l’orfèvre
Antoine Fet. Ce document stipule que la fabrication et la vente
d’images en or et en argent sont dévolues à cet artisan pendant
un an, moyennant la somme de 12 lorins par an112.
Quinze enseignes de pèlerinage en matériau blanc de saint
Antoine abbé, que nous avons divisées en trois groupes, sont
actuellement reconnues 113. Paul Ferrando signale également
l’existence de deux autres exemplaires, mis au jour à Avignon
et appartenant à une collection particulière – sans plus d’information –, qu’il n’a pas pu étudier114.
La forme des pièces du premier type, à quatre œillets, évoque
la coupe transversale d’une église à trois nefs. Un exemplaire
a été découvert sur le site du Castelet par Louis Poumeyrol en
1973, dans une couche contenant de la céramique datée entre le
xive siècle et les xvie-xviie siècles (ig. 11, no 1)115. Un deuxième
(ig. 11, no 2) a été découvert dans le centre d’Avignon, un
troisième (ig. 11, no 3) dans des remblais de terrassement du
bas Moyen Âge lors de travaux efectués dans la cour nord
du musée Calvet. Un individu provenant d’un site inconnu
dans les Alpes-de-Haute-Provence (ig. 11, no 4), ainsi que trois
autres mis au jour dans l’Hérault, à Villeveyrac (ig. 11, no 5),
au lieu-dit Saint-Jean-Sainte-Eulalie au Pouget (ig. 11, no 7),
sur le site de La Condamine à Tressan (ig. 11, no 8), et dans un
niveau de la première moitié du xve siècle lors d’une opération
101. Deonna 1946, p. 39 ; Id. 1947, p. 62.
102. Id. 1947, p. 61-62.
103. Ibid., p. 62.
104. Bruna 1996, p. 64.
105. Baudat 1994, p. 4-5, 10, 16-17 ; Id. 1999, p. 75.
106. Id. 1994, p. 12.
107. En 1494, le voyageur allemand Jérôme Münzer, de passage à Arles, note
la vénération des reliques de saint Antoine par les pèlerins et les arlésiens
(Stouff 1991, p. 570).
108. Baudat 1994, p. 23-26, 28 ; Id. 1999, p. 79, 82, 83.
109. Biraben 1976, t. 2, p. 70.
110. Baudat 1994, p. 27-28 ; Id. 1999, p. 82-83.
111. Entre 1498 et 1517, deux conseillers du roi, le grand maître des Hospitaliers de Rhodes, la reine Claude de France, le général de Languedoc et de
Provence et sa femme (Baudat 1994, p. 27-28 ; Id. 1999, p. 82-83).
112. Ibid. 1999, p. 19.
113. Guillaume 1884 ; Carru et Gagnière 1992 ; Berton 2011 ; Ferrando
2001b ; Lassure et Villeval 2002.
114. Ferrando 2001b, p. 39.
115. Informations stratigraphiques tirées de la documentation de fouille
conservée au musée de l’Arles antique.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
©
C
N
R
S
Éd
senter l’acronyme INRI (Ihesus Nazarenus Rex Iudeorum)
souvent iguré dans la peinture contemporaine. Deux personnages debout et auréolés saluent la croix ; celui placé à gauche
du Christ tient un livre. Peut-être peut-on y voir la Vierge et
saint Jean ? Les bras de la croix sont surmontés du Soleil à main
droite du Christ et de la Lune à main gauche, symboles païens
repris par le christianisme. « Placés à droite et à gauche de l’être
suprême, le Soleil et la Lune en proclamant le caractère divin,
airment sa qualité, céleste, cosmique, son rôle de maître du
monde, et en forment l’escorte d’honneur »101 du moins pour
les premiers chrétiens. Pour le second Moyen Âge, les interprétations ont pu évoluer. Ces astres veulent-ils rappeler les
ténèbres qui suivirent la mort du Christ sur la croix ? Dans
l’Évangile (Mt 27, 45), le jour de la mort du Sauveur, depuis la
sixième heure (midi) jusqu’à la neuvième heure (3 heures), toute
la terre fut couverte de ténèbres. Symbolisent-ils la douleur de la
création ? Eux qui commencent et inissent le jour, illustrent-ils
le commencement (de tout) et la in (du monde), l’Alpha et
l’Oméga auxquels le Christ s’est assimilé dans la tradition
chrétienne, et par incidence, la naissance, point de départ, et
la mort, point inal de l’existence humaine ? Signiient-ils ainsi
les deux natures du Christ : humaine et divine, l’Ancienne et
la Nouvelle Loi, l’espérance chrétienne, l’Éternité divine ? Ou
encore jouent-ils le rôle de génies funèbres, psychopompes,
comme ceux du symbolisme gréco-romain102 ? Les cruciixions
accompagnées du Soleil et de la Lune diminuent considérablement au xve siècle et deviennent rares après le début du
xvie siècle103. Au revers, l’enseigne présente un bourrelet pour
lequel aucune justiication n’a été trouvée.
Paul Ferrando avance que la igure du Christ vivant, habillé
et la tête droite (ig. 10, no 2 et 3) est un signe d’ancienneté et
appartient généralement à une imagerie du xiie siècle. Il date
donc sur cette base les pièces du type 1 de la in du xiie siècle
voire du xiiie siècle. Toutefois, une enseigne de Volto Santo de
Lucques igurant un tel Christ est attribuée par Denis Bruna
au début du xive siècle, sur la base de comparaisons avec
des exemplaires découverts dans une sépulture suédoise104.
Paul Ferrando propose de dater les enseignes du type 2
(ig. 10, no 4 à 8) de in xiiie-début xive siècle et l’exemplaire
du type 3 (ig. 10, no 9), qu’il identiie être en étain pur (!) et
donc plus tardif – sur quelle base ? –, du milieu du xive siècle.
La destruction du site castral du Castelet, dans la seconde
moitié du xive siècle constituerait un terminus ante quem.
L’argumentation de Paul Ferrando est assez faible, mais faute
de contexte stratigraphique, il paraît bien diicile de progresser
dans la datation de ces objets.
L’abbaye de Montmajour conserva pendant un temps des
reliques du saint anachorète et « abbé » Antoine. Ses ossements
furent rapportés de Terre Sainte au xie siècle par un seigneur du
Dauphiné et déposés dans l’église de Saint-Antoine-l’Abbaye
(Isère). Une vingtaine de moines de l’abbaye de Montmajour
sont appelés pour s’installer dans le prieuré et, en 1082, l’abbaye
en prend officiellement possession. Assez rapidement, la
fondation bénédictine entre en conlit avec les Hospitaliers
qui les expulsent de leur monastère en 1290, emportant
s
prOvence
on
praTique du pèlerinage en
iti
la
103
Olivier ThuaudeT
iti
on
s
d’un objet mis au rebut. En outre, il paraît vraisemblable que,
dans un tel cas, l’artefact eut été refondu. Enin, l’inversion des
N est fréquente sur les sceaux et enseignes : peut-être est-elle
le résultat d’une convention de style ou d’une erreur dans le
moule, qui s’est perpétuée dans les gravures ultérieures à cause
de l’illettrisme de certains artisans. Pour cette même raison, ce
genre de défauts n’a sans doute pas semblé rédhibitoire pour
une large part de la population.
Au type 3 ne peut être rattaché qu’une seule enseigne
retrouvée en 1989, sur le site de l’ancien garage Régina à
Avignon, dans un sol de terre battue du milieu du xive siècle
(ig. 11, no 12). Cette enseigne en forme d’arc en ogive, igure les
trois personnages habituels dans un même espace, au-dessous
de l’inscription SIGILLVM BE+ATI ANTONII. Le saint abbé,
se présente, cette fois, debout et nimbé, vêtu d’une dalmatique
par-dessus une aube, tenant une croix pattée de la main gauche,
bénissant de la main droite. Deux personnages agenouillés
et implorant l’encadrent. Celui de droite est appuyé sur un
tabouret tripode.
Le type 4 est illustré par une petite enseigne circulaire
fragmentaire de 3 cm de diamètre en matériau blanc (ig. 11,
no 13), conservée au Cabinet des médailles de la Bibliothèque
de Marseille. Le cadre, limité par des bandes nues, est parcouru
de l’inscription SAN ● ANTONI D[’] ARLE ● LEB[LANC].
« Le blanc » est un surnom qui fut souvent attribué au saint à
Arles118. Le saint âgé est iguré debout au centre, la tête nimbée,
vêtu comme d’ordinaire, un livre ouvert dans la main gauche,
un bâton en forme de tau et des clochettes dans la main droite.
À l’arrière-plan, une petite chapelle est surmontée d’une croix.
Deux perforations au-dessus de la tête du saint ont servi à la
ixation.
Les trois premiers types d’enseignes sont postérieurs à la
translation des reliques du saint à l’abbaye de Montmajour
en 1290 et, pour celles découvertes au Castelet, probablement
antérieures à 1386, date à laquelle le site fut abandonné suite
aux destructions de Raymond de Turenne et aux incursions
des Grandes Compagnies119. En outre, certains attributs comme
les lammes du feu de saint Antoine, le cochon avec sa clarine
et le tau à clochettes, absents de ces enseignes, ne se ixent,
selon Michel Baudat, qu’à partir du xve siècle120. Les enseignes
du type 1 seraient antérieures à celles du type 2, car elles sont
plus grossières, présentent moins de détails et ont une graphie
des lettres plus archaïque. Michel Baudat propose de dater les
spécimens du type 1 de in xiiie-début xive siècle et les pièces
du type 2 de la première moitié du xive siècle121, suivant sur
cette dernière datation Denis Carru et Sylvain Gagnière 122.
Ces datations sont peut-être un peu restrictives, les modèles
d’enseigne pouvant perdurer, voire être employés concurremment. Quant à la pièce marseillaise, les attributs du saint
la datent au plus tôt du xve siècle.
Il semble opportun, à ce moment de l’étude, de remarquer
le nombre conséquent d’enseignes retrouvées sur le site
du Castelet à Fontvieille, à quelques centaines de mètres de
l’abbaye de Montmajour. Une telle concentration d’enseignes
104
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
Éd
d’archéologie préventive au Lycée Ozenne à Toulouse (ig. 11,
no 6) se rattachent également par leur champ au type 1.
La nef centrale présente une toiture en bâtière dont le mur
pignon est percé à son sommet d’une fenêtre en plein cintre. De
petits rectangles imitant des pierres font le tour de l’enseigne,
sauf dans la partie basse où se retrouve l’inscription SA[NC]
T[I] A[N]TONII. Il est tentant de voir, dans la bande de petits
rectangles au-dessous de la fenêtre, la limite supérieure d’un
mur pignon. Dans l’espace intérieur de l’église trône saint
Antoine, assis de face, tonsuré, imberbe, vêtu d’une dalmatique
aux plis lourds passée par-dessus une aube. Les mains sont
démesurées, sans doute pour mettre en évidence leur importance. Il bénit de la main droite et tient de la main gauche une
crosse. De part et d’autre, rejetés dans les collatéraux, deux plus
petits personnages de proil, tonsurés, assis sur un tabouret
tripode, lèvent leur regard vers lui. La disposition de leurs bras
semble traduire une conversation animée ou plutôt un état de
ravissement dû à l’écoute de la parole du saint.
Le type 2 comprend trois enseignes récupérées par des particuliers au Castelet (ig. 11, no 9), à Avignon (ig. 11, no 10) et en
Ardèche (ig. 11, no 11). Elles se diférencient des précédentes
par la présence d’arcs en plein cintre dont les claveaux sont
igurés verticalement ou de biais. Sur l’artefact du Castelet
(ig. 11, no 9), des colonnes à chapiteaux stylisés reçoivent les
retombées des arcs. Le pignon peut être percé d’une ou de
trois fenêtres à arc en plein cintre. Au centre de ces enseignes,
comme sur celles de type 1, saint Antoine se présente assis
de face, mais dans un large fauteuil aux accoudoirs circulaires. Il peut être coifé d’une mitre. La position des mains est
également diférente : il tient dans sa main gauche un livre et
la crosse est, cette fois, dans sa main droite. Dans les bas-côtés,
les deux petits personnages ne sont plus assis sur un tabouret.
Celui de droite peut être tête nue ou porter un chapeau pointu,
s’asseoir par terre (ig. 11, no 10) ou être cul-de-jatte. Dans ce
cas, son buste peut reposer sur une sorte de socle avec un pied
(ig. 11, no 11) ou ses mains tenir des poids sur lesquels il devait
s’appuyer pour se déplacer (ig. 11, no 9). Le personnage de
gauche est assis par terre et lève les mains (ig. 11, no 11) ou
se tient debout, appuyé sur des bâtons (ig. 11, no 9 et 10). La
légende est variable : S[ANCTI] B[E]ATI ANTIIIII, S[ANCTI]
BEATI AИTOИ[II] ou S[ANCTI] BEATI AИTO[ИII]. Dans le
premier cas (ig. 11, no 9), d’après Paul Ferrando, l’artisan qui
a gravé le moule a mal évalué la place nécessaire pour intégrer
l’ensemble des lettres : les cinq barres inales symboliseraient
les lettres manquantes. Le « E » de BEATI, totalement efacé,
est interprété comme la conséquence d’une usure du moule
ou de la présence de plomb d’une fonte précédente obstruant
l’empreinte116. Selon Paul Ferrando, la présence de N inversés est
probablement due à une inattention du graveur (ig. 11, no 10 et
11). L’auteur propose de voir dans l’exemplaire d’Avignon une
copie de celui du Castelet à cause notamment de son graphisme
plus fruste. Les manques de matériau, l’inversion des N et la
présence de deux œillets non percés tendraient à montrer
d’après lui que cet objet n’a pas été vendu et aurait été produit
à Avignon 117. Pour étayer cette hypothèse, des données plus
solides seraient nécessaires. Il a déjà été exposé que l’absence
de perforation des œillets n’est en aucun cas la caractéristique
116. Ferrando 2001b, p. 34.
117. Ibid., p. 34-35.
118. Guillaume 1884.
119. Ferrando 2001a, p. 13.
120. Baudat 1999, p. 39-40.
121. Ferrando 2001b, p. 38 ; Baudat 2001, p. 40.
122. Carru et Gagnière 1992, p. 92.
la
praTique du pèlerinage en
prOvence
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
rives de la Tamise. De forme losangique, elle montre, à l’avers,
le saint évêque et l’inscription S[AN]C[TVS] CESARIUS
d’après Brian Spencer, qui n’en fournit pas d’image125.
2.5. LE SANCTUAIRE DES SAINTES-MARIES-DELA-MER
R
S
Fig. 12 Enseignes du sanctuaire des Saintes-Maries-de-la-Mer ;
no 1, Abbaye de Silvacane, La Roque-d’Anthéron, Bouches-du-Rhône,
cl. J.-P. Pelletier (FIXOT et PELLETIER 1990) ;
no 2, Rue du Limas, Avignon, Vaucluse, Service archéologique du
Vaucluse, dessin : D. Carru (CARRU et GAGNIÈRE 1992).
©
C
N
de la Sainte-Croix – neuf exemplaires et fragments –
d’enseignes de Saint-Antoine abbé – deux individus – et l’existence attestée d’une vénération particulière attachée au saint
et à la Sainte-Croix à l’abbaye de Montmajour, toute proche,
laissent supposer la présence d’un atelier de fabrication sur le
site du Castelet. L’absence de contextes stratigraphiques est
malheureusement préjudiciable et ne permet pas de répondre
à certaines questions comme la contemporanéité ou non dans
la fabrication de ces objets. Toujours est-il que la localisation
des enseignes de l’abbaye de Montmajour atteste une difusion
essentiellement régionale de ces deux cultes, Avignon, un
peu plus au nord, servant de point de départ à de nombreux
pèlerins. De multiples lieux de culte et institutions religieuses
de la cité vauclusienne sont, en outre, placés sous la protection
de saint Antoine123.
Dans la ville d’Arles, le Guide du pèlerin préconise aussi de
visiter les reliques de saint Césaire, évêque et martyr de la ville,
de l’évêque saint Honorat et du martyr Genès124. Une enseigne
de l’abbaye de Saint-Césaire a été découverte à Londres, sur les
123. Pansier 1912a, p. 233, Pansier 1929.
124. Vielliard (éd.) 1984, p. 35.
125. Spencer 2010, p. 237. L’objet est également absent de la base de données
en ligne Kunera (www.kunera.nl), consultée le 1er janvier 2017.
126. Faillon 1865, vol. 1, p. 1315.
127. Ibid., p. 1316-1317.
128. Ibid., p. 1320-1331.
129. Denis Bruna (Bruna 2003, p. 74.) airme qu'elle était vraisemblablement contenue dans une bourse avec dix-huit lorins trouvés dans le sol
de la même pièce. C’est une erreur, car si le trésor monétaire et l’enseigne
sont bien issus de la même ièce, ils ne proviennent pas du même contexte
stratigraphique, comme l’a révélé le dépouillement des archives de la fouille
et comme le sous-entend également l’analyse stratigraphique de Michel Fixot
et Jean-Pierre Pelletier (Fixot et Pelletier 1990, p. 201 et 207). Se reporter
également à Charlet 1986 pour l’étude des monnaies « cachées sous un mur. »
130. Carru et Gagnière 1992, p. 69.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
Éd
iti
on
s
Plus au sud, le sanctuaire des Saintes-Maries-de-la-Mer
aurait été édiié à l’endroit même où seraient inhumées sainte
Marie Jacobé, sainte Marie Salomé et Sarah qui, avec MarieMadeleine et d’autres saints personnages, seraient arrivés
sur les côtes de Provence. Les saintes Marie Jacobé et Marie
Salomé sont respectivement fêtées le 25 mai et le 22 octobre,
mais d’après le témoignage en 1357 d’un carme du couvent
de Paris, « aucuns font toutes les deus suers ensemble en
may, pour ce qu’il (sic) ont le service, qui est commun aux
deux ensemble ». Les intempéries de l’automne, la moindre
longueur des jours et l’obligation de devoir dormir sous tente
faute de suisamment de logements sont très certainement la
cause de cette préférence126. L’un des pèlerins les plus célèbres
serait l’évêque de Saint-Pol, Pierre de Nantes qui, au milieu du
xive siècle, aurait été guéri de la goutte par l’intercession des
saintes127. En 1448, des fouilles sont commanditées par le roi
René ain de retrouver le corps des saintes, avec l’accord du
pape Nicolas V. Les squelettes retrouvés près de l’autel sont
alors disposés dans des reliquaires128.
À l’abbaye de Silvacane (La Roque-d’Anthéron), une
enseigne des Saintes-Maries-de-la-Mer a été découverte dans
un sol antérieur au dernier quart du xive siècle (ig. 12, no 1)129.
En quart de cercle, elle possède trois œillets percés. La partie
inférieure du cadre comporte sept ensembles de demi-cercles
superposés. La légende B[EATE] M[ARIE] DE LA MAR, en
caractère gothique, se développe dans la partie haute. Sur fond
d’une onde marine, la igure centrale représentée est celle d’une
femme nimbée drapée avec la tête couronnée, portant de sa
main droite un sceptre leurdelisé et tenant sur son bras gauche
un enfant auréolé bénissant. Cette représentation de la Vierge
à l’Enfant fait allusion au vocable de l’église Notre-Dame-dela-Mer. Une enseigne similaire, mais avec huit ensembles de
demi-cercles et un personnage féminin non plus couronné,
mais à la tête voilée, a été retrouvée, rue du Limas à Avignon,
hors stratigraphie (ig. 12, no 2). Elle peut cependant probablement être mise en relation avec l’occupation médiévale du
lieu située entre la in du xiiie siècle et le milieu du xve siècle130.
Un fragment d’enseigne très dégradé et incomplet provient de
105
Olivier ThuaudeT
106
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
s
Éd
Le plus important centre de pèlerinage de la région est
assurément celui de Saint-Gilles-du-Gard. D’après la Vie de
saint Gilles (in du xe siècle)134, dont le contenu a été repris par
la Légende dorée de Jacques de Voragine135, Gilles, athénien
de famille noble du viie siècle, craignant la renommée après
s’être illustré par plusieurs guérisons miraculeuses, décide
de s’exiler. Après diférentes péripéties, il se retire ain de
vivre une existence solitaire dans une grotte où, par faveur
divine, une biche vient lui donner, à certaines heures, son
lait. Des chasseurs découvrent un jour la retraite de l’ermite
en poursuivant l’animal que les chiens, cependant, refusent
d’approcher. Le roi, informé de cet événement, revient avec
les chasseurs. L’un d’entre eux, par mégarde, blesse Gilles avec
une lèche. Le roi, par repentance et sur les conseils de l’ermite,
fait construire un monastère dont Gilles devient l’abbé sur la
prière du souverain.
Ce sanctuaire est, aux xie et xiie siècles, un centre religieux
majeur dans la chrétienté. Son port, anciennement au débouché
du Rhône, permet de se rendre à Rome par la mer. Par sa localisation, la cité de Saint-Gilles est aussi une étape obligée sur les
routes qui mènent de Provence, d’Italie ou par la voie du Rhône
jusqu’en Galice. La preuve en est établie par la longue notice
consacrée à l’église et aux reliques dans le Guide du Pèlerin136.
La renommée du sanctuaire, soutenue par une indulgence
accordée par le pape en 1154 à ceux qui le visitent137, est relayée
par des témoignages de contemporains, comme celui du rabbin
Benjamin de Tudèle138, au xiie siècle. Le Livre des Miracles de saint
Gilles rédigé en deux fois durant le xiie siècle atteste également
la vitalité du sanctuaire gardois à cette époque139, d’autant plus
qu’il apparaît évident que n’y sont présentés que les miracles les
plus exemplaires140. Le début de la construction d’une nouvelle
église abbatiale, dont le premier autel fut consacré en 1096 par
Urbain II, est entrepris grâce aux libéralités des pèlerins. Elle ne
fut toutefois achevée qu’au début du xive siècle141. Les tarifs de la
Leyde et du Péage de Saint-Gilles au xiie siècle illustrent, par la
longueur de leurs enregistrements, mais aussi par la nature des
produits mentionnés, parfois luxueux, l’ampleur de l’activité
on
2.6. LE SANCTUAIRE DE SAINT GILLES
dans la cité 142. L’attractivité économique de Saint-Gilles avec
son port, ses nombreuses tables de changeur143, son importance
militaire, le passage incessant des acteurs de la vie économique
et politique et l’inluence des établissements bénédictins, dont
le saint ermite est l’un des patrons, ont contribué à difuser le
renom du sanctuaire et de son saint. D’après Kurt Köster, un
épisode de la vie du saint ermite pourrait être également un
élément déterminant dans le succès du culte qui lui est rendu :
un roi le fait venir auprès de lui et lui demande de prier en
sa faveur pour la rémission d’un péché inavouable ; Gilles
s’exécute lors d’une messe et reçoit de Dieu une feuille sur
lequel il est écrit que la faute est pardonnée et que quiconque
invoquera le saint ermite obtiendra de même, pourvu que le
pêcheur promette de ne pas recommencer144. De nombreuses
personnalités sont venues comme le comte Philippe de Flandre
en 1170145, ou bien encore Saint Louis en 1254 et en 1270, avant
son embarquement pour la croisade146. Cependant, diférents
événements politiques, économiques, religieux et naturels tels
que les guerres albigeoises et l’ensablement du port, ont peu à
peu réduit l’attractivité de Saint-Gilles147. Déjà, en 1324, le tarif
de péage révèle cette décadence148. La ville reste cependant un
centre religieux d’une certaine importance : en attestent la place
qu’elle tient dans les pèlerinages pénitentiels de Flandres et de
Wallonie à la in du Moyen Âge149 et l’admission, au xive siècle,
de saint Gilles parmi les cinq confesseurs « privilégiés » vénérés
principalement en Allemagne150. De même, les tarifs de péage
de Tarascon des xiiie ou xive siècles font mention de romieus
espagnols, anglais, allemands et autres venant du nord de Lyon
pour visiter Saint-Jacques ou Saint-Gilles et qui doivent payer
une taxe pour leur passage151. Aux xve et xvie siècles, le culte
de Saint-Gilles décline inexorablement152, même si des pèlerins
provençaux continuent de s’y rendre153. À contre-courant des
autres saints, saint Gilles est surtout invoqué pour préserver
sa vie ou pour être délivré de la captivité plus que pour être
guéri d’une maladie ou d’une inirmité. L’origine des pèlerins
est en outre souvent lointaine, même si le choix efectué
pour la rédaction du Liber miraculum sancti Egidii fausse la
perception : la moitié des récits met en scène des Germaniques.
Le sanctuaire de Saint-Gilles est, avec ceux de Notre-Dame
de Rocamadour et de Saint-Léonard-de-Noblat, l’un des
sanctuaires français qui ofre le plus grand nombre d’enseignes
iti
l’impasse de l’Oratoire 131 et un autre objet découvert dans la
région de Toulouse a été signalé à Denis Bruna 132. Les deux
enseignes d’Avignon sont datées du point de vue stylistique
de la première moitié du xive siècle par Dominique Carru et
Sylvain Gagnière133.
131. Carru et Gagnière 1992, p. 69.
132. Bruna 2003, p. 74.
133. Carru et Gagnière 1992, p. 92.
134. Paris 1881.
135. Wyzewa (éd) 1998, p. 490-492.
136. Vielliard (éd.) 1984, p. 37-47.
137. Carru et Gagnière 1992, p. 81.
138. Saint-Jean 1985, p. 288-289.
139. Duhil et al. (éd.) 2007.
140. Girault et Girault 2007b, p. 288. Trop d’épisodes miraculeux nuiraient
à la crédibilité selon Marcel et Pierre-Gilles Girault.
141. Carru et Gagnière 1992, p. 81.
142. Bondurand 1901 ; Bligny-Bondurand 1915.
143. Il y avait 134 tables de changeurs en 1178, ce qui permettait de servir
50 000 pèlerins en trois jours (Köster 1983, p. 92).
144. Köster 1983, p. 91 ; Wyzewa (éd.) 1998, p. 492.
145. Köster 1983, p. 93.
146. Carru et Gagnière 1992, p. 81.
147. Girault et Girault 2007a, p. 18-19.
148. La comparaison entre la liste des marchandises citées dans le péage du
xiie siècle (Bondurand 1901, p. 285-288 ; Id. 1915, p. 242-243) et celles de
1324 (Falgairolle 1898, p. 557-559) est éloquente.
149. Valon 1935, p. 35, 41, 43, 44, 46, 47 ; Ganshof 1966.
150. Girault et Girault 2007a, p. 20.
151. Bondurand 1891, p. 155-157 ; Baratier 1959, p. 387 ; AD BDR, B 1021,
fol. 85v-86r, B 1152, fol. 22v-23v. Se conférer à la igure 1, no 101, 107, 112 et
121.
152. Köster 1983, p. 97-98 ; Girault et Girault 2007a, p. 20.
153. Charles de Ribbe rapporte le cas d’un jeune jurisconsulte d’Avignon
et de son épouse qui, en 1548, s’y rendent dès le lendemain de leur mariage
(de Ribbe 1898, p. 177)
praTique du pèlerinage en
prOvence
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
Fig. 13 Enseignes du sanctuaire de Saint-Gilles de types 1 et 2 ; no 1, cl. London Museum (SPENCER 2010²) ; no 2, dessin : F.-E. Desnoyers (DESNOYERS
1873) ; no 3, dessin : D. Carru (CARRU et GAGNIÈRE 1992) ; no 4, cl. London Museum (SPENCER 2010²) ; no 5, cl. F. Cajot (KÖSTER 1983) ; no 6, dessin : E. Meyer
(KÖSTER 1983).
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
©
C
N
R
S
Éd
iti
on
s
la
107
Olivier ThuaudeT
iti
on
s
Londres (ig. 11, no 6), appartenant au type 4, se distingue par le
schématisme de la représentation159. L’auréole est ici composée
de triangles et de grènetis.
À l’exception des enseignes du groupe 4, tous les objets
ont une légende. Sur des pièces d’Orléans (ig. 13, no 2) et
de Newbury se lit la légende SANTUS EGIDIUS, de part et
d’autre du corpus du saint. Celle d’un exemplaire londonien
est totalement incompréhensible (ig. 13, no 1). On y reconnaît
certaines lettres comme des S et des U, disposées là où elles
devraient être, mais les autres ne correspondent pas. Le graveur
du moule a très certainement réalisé son ouvrage d’après une
enseigne originale, mais il n’a pas compris la signiication des
lettres prises pour des motifs décoratifs. Sur d’autres artefacts
court la légende S[ANCTVS] : BEATI EGIDII A[BBAS] :
(ig. 13, no 4 et 5) ou [SANCTVS] BE[ATI] EGIDII ABBATIS
(ig. 13, no 6). Pour quelques exemplaires, un cartouche, au
bas de l’enseigne, reçoit l’inscription S[ANCTVS] [E]GID[II]
(ig. 14, no 1), S[ANCTVS] E●G[IDII] (ig. 14, no 2). Il est
inscrit S.G.G. (?) ou S[ANC]T[VS] EGID[IVS] pour des objets
du Calvados160. Pour un artefact de Whithorn (ig. 14, no 4), une
inscription, presque illisible, est reportée sur les côtés : B[E]
ATI à gauche et peut-être [EG]IDII à droite. Les lettres MIO
A – peut-être les restes d’une inscription plus longue – dont
la signiication reste obscure s’observent sur une enseigne de
Winchester (ig. 14, no 3).
Toutes les enseignes à l’effigie de Saint-Gilles sont en
matériau blanc. Des analyses de composition font apparaître
des taux d’étain de 56 ou 66 % et de plomb de 43161 ou 33 %162.
À chacune des vingt-cinq enseignes connues par une photo ou
un dessin correspond un moule distinct, puisqu’il n’a pas pu
être répertorié deux objets identiques. Elles sont d’une manière
générale de dimensions semblables et leur iconographie montre
de nombreuses similitudes qui établissent leur appartenance à
un même sanctuaire, très probablement celui de Saint-Gilles
dans le Gard. En se fondant sur les datations stylistiques de
Kurt Köster, les enseignes du groupe 2 seraient du xiiie siècle et
celles des groupes 3 et 4 des xiiie et xive siècles, les exemplaires
no 11 et 12 de la igure 15 étant à situer plus précisément dans
le xive siècle163.
108
154. Köster 1983, p. 99-107.
155. Santiago de Compostela 1985, p. 316-318 ; Beuningen et Koldeweij
1993, p. 161 ; Bruna 2003, p. 75 ; Vallet 2008, p. 240 ; Spencer 2010,
p. 237-239.
156. Chiara Guarnieri attribue une enseigne trouvée à Argenta, dans la
province de Ferrare (Italie), au sanctuaire de Saint-Gilles (Guarnieri 1998,
p. 268-269). Cette identiication est reprise par Denis Bruna (Bruna 2003,
p. 75, no 34). Pourtant, la iguration est assez éloignée des enseignes de saint
Gilles provenant du corpus et la légende qui fait le tour de l’enseigne, même si
elle est diicilement compréhensible, ne mentionne pas le saint.
157. Quatre autres enseignes se trouvaient dans la même inhumation : une
enseigne de Notre-Dame-du-Puy, une seconde de Notre-Dame de Vauvert, un
saint Michel terrassant le dragon et une enseigne d’un sanctuaire indéterminé
(Bruna 2003, p. 75, note 1).
158. La qualité des igures en rend la perception diicile voire impossible.
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
Éd
de pèlerinage connues. Aux dix exemplaires inventoriés par
Kurt Köster en 1983154, il convient d’ajouter vingt et un autres
individus signalés ou publiés depuis155. Trois autres enseignes
portant la représentation de saint Gilles ont été fabriquées,
d’après Kurt Köster, pour d’autres lieux de culte du saint.
Cependant, l’une d’elles semble, à l’aune des données actuelles,
pouvoir être attribuée au sanctuaire gardois (ig. 13, no 2) 156.
La totalité du mobilier a été classée en quatre groupes, à
l’exception d’une enseigne mise au jour dans une sépulture
des xiiie-xive siècles à Saint-Émilion (Gironde) et pour laquelle
il n’a pu être trouvé ni description ni iconographie157.
Toutes les enseignes sont construites sur un modèle similaire
soumis à quelques variations de détail : l’ermite, les yeux grands
ouverts, tonsuré, barbu, prend place dans une plaque rectangulaire terminée par une excroissance accueillant la tête auréolée.
Il est vêtu d’une dalmatique par-dessus une aube. L’auréole est
généralement constituée d’un grènetis. Pour les enseignes du
premier type (ig. 13, no 1 à 3), l’auréole, formée d’une bande de
petits traits limités par deux bandeaux, est peu saillante. Aucun
bras n’est visible, mais la main gauche tient une crosse disposée
en travers du corps. Sur un premier sous-type (ig. 13, no 1
et 2), le corps prend la forme d’une ogive. Pour un deuxième
sous-type (ig. 13, no 3), l’enseigne prend la forme de l’abbé. Il
est ici mitré et nimbé. L’extrémité de la crosse devait se situer
à gauche de la tête de saint Gilles, comme le laisse supposer
l’amorce d’une petite languette, probablement un renfort.
Comme de nombreuses enseignes des types suivants, la dalmatique comporte des plis en V. Pour les enseignes des groupes
2 à 4 (ig. 13, no 4 à 6, ig. 14 et 15), les mains sont clairement
séparées du corps : Gilles tient de la main gauche une crosse et
fait de la main droite le signe de la bénédiction. Un manipule à
franges terminé par des pompons pend sur l’avant-bras gauche
pour les types 2 et 4 (ig. 13, no 4 à 6 ; ig. 15). Les groupes 3 et
4 (ig. 14 et 15) igurent deux attributs de la vie érémitique de
saint Gilles : une biche la tête levée, à quatre pattes (ig. 14, no 1
et 2 ; ig. 15, no 11 et 12) ou au corps dressé et les pattes avant
appuyées sur le saint ; une ou deux plantes (ig. 15, no 11 et 12)
– évoquant peut-être la végétation humide de la grotte – dont
les branches ont des extrémités perlées. Il peut s’y ajouter une
petite tige, sommée de trois points, plantée dans le creux du
coude gauche (ig. 14, no 1) ou droit (ig. 15, no 1 et 2), ou au
revers du coude gauche (ig. 15, no 5 à 7, 13)158, symbolisant la
lèche ayant blessé saint Gilles. Sur un objet parisien, la tête est
représentée sous un arc brisé (ig. 14, no 1). Il possède au revers
un quadrillage en relief. Un enseigne du site de Bull Warf à
2.7. LES SANCTUAIRES HORS DE PROVENCE
2.7.1. Les sanctuaires français et italiens
Les enseignes de pèlerinage métalliques mises au jour en
Provence et ne concernant pas les sanctuaires provençaux
sont moins nombreuses. Seuls cinq exemplaires ont été
identiiés, mais trois d’entre eux viennent de lieux de culte
assez proches comme le sanctuaire marial de Vauvert (Gard),
un peu à l’ouest de Saint-Gilles, qui acquiert sa renommée
159. Santiago de Compostela 1985, p. 317, no 272 ; Spencer 2010, p. 238,
ig. 246d.
160. Vivre au Moyen Âge 2002, notice 279.
161. Analyse par XRF sur un objet de Bull Warf (Spencer 2010, p. 238).
162. Analyse par XRF sur un objet de hames Exchange (Spencer 2010, p. 238)
et par radioluorescence (Santiago de Compostela 1985, p. 18, no 274b)
163. Köster 1983, p. 99-106, 108-113.
praTique du pèlerinage en
prOvence
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
C
N
R
S
Éd
iti
on
s
la
dès la in du xiie siècle164. Une enseigne en forme de navette
avec originellement quatre œillets (ig. 16, no 1), a été mise au
jour à Avignon, rue Guillaume Puy, dans un remblai supericiel remanié où abondaient les céramiques du xive siècle.
Une inscription en caractères gothiques court en bordure :
+ S[IGILLUM ou IGNUM] BEATE MARIE DE VALLE
VIRIDI. Au centre de la navette, la Vierge couronnée, assise
sur un trône hachuré, tient un sceptre leurdelisé dans sa main
droite et porte l’Enfant auréolé sur son bras gauche. L’enseigne
164. Bruna 2003, p. 76.
est datée stylistiquement du xive siècle par Dominique Carru
et Sylvain Gagnière165.
Des contextes provençaux ont livré deux enseignes issues du
même moule, en provenance de Saint-Pierre de Lézan (Gard),
lieu de pèlerinage qui n’a laissé que peu de traces historiques166.
Le premier objet a été découvert en 1909 dans le Rhône à Arles
(ig. 16, no 2)167, le second dans des niveaux remaniés riches en
céramique du xive siècle, rue Guillaume Puy à Avignon (ig. 16,
165. Bruna 2003, p. 92.
166. Ibid., p. 79.
167. Carru et Gagnière 1992, p. 78 ; Bruna 2003, p. 76.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
©
Fig. 14 Enseignes du sanctuaire de Saint-Gilles du type 3 ; no 1a et 1b, dessin : A. Forgeais, cl. musée de Cluny (FORGEAIS 1863, KÖSTER 1983, Base
Joconde) ; no 2, dessin : F.-E. Desnoyers (DESNOYERS 1873) ; no 3, dessin : B. Spencer (SPENCER 2010²) ; no 4, dessin : A. Nicholson (NICHOLSON 1998).
109
110
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
Éd
iti
on
s
Olivier ThuaudeT
Fig. 15 Enseignes du sanctuaire de Saint-Gilles du type 4 ; no 1, cl. L. Berton (BERTON 2011) ; no 2, cl. auteur inconnu (Vivre au Moyen Âge
2002) ; no 3, cl. L. Berton (BERTON 2011) ; no 4, cl. Materia viva (VALLET 2008) ; no 5 et 6, cl. auteur inconnu (KÖSTER 1983) ; no 7, cl. H.J.E Beuningen et
A.M. Koldeweij (BEUNINGEN et al. 2000) ; no 8, cl. H.J.E Beuningen et A.M. Koldeweij (BEUNINGEN et KOLDEWEIJ 1993) ; no 9 et 10, cl. Schloßmuseum
de Berlin (KÖSTER 1983) ; no 11, cl. Schleswig-Holteinisches museum (KÖSTER 1983) ; no 12, cl. London museum (SPENCER 2010²) ; no 13, cl. London
Museum (SPENCER 2010²) ; no 14, cl. London Museum (SPENCER 2010²) ; no 15, cl. London Museum (SPENCER 2010²)²).
praTique du pèlerinage en
prOvence
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
critères stylistiques, Dominique Carru et Sylvain Gagnière
datent l’enseigne de la in du xiiie siècle170.
Trois enseignes ont été achetées au sanctuaire de Notre-Dame
du Puy (Haute-Loire). Un premier exemplaire (ig. 16, no 4),
ajouré et en forme de rectangle avec le tiers supérieur arrondi,
a été découvert sur l’épave Lardier, datée du xviie siècle par la
céramique, peut-être même de la seconde moitié de ce siècle171.
La légende inscrite en bordure des deux tiers supérieurs permet
son authentiication : N[OST]RE D[A]ME DV PVY 172. De
petites leurs séparent les mots. Au centre, la Vierge couronnée
est igurée assise sur un trône sous un baldaquin gothique,
l’Enfant Jésus également couronné apparaît devant elle. Le
trône, très travaillé est lanqué de deux anges porteurs de
lambeaux. D’après l’abbé Gabriel Massebeuf, cet objet est à
rapprocher d’une gravure igurant la statue de la Vierge du
Puy telle qu’elle fut modiiée à la suite d’un don de Louis XI en
1476173 : deux anges porteurs de cierges lanquent la Vierge à
l’Enfant sous un dais. L’auteur date de façon hardie l’enseigne
de 1502 et le naufrage du bateau sur lequel voyageait le pèlerin
la portant, du mois d’avril de la même année174. La présence de
cet objet, probablement datable du xvie siècle, sur une épave
dont le mobilier date de la seconde moitié du xviie siècle,
s’explique peut-être par le fait que l’objet a été collectionné,
ou était cousu sur un livre.
Déjà évoqué précédemment, le livre d’heures d’Antoine
Bourdin, exécuté entre 1485 et 1490, a conservé la trace de
cinq enseignes en tôle et de deux véroniques peintes sur le
dernier feuillet (ig. 5). Outre la plaquette circulaire de SaintMaximin, son propriétaire a disposé une enseigne inconnue
qui était maintenue par huit points de couture, deux enseignes
quadrangulaires appartenant au pèlerinage de Notre-Damedu-Puy et une dernière enseigne presque carrée, qui était ixée
par huit points, contenant une scène désormais illisible. La plus
grande des deux enseignes de la Vierge noire du Puy montre
la Vierge à l’Enfant dans la partie supérieure, encadrée d’une
légende indéchifrable. Le registre médian pourrait représenter
le Christ entouré de personnages sous arcades igurant les
apôtres. Un chef reliquaire entouré d’anges semble apparaître
dans le registre inférieur. La plus petite enseigne est occupée par
la igure de Marie avec l’Enfant, sous un dais caractéristique,
encadrée dans les écoinçons supérieurs de deux bustes d’anges,
et en bas de deux anges agenouillés tenant un cierge. Ces deux
pièces ainsi que celle à l’image de Marie-Madeleine partageaient
quelques-uns des dix-huit points de couture relevés dans cette
zone. La seule des deux véroniques conservées, perforée de
huit trous, igure la Sainte Face, avec de sombres carnations,
nimbée de rouge175.
C
N
Fig. 16 Enseignes de sanctuaires hors de Provence ; no 1 et 2, rue
Guillaume Puy, Avignon, Vaucluse, dessin : D. Carru (CARRU et
GAGNIÈRE 1992) ; no 3, Rhône, Arles, Bouches-du-Rhône, cl. F. Benoît
(BENOÎT 1927) ; no 4, Épave Lardier, dessin : G. Massebeuf (MASSEBEUF
1987) ; no 5, Ploungue, Fox-Amphoux, Var, Service archéologique du
Var, dessin : O. Thuaudet.
©
no 3)168. Tous deux sont rectangulaires, au sommet légèrement
arrondi et comportaient quatre œillets. À l’intérieur d’un
encadrement contenant la légende S[IGNUM] BEATI PETRI
DE LESANO169, saint Pierre, nimbé, les cheveux rendus par un
grènetis, portant une robe à plis verticaux, est iguré debout
et de face, tenant dans la main gauche deux clefs et bénissant
de la main droite un personnage agenouillé, de proil, portant
une coife et les mains jointes en prière. En se fondant sur des
168. Benoît 1927, p. 711-113 ; Carru et Gagnière 1992, p. 79 ; Bruna 2003,
p. 6.
169. L’objet étudié par Fernand Benoît était en mauvais état, ce qui l’a conduit
à une mauvaise lecture – SANO au lieu de LESANO – et à une erreur d’attribution (Benoît 1927, p. 111-113).
170. Carru et Gagnière 1992, p. 92.
171. Pollino et Viallant 1987, p. 98.
172. La forme du M est assez particulière.
173. Massebeuf 1987.
174. Ses arguments sont l’écoulement nécessaire des stocks d’enseignes des
modèles antérieurs à 1476, la tenue de jubilés en 1502 et 1513, une datation de
1513 attribuée d’autorité à la gravure dont l’inscription est droite et non pas
courbe comme sur l’enseigne, des diicultés climatiques lors du jubilé de 1513,
des lottes de guerre participant à la conquête du royaume de Naples de 1501 à
1503. Cette suite d’arguments sans valeur n’a pas grand sens.
175. Bruna 1998, p. 43. La totalité de la lecture de ce document est l’œuvre
de Denis Bruna.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
R
S
Éd
iti
on
s
la
111
iti
on
s
Olivier ThuaudeT
Éd
Fig. 18 Description anatomique d’une coquille Saint-Jacques du site
de Régina à Avignon, service archéologique du Vaucluse, dessin :
D. Carru.
S
présente une légère dépression cruciforme au revers qui
permettait sans doute d’économiser un peu de métal.
112
D’Italie provient une enseigne cruciforme à bordure de
grènetis avec initialement huit œillets. Retrouvée en prospection
sur le site de Ploungue à Fox-Amphoux (Var) (ig. 16, no 5), elle
représente le Christ vêtu d’une longue tunique plissée couvrant
ses bras jusqu’aux poignets et descendant jusqu’aux chevilles.
Un point rond symbolisant la tête d’un clou se perçoit au centre
des deux mains. L’inscription LTI s’inscrit dans un cadre de
grènetis, au-dessus de la tête du Sauveur. Elle rappelle une
inscription visible sur certaines enseignes en provenance du
sanctuaire de Volto Santo de Lucques découvertes à Londres :
S[IGNUM SANCTI] VVLTI 176 LVCENSIS. Le Christ y est
également vêtu d’un vêtement long plissé177. L’enseigne varoise
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
Fig. 17 Représentations de coquilles Saint-Jacques dans la peinture
du sud-est de la France
no 1 : Enguerrand Quarton, La Vierge et l’Enfant entre saint Jacques
et un saint évêque, milieu XVe siècle, Avignon, musée du Petit Palais,
cl. O. Thuaudet.
no 2 : Attribué à Antoine Ronzen ou à Antoine Bréa, Saint Roc, Retable
du Maître-autel, XVIe siècle, Villars-sur-Var, Église Saint-Jean-Baptiste,
Alpes-Maritimes, cl. O. Thuaudet.
no 3 : Andrea de Cella, peintures murales (détail d’un pèlerin) de la
chapelle Saint-Bernard-et-Saint-Sébastien de Roure, 1510, AlpesMaritimes, cl. O. Thuaudet.
176. À transformer en Volto.
177. Spencer 2010, p. 254-255, no 254f à h.
2.7.2 Saint-Jacques de Compostelle
Plusieurs souvenirs de pèlerinage se rapportant au sanctuaire
de Saint-Jacques en Gallice ont été retrouvés en Provence. La
plupart d’entre eux sont des valves de coquilles. Elles étaient
cousues sur le chapeau (ig. 17), la besace ou le manteau. Elles
sont, avec le bourdon ou bâton de marche – souvent igurés
sous forme de petites enseignes miniatures croisées sur le
chapeau (ig. 17) –, l’un des attributs traditionnels des pèlerins
de Saint-Jacques de Compostelle. Les coquilles Saint-Jacques,
enseignes du sanctuaire de Galice, sont de l’espèce Pecten
maximus qui vit de la mer du Nord à Gibraltar, mais aussi
aux Açores et aux Canaries. La Pecten Jacobeus, se rencontre
en Méditerranée178. Par erreur, Carl von Linné a attribué cette
dénomination à ce coquillage, ce qui engendre une confusion
dans les esprits. Les deux espèces se distinguent principalement par le proil des côtes, arrondies pour la première, plus
anguleuses et à la partie supérieure aplatie pour la seconde
(ig. 14, no 1). De loin la plus fréquente en contexte archéologique, notamment dans les inhumations, la vente de la Pecten
maximus a suscité bien des convoitises par l’aspect fructueux de
son commerce. L’archevêque de Compostelle reçoit en conséquence des papes Alexandre III, dans le troisième quart du
xiie siècle, et Grégoire IX, dans le second quart du xiiie siècle,
le pouvoir d’excommunier ceux qui vendraient de tels insignes
178. Gruet et Bonnissent 2002, p. 115 ; Vallet 2008, p. 242-244.
praTique du pèlerinage en
prOvence
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
iti
on
s
la
©
C
N
R
S
hors de la ville179, sans grand succès certainement. L’espèce
méditerranéenne Pecten jacobeus, fréquente dans le sud-est de
la France, a pu être distribuée par un sanctuaire provençal, être
utilisée comme simulacre, ou vendue comme une enseigne du
pèlerinage espagnol par des marchands indélicats. D’autres
coquillages (ig. 19) comme l’Acanthocardia tuberculata ou le
Rudicardium tuberculatum ont aussi pu avoir ce rôle. Faut-il
mettre en cause la bonne foi de l’acheteur ? En 1476, le roi René
acquiert une valve de coquille d’une espèce indéterminée et
la conie à un homme de Valence (Drôme) qui la perce pour
permettre sa ixation (ig. 18). Cet épisode semble indiquer
qu’il ne faut pas uniquement voir dans le port de coquilles
Saint-Jacques, quelle que soit l’espèce, une enseigne attestant
d’un pèlerinage, mais également un objet protecteur, un
témoin de la vivacité de la foi. La célébrité du sanctuaire de
Galice, mais plus surement de saint Jacques et de son insigne,
ont assurément pu inciter certains à demander à être inhumé
avec une coquille. Qu’importe alors qu’ils aient cru ou non
que sa provenance fût de Compostelle ! L’objet ne serait plus
simplement acquis pour accréditer un pèlerinage et son rôle
serait plus celui d’un talisman propre à éloigner les menaces,
une sorte de passeport pour l’au-delà. En efet, une personne
peut-elle espérer tromper sa famille, ses voisins, ses relations de
travail, en arborant l’enseigne d’un pèlerinage non efectué180 ?
En outre, un défunt peut-il espérer tromper Dieu ? Il n’est pas
certain que les coquilles igurées ici ou là sur des maisons, des
églises, des croix de chemin ou sur des dalles funéraires garantissent toujours l’existence d’une voie usuellement fréquentée
par les pèlerins de Saint-Jacques, ou témoignent de la réali-
179. Cohen 1976, p. 197.
180. Bien évidemment, il est toujours possible qu’une personne entame le
voyage, s’arrête en cours de route, achète une coquille Saint-Jacques puis
rebrousse chemin en ne revenant pas trop vite pour éviter les soupçons.
sation du pèlerinage. D’après Kurt Köster, la coquille ne caractérise assez rapidement « plus seulement l’apôtre Jacques ni le
seul pèlerin de Saint-Jacques, mais bien tous les saints pèlerins
et, de manière générale, tous les pèlerins »181. Dans certains cas,
il est probable que la fonction protectrice évoquée soit l’explication plausible de telles igurations : protection des voyageurs
dans leur parcours terrestre et vers l’au-delà. Il est même
possible que ces coquilles aient été spécialement acquises pour
être inhumées avec les défunts.
La plupart du temps, comme pour l’ensemble des coquilles
du catalogue, il est retrouvé des valves droites, convexes. Les
valves gauches, plates, sont moins appréciées. Aucune n’a
actuellement été retrouvée en Provence. L’absence de traces
d’animaux marins sur les coquilles indique qu’elles étaient
presque toujours pêchées, celles récupérées sur le rivage sont
donc rares182. Les perforations sont usuellement au nombre de
deux et disposées sur l’umbo, plus solide que les oreilles. Dans
le corpus, le lot le plus important de coquilles Saint-Jacques
vient des fouilles réalisées dans la cathédrale Notre-Damedu-Bourg à Digne : dix-huit exemplaires sont connus. Elles
possèdent deux perforations circulaires, disposées symétriquement sur l’umbo, de part et d’autre de l’axe dorso-ventral,
réalisées depuis l’intérieur de la coquille grâce à un poinçon
circulaire. D’après une méthode de calcul biométrique proposée
par Yves Gruet et Daniel Bonnissent183, la longueur des objets
dignois atteint, après taille, entre 50 et 85 % de la longueur
originelle sans qu’une évolution chronologique puisse être mise
en évidence. L’objectif était d’enlever les parties les plus ines
de la coquille pour que l’objet soit plus solide. Ces caractéristiques ont pu être observées sur quelques coquilles d’autres
181. Köster 1985, p. 86.
182. Vallet 2008, p. 245.
183. Gruet et Bonissent 2002.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
Éd
Fig. 19 Coquillages découverts dans des sépultures médiévales dans la Cathédrale Notre-Dame du Bourg à Digne ; no 1 : Valve de Rudicardium
tuberculatum, musée Gassendi, cl. O. Thuaudet ; no 2 : Coquille de patelle, musée Gassendi, cl. P. Groscaux.
113
on
iti
Fig. 20 Bourdons miniatures en os ;
no 1 Jardin ouest du Petit Palais, Avignon, musée du Petit Palais,
dessin : O. Thuaudet ;
no 2, Impasse de l’Oratoire, Avignon, musée du Petit Palais, dessin :
O. Thuaudet.
chaque oreille ; la seconde, fragmentaire, aiche des traces de
taille et ne comprend qu’une unique perforation sur l’umbo.
La troisième est retaillée et possède deux perforations sur
l’umbo190.
Un ultime spécimen a été découvert dans le cloître de SaintGilles, sous le coude droit d’un homme adulte inhumé dans un
cofre en bois entre la seconde moitié du xiiie siècle et le milieu
du xviie siècle191.
À l’image du corpus provençal, les coquilles Saint-Jacques
sont le plus souvent découvertes en un, parfois deux exemplaires,
dans les sépultures d’Europe occidentale 192. Sophie Vallet
enregistre 129 inhumations avec une seule coquille pour l’Aquitaine et la nouvelle région Occitanie, vingt avec deux coquilles,
treize avec trois, quatre, cinq, six ou onze coquilles193. Elle ne
rencontre qu’un seul spécimen de Pecten Jacobeus, répertorié
sur le site de Saint-Côme-et-Damien à Montpellier194. Dans le
corpus provençal, la majeure partie des coquilles sont découvertes isolées. À Digne, un caveau et un ossuaire en ont chacun
114
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
Éd
sites provençaux. Sur les dix-huit exemplaires de coquille SaintJacques de Digne, toutes sont de l’espèce Pecten Jacobeus 184.
Quatorze spécimens proviennent de sépultures individuelles
ou de caveaux de la in du Moyen Âge et de l’époque moderne.
La localisation sur le squelette n’est connue que dans un cas :
un spécimen sous le bassin (xiie-xiiie siècles). Deux coquillages d’une autre espèce proviennent également de sépultures :
une valve de Rudicardium tuberculatum (xive-xvie siècle)
– retaillée ? – avec une seule perforation sur l’umbo, retrouvée
« sous le corps » d’un défunt (ig. 19, no 1), et une patelle avec
un trou en bordure (xviie-xviiie siècles), récupérée à hauteur
du genou gauche d’un squelette d’homme adulte âgé de plus
de 50 ans (ig. 19, no 2).
Dans le jardin situé à l’est de l’ancien presbytère de
Saint-Maximin, une sépulture d’adulte des xiiie-xive siècles
conservait trois coquilles Saint-Jacques disposées sur le devant
du corps, à hauteur des épaules et en haut du torse 185. Elles
étaient peut-être cousues au vêtement, simplement posées sur
le corps ou portées en collier. Les objets n’ont pu être retrouvés
et la photographie du rapport de fouille ne permet pas une
identiication de l’espèce. L’une d’elles au moins comportait
deux perforations sur l’umbo. Sur la même commune, à Cadrix,
dans une couche de destruction du xvie siècle, une coquille
de type Pecten Jacobeus a été répertoriée186. Non loin de là, à
Hyères, une tombe de l’église Saint-Pierre de l’Almanarre, datée
entre le xiie et le xive siècle, a livré deux coquilles dont l’espèce
n’est pas déterminée187. À la Gayole, sur la commune de La
Celle, toujours dans le Var, une coquille de type Pecten percée
de deux trous a été découverte dans des terres remaniées, datées
entre le début du xiie siècle et la seconde moitié du xiiie siècle188.
Des coquilles Saint-Jacques ont aussi été mises au jour dans
le Vaucluse. Un exemplaire identiié, grâce à l’intervention
du naturaliste H. Nicolas, comme de type Pecten Jacobeus,
provient d’une sépulture en cofrage, présente sur le plateau
de Cancabeau à Châteauneuf-de-Gadagne. Elle contenait
trois corps et un petit récipient en verre. Elle datait, d’après le
mobilier et le type de sépulture retrouvés, des xiie-xiiie siècles189.
Un deuxième spécimen retaillé avec deux perforations sur
l’umbo fut trouvé place de la Principale à Avignon. Un autre
exemplaire, découvert dans l’église Notre-Dame-la-Principale
à Avignon, de datation non renseignée, est de l’espèce Pecten
Jacobeus. Trois autres coquilles avignonnaises de la même
espèce proviennent pour l’une d’un contexte inconnu du site
de Régina, pour la deuxième d’un contexte de la seconde moitié
du xive siècle de l’Impasse de l’Oratoire, pour la dernière, hors
stratigraphie, du site de la rue Banasterie. La première, entière,
mais qui n’a pu être observée, présente une perforation sur
s
Olivier ThuaudeT
184. Identiication par Philippe Columeau (CCJ, UMR 7299, Université
d'Aix-Marseille, CNRS). Une seule coquille sans aucune perforation et non
retaillée, de type Flexopecten Glaber a été mise au jour dans une tombe datée
par 14C avec un intervalle de deux sigmas entre 592 et 759. Une coquille de
cette espèce provient d’un remblai daté de la deuxième moitié du xiie siècle ou
du début du xiiie siècle dans l’église Saint-Laurent de Grenoble (Colardelle
1999, p. 362 ; Colardelle 2008, p. 298).
185. Guyon 1996, p. 19-20.
186. Objet inédit.
187. Pasqualini et al. 1991, p. 50.
188. Objet inédit.
189. Sagnier 1987, p. 188 ; Gagnière et Granier 1971, p. 173, 184, 186.
190. L’ensemble de ces artefacts mis au jour à Avignon est inédit.
191. Objet inédit.
192. Kurt Köster (1983 et 1985) puis Denis Bruna (1991) ont établi des cartes
de répartition des coquilles Saint-Jacques. Elles sont désormais largement
incomplètes. L’établissement d’une telle cartographie ne peut mettre en
évidence les routes du pèlerinage, mais seulement donner une idée de
l’étendue de la renommée du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle et
du choix de l’espèce de Pecten. L’échelle géographique et temporelle à couvrir
est si importante qu’une telle démarche ne peut être l’œuvre d’une seule
personne, mais le résultat conjugué du travail de chercheurs de régions et de
pays variés pour combler les vides liés à la méconnaissance de la bibliographie
régionale. Par exemple, dans les cartes publiées par les auteurs susmentionnés,
l’Espagne, à l’exception de sa partie septentrionale apparaît désespérément
vide, ce qui est plus que surprenant. L’Italie s’aiche également vierge de toute
attestation. Il y a quelques années, cependant, est paru sous la direction de
Francesca Bulgarelli et al. l’ouvrage Archeologia dei pellegrinaggi in Liguria
(2001), qui présente plusieurs dizaines de spécimens de Pecten Jacobeus et de
Pecten Maximus, provenant de contextes datés entre le xiiie et le xvie siècle.
193. Vallet 2008, ig. 2.
194. Ibid., p. 242.
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
publication202. L’emplacement de leur découverte sur les corps
est rarement précisé : signalons six bourdonnets relevés dans
une inhumation du xviie siècle sur le site Raynaldy-Jacobins à
Rodez (Aveyron) ; ils étaient disposés, avec des coquilles SaintJacques, à hauteur des épaules et du cou du squelette203. Tous
ces objets, lorsqu’ils sont complets, possèdent une excroissance
entaillée de gorges à leur extrémité supérieure et deux autres
renlements rainurés encadrés de disques le long de la tige. Leur
extrémité inférieure est parfois pourvue d’un petit ressaut qui
rappelle certainement la ferrure métallique des bâtons. Leur
datation, sur la foi des sources iconographiques, est à situer
entre le xve et le xviiie siècle, voire le début du xixe siècle
d’après Isabelle Rodet-Belarbi 204. Les données archéologiques
rassemblées n’en attestent pour le moment que pour les xvie
et xviie siècles.
2.7.3. Les enseignes non identifiées
Les ultimes pièces étudiées sont des enseignes ou des souvenirs
religieux dont le sanctuaire d’origine est indéterminé. C’est le
cas de deux objets en matériau blanc représentant un avant-bras.
Ils font probablement référence à un bras reliquaire. Le premier
(ig. 21, no 1), découvert au castrum Saint-Jean de Rougiers,
dans un niveau daté entre 1370/1375 et 1415/1420, est orné de
trois bandes de grènetis et de petites leurs à quatre pétales205.
Une dernière bande de grènetis, à l’emplacement des premières
phalanges, pourrait symboliser des bagues à chaton. Des
excroissances de part et d’autre du bras marquent probablement
la position de deux œillets de ixation disparus. Le second
exemplaire (ig. 21, no 2), provenant d’un niveau du début du
xvie siècle du château des Baux-de-Provence, est habillé d’une
large manche plissée, décorée par une bande de grènetis côté
coude206. L’auriculaire et l’annulaire sont repliés pour former le
signe de la bénédiction. Des œillets de ixation sont situés aux
extrémités des manches, côté poignet. Les deux artefacts ont
un revers partiellement concave, pour économiser du métal.
Une enseigne similaire au spécimen des Baux-de-Provence a
été découverte aux Pays-Bas. Elle est datée stylistiquement de
la seconde moitié du xive siècle207.
La iguration d’un saint personnage masculin n’a pu être
rattachée à un sanctuaire. L’enseigne (ig. 21, no 3), abîmée,
représente le buste d’un homme barbu, la tête nimbée. Il tient
un livre de la main gauche. Le lieu de découverte de cet objet
– le Castelet à Fontvieille ? – est incertain. Un trou dans la partie
supérieure a servi à la ixation. Philippe Ferrando propose d’y
voir une enseigne de l’abbaye de Montmajour à l’eigie de saint
Antoine208. Peut-être est-ce une enseigne de Saint-Gilles ?
195. Bruna 1991, p. 184.
196. Köster 1985, p. 88.
197. Bruna 1991, p. 184-186 ; Bruna 2003, p. 108.
198. Se reporter à Jacomet 1990.
199. Doctorante Aix Marseille Université, CNRS, LA3M (UMR 7298).
200. Rodet-Belarbi 2013, p. 49.
201. Köster 1985, p. 87.
202. En Alsace, par exemple, trois individus fragmentaires, dont deux datés du
xvie siècle et de la in du xvie siècle, ont été mis au jour à Ramstein et à Ortenbourg (Bas-Rhin), et interprétés comme des éléments de rouet (Motteau
[dir.] 1991, no 239 à 241).
203. Rodet-Belarbi 2013, p. 88.
204. Ibid., p. 48.
205. Démians d’Archimbaud 1980a et b.
206. Objet inédit.
207. Beuningen et al. 2000, no 1566.
208. Ferrando 2001b, p. 37.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
©
C
N
R
S
Éd
deux, mais la présence avérée de plusieurs individus dans ces
deux espaces ne permet pas d’airmer qu’elles appartenaient
au même défunt. Une unique sépulture, datée entre la in du
xiie siècle et le début du xiiie siècle, contenait deux exemplaires,
une autre, antérieure à 1335, en comprenait trois. D’après Denis
Bruna, les coquilles apparaissent en plus grand nombre dans
les sépultures dès la in du xive siècle195 ; pour Kurt Köster, c’est
à partir de la in du xvie siècle que leur quantité, tout comme
leur taille, s’accroissent196. Denis Bruna ne perçoit pas d’emplacement caractéristique d’une époque, pour les coquilles, sur les
squelettes, même si, du xie au xiiie siècle, elles sont, dans la
plupart des cas, situées à hauteur du bassin, mais cette disposition perdure ultérieurement. Il relève que, dans l’iconographie
des xiie et xiiie siècles, l’enseigne igure toujours sur la besace.
Au xive siècle, la panetière est encore le support majoritaire,
mais un ou deux spécimens peuvent être placés sur une autre
partie du costume. Dans la seconde moitié du xive siècle, le
chapeau à large bord fait son apparition et devient le plus
souvent, porteur d’insignes (ig. 17). Le manteau reste peu orné.
À la in du xvie siècle, le mantelet, un large col qui s’attache
au-dessus de la pèlerine, se révèle un emplacement privilégié197.
Les sculptures et peintures igurant des saints pèlerins et
des pèlerins les représentent toujours avec un bâton de marche
en bois, le bourdon, qui à l’occasion, permet de se défendre.
Celui-ci peut être travaillé de fort belle manière, mais en
contexte archéologique, il n’en est retrouvé que l’extrémité ferrée
lorsqu’il en comportait une. Le bourdon ou bâton de marche
est, avec la coquille, un objet caractéristique du pèlerin de SaintJacques et participe de l’identiication198. Il existe des reproductions de bourdons à échelle réduite, en os, qui se portaient sur
le manteau ou sur le chapeau, isolément ou beaucoup plus
couramment croisées par paires (ig. 17, no 3), posées de part
et d’autre d’une coquille Saint-Jacques, ou partiellement recouvertes par celle-ci. Ces bourdons semblent donc être spéciiques
du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle et apparaissent
toujours accompagnés de coquilles, ou dans le cadre d’un
costume où se retrouvent des coquilles. Les deux bourdonnets
avignonnais présentés ici (ig. 20), de section circulaire, ont été
identiiés par Marie-Astrid Chazottes 199. Ils ont été fabriqués
par tournage. Le premier (ig. 20, no 1) a été découvert hors
stratigraphie sur le site de l’Impasse de l’Oratoire. Le second
(fig. 20, no 2) provient d’un contexte remanié à l’époque
contemporaine dans le jardin ouest du Petit Palais à Avignon.
Ces objets apparaissent relativement tardivement que ce soit
dans l’iconographie – à partir du xve siècle – ou en contexte
archéologique – à partir du xvie siècle actuellement 200. Leur
fabrication s’est faite à grande échelle durant l’époque moderne :
un document de 1604 fait ainsi allusion à la confection à SaintJacques en Galice de 7 000 pièces en os tourné201. Ces objets ne
sont pas toujours correctement interprétés dans la documentation archéologique et il ne serait donc pas étonnant qu’un
certain nombre d’exemplaires aient échappé de ce fait à la
s
prOvence
on
praTique du pèlerinage en
iti
la
115
Éd
iti
on
s
Olivier ThuaudeT
N
R
S
Fig. 21 Enseignes de sanctuaires inconnus ;
no 1 : Castrum Saint-Jean, Rougiers, Var, Dépôt archéologique de La Ripelle, dessin : L. Vallauri (DÉMIANS D’ARCHIMBAUD 1980a et b) ;
no 2 : Château des Baux, Les Baux-de-Provence, Bouches-du-Rhône, Maison de l’Archéologie des Baux-de-Provence, dessin : O. Thuaudet ;
no 3 : Le Castelet ?, Fontvieille ?, Bouches-du-Rhône, dessin : P. Ferrando (FERRANDO 2001b) ;
no 4 : 65, place de Cabassole, Cavaillon, Vaucluse, dessin : O. Thuaudet ;
no 5 : La Sorgue, Avignon, Vaucluse, service archéologique du Vaucluse, dessin : D. Carru ;
no 6 : Cathédrale Notre-Dame du Bourg, Digne, Alpes-de-Haute-Provence, cl. P. Groscaux ;
no 7 : Rue Racine, Avignon, service archéologique du Vaucluse, cl. O. Thuaudet.
116
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
Un fragment de personnage (ig. 21, no 4) a été découvert
hors stratigraphie, 65 place de Cabassole, à Cavaillon209. La tête
et les bras manquent, le corps est drapé dans un long vêtement
aux plis lourds. Sur le devant, un pan retombe et découvre un
vêtement de dessous couvert de hachures en relief positif, au
col en V, ceinturé sous la poitrine. La disposition de la ceinture
est typique de la mode féminine et se rencontre couramment
au xve siècle.
Une enseigne emboutie (ig. 21, no 5), vraisemblablement en
tôle d’argent, fut découverte lors d’un curage de la Sorgue à
Avignon en 1851, près de l’église des Cordeliers. La Vierge pose
en majesté, couronnée, avec l’Enfant sur son bras gauche ; tous
deux sont nimbés et entourés de lammes radiantes limitées par
un cercle. Le cadre est formé de grènetis et de bandes circulaires
encadrant une légende en lettres gothiques anguleuses et
serrées que Denis Carru et Sylvain Gagnière proposent de lire
NO[S ?]TRE DAME DORBE(MIA ?)210. Les enseignes en tôle
209. Objet inédit.
210. Carru et Gagnière 1992, p. 82.
apparaissent dans la seconde moitié du xve siècle pour disparaître au cours du xvie siècle d’après Denis Bruna211.
Un autre morceau d’enseigne en tôle emboutie, mais cette
fois en alliage cuivreux (ig. 21, no 6), igure un ange aux ailes
déployées, la tête auréolée disposée dans un lobe du cadre
décoré de gros grènetis et cordons nus212. Il tient un phylactère
sur lequel se perçoivent des lettres diicilement lisibles : [MA]
RIE ? Cet objet devait être de très grandes dimensions. Il
provient d’un niveau de charnier des xviie-xviiie siècles de la
cathédrale Notre-Dame du Bourg à Digne.
Enin, un fragment de cruciix (ig. 21, no 7) retrouvé dans
un contexte daté par la céramique des années 1530-1540, rue
Racine à Avignon213, présente sur une face le Christ cruciié
portant le perizonium et, au revers, la Vierge vêtue d’une longue
tunique, portant l’Enfant sur son bras gauche. La ixation a dû
se faire au moyen d’une ouverture au bout du bras supérieur
211. Bruna 1998, p. 147.
212. Objet inédit.
213. Objet inédit.
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
disparu ainsi que l’indique un objet similaire, découvert à
Raversijde (Pays-Bas) et daté stylistiquement du xve siècle214.
2.8. LES AMPOULES DE PÈLERINAGE
214. Koldeweij 2006, p. 203, no 15.9.5.k.
215. Montagnes 1978, p. 109-115.
216. L’écu de France « ancien » comporte un semis de leur de lys alors que
celui de « France moderne » n’en possède que trois en l’honneur de la SainteTrinité. Charles V est à l’origine de cette modiication en 1376.
217. Montagnes 1978, p. 7.
218. Thuaudet et Chazottes 2014, ig. 247, no 10.
219. Carru et Gagnière 1992, p. 89.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
©
C
N
R
S
Éd
Les sites provençaux, et notamment ceux d’Avignon, ont livré
de nombreux exemplaires d’ampoules de pèlerinage. Toutes
ont été confectionnées par soudure de deux moitiés moulées
séparément. Les lèvres du col ont été pincées ain d’assurer leur
fermeture. Aucune des pièces étudiées n’a pu être attribuée à un
sanctuaire particulier, comme c’est souvent le cas. Cependant,
la fréquence des découvertes faites à Avignon est d’un intérêt
évident. Il peut être envisagé, même si cela ne peut être prouvé,
que des ampoules aient pu recueillir un peu d’eau d’un puits
fondé, d’après la légende, par saint Dominique et situé dans
l’enceinte du couvent des Prêcheurs. Ces eaux étaient réputées
guérir les ièvres215.
Les exemplaires les plus fréquemment retrouvés sont en
forme de gourde et présentent deux courtes anses de part
et d’autre du goulot. La plupart proviennent d’Avignon. Un
premier objet, aux anses graciles, recueilli en 1989 au cours
des terrassements, chemin Saint-Jean, au début de la route
de Montfavet (ig. 22, no 1), est orné, sur la face plate de la
panse, d’un blason palé dont les pals sont alternativement
nus et quadrillés. L’écu est encerclé d’une bande de chevrons,
superposés tête-bêche, limitée par deux listels. Au revers,
sur la face bombée, une rosace à huit pétales est entourée de
lobes. Un écu schématique à trois pals est visible sur le col.
Rue Carreterie (ig. 22, no 2), une ampoule trouvée dans un
contexte des années 1360-1380, conserve sur sa face plane, le
motif très dégradé d’un large écu entouré de chevrons. La face
bombée est couverte par une rosace à huit pétales au sein d’un
champ de losanges et de chevrons. Un quadrilobe est perceptible sur le col. Contrairement aux deux précédentes, l’ampoule
exhumée dans des niveaux de jardin des années 1340-1390 sur
le site d’un ancien garage, rue Régina (ig. 22, no 3), possède des
anses épaisses qui débordent largement. Ses parois sont très
massives mais l’ampoule comporte toujours une face plate et
une face bombée. Sur une des faces, un médaillon circulaire
contient une forme trapézoïdale dont le champ est décoré
de deux lignes droites et d’un segment bouleté. La quatrième
ampoule (ig. 22, no 4) accompagnait le premier spécimen
étudié, au chemin Saint-Jean à Avignon. Elle est proportionnellement plus allongée et n’est décorée que d’une simple leur
de lys. Les leurs de lys sont au nombre de trois sur un écu
brochant une croix, dans le large médaillon (ig. 22, no 5) d’une
ampoule mise au jour dans des remblais de jardin, sur le site de
l’ancien Garage Régina, datés vers 1340-1390. Sur le col, un écu
à la croix se distingue. Cet objet possède deux faces bombées,
mais une seule est ornée. L’écu de France « moderne » 216 se
retrouve sur l’une des faces bombées d’une petite ampoule de
type gourde qui aurait été retrouvée à Avignon (ig. 22, no 6).
Son col a été cassé, probablement pour récupérer le contenu.
Au Quartier du hor, à Sisteron, deux ampoules de type
gourde (ig. 22, no 7 et 8) à l’avers bombé et au revers plat
ont été découvertes, lors de fouilles clandestines, avec une
ampoule rectangulaire (ig. 23, no 2) et deux petites reproductions de pistolets dont la crosse courbe est caractéristique du
xviiie siècle217. Toutefois, l’absence de stratigraphie ne permet
pas de relier ces deux groupes d’objets entre eux. L’une des
ampoules est décorée d’une leur de lys, l’autre d’un paon (?)
dont la queue est symbolisée par deux plumes terminées en
pique encadrant une plume en queue de pelle. Une bande
quadrillée surmonte le tout.
À Marseille, place Villeneuve-Bargemon, un comblement de
puits du xive ou du xve siècle a fourni une ampoule écrasée, aux
deux faces bombées (ig. 22, no 9)218. Elle présente sur une face
un quadrillage oblique limité à la base par des traits parallèles.
Le même quadrillage se retrouve sous le pied où l’on perçoit
distinctement la ligne de jonction des deux parties moulées
séparément. Cet objet se distingue légèrement des précédents
par son col dans la continuité du corps et ses longues anses. La
forme générale est assez proche d’une outre.
L’ampoule suivante (ig. 22, no 10) a été découverte dans
un niveau de dépotoir des années 1440-1450, rue Banasterie à
Avignon. Elle est la plus ornée et la plus travaillée du catalogue.
Sa forme, proche des exemplaires en forme de gourde, comporte
un pied qui la fait ressembler à un vase. Les anses coudées, de
section losangique, sont rattachées d’une part, à un col évasé
et, d’autre part, à un corps aux deux faces bombées portant un
écu sur un fond quadrillé oblique. L’un des écus est celui de
« France moderne », le second est écartelé de lys et de coticé,
un écu au lion (?) rampant sur le tout. Ce dernier est celui des
comtes de Bourgogne, postérieurement à Philippe le Hardi,
et l’objet peut donc probablement être daté du xve siècle. Sur
le col, une leur de lys, encadrée par deux volutes, est igurée
sur une face, centrée au-dessus de deux demi-cercles disposés
sur une ligne de motifs de trois points. Sur l’autre face,
trois demi-cercles reposent pour partie sur deux ensembles de
trois points, au-dessus desquels un cadre contient une leur de
lys couchée (?). Denis Carru et Sylvain Gagnière proposent
d’y voir un signe d’ordre politique 219. Cette hypothèse n’est
pas totalement convaincante, car les ampoules sont traditionnellement des objets religieux. Les écus ornant cette ampoule
indiquent, selon toute vraisemblance, qu’elle a été produite
pour un sanctuaire situé en territoire bourguignon.
Un objet circulaire recueilli dans une couche de dépotoir du
dernier tiers du xive siècle sur le site du Petit-Palais d’Avignon,
n’est peut-être pas une ampoule de pèlerinage, mais le fait qu’il
soit creux permet de l’envisager (ig. 22, no 11). Il est orné
d’une rosace à huit pétales incluse dans un cercle sur la face
supérieure bombée. La face inférieure est actuellement concave.
Les quelques trous plus ou moins circulaires, visibles sur ses
faces, ne paraissent pas le fait d’un acte volontaire. De larges
portions de l’objet ont disparu ainsi que probablement le dispositif d’attache.
s
prOvence
on
praTique du pèlerinage en
iti
la
117
118
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
Éd
iti
on
s
Olivier ThuaudeT
Fig. 22 Ampoules de pèlerinage en forme de gourde ; no 1 et 4 : Chemin Saint-Jean, Avignon, Vaucluse, service archéologique du Vaucluse,
dessin : D. Carru (CARRU et GAGNIÈRE 1992) ; no 2 : Rue Carreterie, Avignon, Vaucluse, service archéologique du Vaucluse, dessin : D. Carru (CARRU
et GAGNIÈRE 1992) ; no 3 et 5 : Garage Régina, Avignon, Vaucluse, service archéologique du Vaucluse, dessin : D. Carru (CARRU et GAGNIÈRE 1992) ;
no 6 : Avignon, Vaucluse, service archéologique du Vaucluse, dessin : D. Carru ; no 7 et 8 : Quartier du Thor, Sisteron, Alpes-de-Haute-Provence,
cl. S. Bleu et I. Gannet (BLEU et GANET 1996) ; no 9 : Place Villeneuve-Bargemon, Marseille, Bouches-du-Rhône, service archéologique municipal
de Marseille, dessin : O. Thuaudet (THUAUDET et CHAZOTTES 2014) ; no 10 : Rue Banasterie, Avignon, Vaucluse, service archéologique du Vaucluse,
dessin : D. Carru (no 11) (CARRU et GAGNIÈRE 1992) ; no 11 : Jardin ouest du Petit Palais, Avignon, Vaucluse, service archéologique du Vaucluse,
dessin : O. Thuaudet.
praTique du pèlerinage en
prOvence
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
Éd
iti
on
s
la
©
C
N
R
Quatre ampoules provençales adoptent une forme de panse
quadrangulaire. Une première pièce, découverte avec un
exemplaire en forme de gourde (ig. 23, no 1) dans un niveau
de dépotoir des années 1440-1450, rue Banasterie à Avignon,
a été amputée volontairement de ses anses et un trou perce la
panse. Celle-ci est de proil semi-cylindrique. Le col est particulièrement large. Le décor de la face plane n’est plus compréhensible. La face bombée est ornée d’un losange contenant
des gouttes rayonnantes. Un quadrillage oblique s’observe
au-dessous. Denis Carru et Sylvain Gagnière distinguent une
mitre avec cordons sur le col ; en conséquence, ils proposent
que cette ampoule soit en rapport avec la dévotion rendue à
un saint évêque220.
Une ampoule quadrangulaire sans col (ig. 23, no 2), avec
deux anses disposées au milieu de la hauteur de l’objet, a été
retrouvée lors de fouilles illégales dans le quartier du hor à
Sisteron. Elle est ornée d’un cœur surmonté d’une croix de
Lorraine221.
Deux autres ampoules avignonnaises, en forme de barillet,
ont été mises au jour, rue Carreterie, la première (ig. 23, no 1)
dans une latrine des années 1390-1410, la seconde (ig. 23,
no 2) sur un sol en terre battue des années 1360-1380. Le col
bas se ixe à un corps rectangulaire décoré d’un seul côté.
Les anses sont en quart-de-cercle. Trois leurs de lys ornent
220. Carru et Gagnière 1992, p. 7.
221. Bleu et Ganet 1996, p. 89.
la face d’une des ampoules, des bandes verticales – celles du
centre se prolongeant sur le col – sont visibles sur l’autre. Ces
bandes continuent sur la face inférieure ainsi que sur l’avers,
où subsistent encore quelques traces.
3. LES SOUVENIRS DE PÈLERINAGE
3.1. PRODUCTION ET COMMERCE DES
ENSEIGNES
Des documents présentés auparavant révèlent que la fabrication d’enseignes ou d’autres souvenirs pouvait être contrôlée
par les religieux des sanctuaires concernés : l’abbaye de
Montmajour pour la confection d’images de saint Pierre et de
saint Antoine, l’abbaye de Saint-Maximin pour les enseignes à
l’eigie de Marie-Madeleine. Dans ce dernier cas, des commerçants cherchent à leur faire concurrence. Dans les comptes
du roi René, les enseignes sont obtenues par l’intermédiaire
de familiers, par commande auprès d’orfèvres, mais rarement
auprès de marchands222. Il en est autrement pour les quelques
achats réalisés par son ils : ses acquisitions se font toujours
auprès de marchands qui, pour certains d’entre eux, ne sont pas
spécialisés dans la vente d’enseignes, comme le montrent les
222. Par exemple, Arnaud d’Agnel 1908, no 2461.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
S
Fig. 23 Ampoules de pèlerinage ; no 1 : Rue Banasterie, Avignon, Vaucluse, service archéologique du Vaucluse, dessin : O. Thuaudet (no 10) ;
no 2 : Quartier du Thor, Sisteron, Alpes-de-Haute-Provence, cl. S. Bleu et I. Gannet (BLEU et GANET 1996). no 3 et 4 : Rue Carreterie, Avignon,
Vaucluse, service archéologique du Vaucluse, dessin : D. Carru (no 3) (CARRU et GAGNIÈRE 1992) et O. Thuaudet (no 4).
119
Olivier ThuaudeT
3.2. QUELLE RENOMMÉE POUR LES PÈLERINAGES ?
iti
on
s
Des indications sur le rayonnement des pèlerinages sont
fournies par la documentation historique (compilations de
miracles, procès en canonisation). Elle a été signalée lors de
l’étude des enseignes. D’autres données peuvent être tirées de
l’analyse conjointe de la répartition du mobilier archéologique
et des sources d’archives.
Dans son étude des testaments aixois entre 1390 et 1450,
N. Coulet enregistre une proportion de 4 % de testateurs
mentionnant le pèlerinage qu’ils ont entrepris, étant sur le point
de faire ou entendant accomplir. Ils appartiennent à toutes
les classes de la société, sans prédominance de l’une d’entre
elles. Cependant, comme le souligne l’historien, rien n’oblige le
testateur à signaler les pèlerinages qu’il a efectués. La proportion
des pèlerins était donc sans doute plus importante, sans qu’il
soit possible d’établir un chifre. La plupart des pèlerinages
mentionnés sont hors de Provence et lointains : Saint-Jacques
de Compostelle apparaît 34 fois parmi les 70 destinations notées
dans ces documents, Rome sept fois, quatre voyages ayant été
accomplis au moment du jubilé de 1400 et trois autres pour celui
de 1450228. Les sanctuaires de Rome sont absents des enseignes
retrouvées en Provence, au contraire du Volto Santo de Lucques
et de Saint-Jacques-de-Compostelle (ig. 1 et 2). Accéder à ces
sanctuaires éloignés exige un investissement important d’un
point de vue moral et spirituel, mais aussi physique et inancier.
Toutefois, les nombreuses coquilles de type Pecten Jacobeus
trouvées en Provence – au moins 24 sur 32 coquilles de Pecten
– n’attestent pas exclusivement du voyage jusqu’en Galice, mais
aussi de la célébrité du saint.
Les autres lieux de culte non provençaux cités dans les testaments aixois sont Notre-Dame-du-Puy, avec treize pèlerinages,
puis Saint-Antoine de Viennois, trois fois229. Ces données sont
à comparer avec la découverte, en Provence, d’enseignes de
Notre-Dame-de-Vauvert, de Saint-Pierre-de-Lézan et de
Notre-Dame-du-Puy (ig. 1 et 2). La relative proximité de ces
sites a pu favoriser les déplacements : s’y rendre prend peu
de temps et le voyage à accomplir comporte moins de périls.
Le sanctuaire de Saint-Pierre-de-Lézan semble jouir d’une
renommée plus locale comme l’illustre la localisation, à Arles
et à Avignon, des deux seules enseignes connues.
Les pèlerinages régionaux n’apparaissent que quinze fois
dans la documentation de N. Coulet230. Cependant, il est fort
probable qu’un plus grand nombre de pèlerinages se faisait en
direction d’un sanctuaire local, plus accessible, auprès d’un saint
que l’on avait coutume de prier. La nature de l’acte notarié est
sans doute en cause : le testament est avant tout un document
dans lequel le testateur évoque les évènements à survenir
après sa mort et donc aussi l’au-delà. Or, plus le sanctuaire est
lointain, plus le mérite et les bienfaits pour le salut de l’âme
sont importants. Parmi les destinations régionales relevées, le
tombeau de Pierre de Luxembourg au couvent des Célestins
d’Avignon prédomine, puisqu’il est cité par quatre personnes,
120
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
Éd
autres achats qui leur sont faits223. Les informations manquent
pour savoir si ces intermédiaires vendent exclusivement les
enseignes d’un sanctuaire de la ville où ils sont implantés,
ou s’ils font également le commerce des enseignes propres à
d’autres lieux de culte. De fait, rien ne prouve formellement
que le roi René, son ils, ou tout autre pèlerin, ait réellement
visité tous les sanctuaires auxquels se rattachent les enseignes
acquises. Les commandes efectuées auprès d’orfèvres ne
prouvent rien dans un sens ou dans l’autre : une enseigne du
sanctuaire a pu servir de modèle.
Certains comptes rapportent que, dans les grands centres
de pèlerinage européens, des dizaines ou même des centaines
de milliers d’enseignes pouvaient être vendues en quelques
semaines ou quelques mois224. Ces assertions peuvent paraître
surprenantes au vu du nombre d’enseignes de pèlerinage
retrouvées en Provence, mais elles contribuent à relativiser
la portée des données obtenues sur la quantité du mobilier
découvert en contexte archéologique, témoin ayant échappé au
recyclage et à l’oxydation totale. De même, il n’est actuellement
recensé qu’une seule possible matrice pour des enseignes ou des
médailles dans la région. Toutefois, la diversité des enseignes
pour un même sanctuaire – les exemplaires identiques sont
extrêmement rares – indique que plusieurs moules ou plusieurs
gravures fonctionnent simultanément : quatre moules en pierre
pour la fonte avec une ou deux gravures distinctes sont connues
pour le seul et éphémère pèlerinage de la Vierge de Ratisbonne,
qui apparaît en 1519 et ne dure que six ou sept ans225 ; au moins
vingt et une gravures diférentes ont été identiiées parmi les
vingt-cinq enseignes de Notre-Dame du Puy, du modèle « à
pignon », répertoriées par J. Berger 226 ; quarante empreintes
d’enseigne ont été reconnues parmi les fragments de moule
trouvés à l’emplacement d’un atelier métallurgique au Mont
Saint-Michel227.
Le coût des enseignes ne peut être évoqué que succinctement,
au moyen des comptes du roi René (ig. 3). Le prix varie en
fonction du matériau et de la taille. Lorsqu’il est connu ou peut
être calculé, il est d’environ 2 ou 3 deniers la pièce en matériau
blanc, de 1,5 gros ou 3 gros l’exemplaire en argent, de 4 gros
l’objet en argent doré. Les enseignes en argent, fabriquées par
l’orfèvre d’Avignon Ligier, en 1447, coûtent environ 3,4 gros la
pièce et celles en or 7,5 gros la pièce. L’artisan reçoit pour ces
commandes respectivement deux et six gros par exemplaire. Le
coût du travail équivaut respectivement à 55,6 % et 44,4 % du
prix total. Les enseignes en matériau blanc sont peu coûteuses,
car faciles et rapides à produire et créées dans un matériau de
faible prix. Elles peuvent être achetées à hauteur de plusieurs
exemplaires par le pèlerin pour être ofertes à des proches.
223. Il a cependant existé des marchands spécialisés dans la vente des enseignes
et ex-voto. Le compte-rendu d’une visite épiscopale à Saint-Mathurin de
Larchant rapporte que des femmes vendaient dans l’église des enseignes de
pèlerinage et des chandelles (Gasnault 1989). Une étude iconographique
d’une marchande d’enseigne igurée sur une stalle du premier quart du
xvie siècle de la cathédrale d’Amiens a été réalisée par D. Bruna (1994).
224. Bruna 1992, p. 317, 320.
225. Ibid.
226. Berger 2009, p. 93.
227. Labaune-Jean (dir.) 2016, p. 140.
228. Coulet 1972, p. 248-249, 251.
229. Ibid.
230. Ibid. N. Coulet donne le chifre de seize mais ne fournit que
quinze exemples.
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
jour. Les causes probables sont l’entretien régulier des sols,
le faible nombre de dépotoirs domestiques et l’absence de
dépotoirs collectifs dans l’emprise des fouilles. La gestion des
déchets semble avoir fait l’objet d’une politique municipale237.
À l’opposé, les contextes funéraires de la cathédrale de Digne
et les fouilles d’habitats à Avignon se sont révélés propices à
la découverte des enseignes. Le site du Castelet de Fontvieille
constitue un cas particulier puisque la presque totalité des
objets a été récupérée lors de travaux par un propriétaire.
Il paraît bien diicile, au regard de ces données disparates
et des diicultés de fouilles rencontrées dans certains lieux,
d’envisager actuellement des rélexions plus avancées sur la
pratique du pèlerinage en Provence. Une dernière constatation doit cependant être faite : alors que les découvertes
anciennes proviennent essentiellement des cours d’eau, les
objets apparaissant lors des basses eaux ou lors de dragages,
les trouvailles récentes sont presque exclusivement terrestres,
grâce au développement de méthodes de fouilles scientiiques
et à la difusion à grande échelle des détecteurs de métaux.
Les rivières et leuves représentent de gigantesques dépotoirs à
ciel ouvert. La lecture des comptes rendus de l’abbé Desnoyers
sur les artefacts retrouvés dans la Loire dans le dernier tiers
du xixe siècle 238 en est une illustration : on y trouve de tout.
Aucun document ne permet de prouver l’existence du jet dans
un cadre apotropaïque239 ou pour empêcher l’appropriation des
enseignes par des condamnés au pèlerinage pénitentiel.
La répartition des lieux de découverte d’enseignes provenant
de sanctuaires provençaux (fig. 23) peut éclairer sur la
renommée des pèlerinages. Toutefois, une certaine prudence
est de mise, du fait de l’aléa des découvertes. Les sanctuaires
de Saint-Gilles et de Saint-Maximin-la-Sainte-Baume viennent
en tête. Ils sont connus sur une large aire géographique et le
premier paraît plus visité que le second, d’après le nombre des
enseignes inventoriées : 32 contre 6. D’une façon assez surprenante, l’Allemagne est pauvre en découvertes alors qu’elle est
un foyer notoire du culte à saint Gilles. Les deux sanctuaires
apparaissent comme une destination prisée des pèlerins venant
de loin, un objectif principal au cours de leurs pérégrinations.
À un niveau inférieur, le pèlerinage auprès des reliques de saint
Antoine, à l’abbaye de Montmajour à Arles, touche tout le midi
de la France. Méconnu, si ce n’est inconnu, il y a à peine plus
d’une dizaine d’années, des publications récentes ofrent une
idée beaucoup plus précise d’un culte qui n’est pratiquement
pas renseigné par les sources textuelles. À cet échelon intermédiaire se situe également l’église des Célestins d’Avignon avec
la sépulture du bienheureux Pierre de Luxembourg. D’après
les témoignages de miracles du procès en canonisation, Pierre
de Luxembourg fait, avant tout, l’objet d’une vénération
dans le diocèse d’Avignon et les évêchés limitrophes240. À ces
deux premiers niveaux s’ajoute un troisième, regroupant des
sanctuaires provençaux à renommée locale : Notre-Dame de
Doms, Saint-Cézaire d’Arles, l’abbaye de Montmajour avec la
dévotion à saint Pierre et à la sainte Croix. Les enseignes, à
l’exception de celles découvertes au Castelet de Fontvieille, où
©
231. Les îles de Lérins sont une destination prisée entre l’Ascension et la
Pentecôte, au temps des indulgences. Les pèlerins, originaires de France,
d’Italie, d’Espagne et, pour une majorité, de Provence, embarquent à Cannes.
Les habitants de Pertuis et Lérins y faisaient une procession tous les ans sous la
conduite de leurs consuls (Grassi 1970, p. 51).
232. Dans les Miracles de sainte Marie-Madeleine, le no 75 rapporte le cas d’une
jeune ille devenue folle, à qui saint Sifrein dont le corps repose à Carpentras
et qui « ne refuse pas habituellement d’aider avec le Seigneur les malades de
cette sorte » refuse la guérison, ceci ain de « rendre plus manifestes les mérites
de Madeleine » qui lui redonnera la raison (Sclafert [éd.] 2009, p. 156-158).
233. Situé près de La Garde.
234. Coulet 1972, p. 251.
235. Veyssière 1987, t. 1, p. 19-21, t. 2, p. 90-392 ; Veyssière 1994, p. 209.
236. Tixador 2004, p. 16. La seule enseigne issue d’un sanctuaire très éloignée
est de Villalcàzar de Sirga en Espagne. Un coquillage du genre Tellina est
interprété par erreur comme provenant de Compostelle et une bulle papale est
identiiée comme une enseigne (Tixador 2004, p. 28, 47 et 51).
237. Thuaudet et Chazottes 2014, p. 347 ; Abel et Parent 2014, p. 259.
238. Par exemple Desnoyers 1873 et 1876.
239. Interprétation encore reprise récemment dans l’ouvrage sur les enseignes
sacrées et profanes découvertes à Valenciennes (Tixador 2004, p. 9-13).
240. Veyssière 1987, t. 1, p. 19-21, t. 2, p. 390-392 ; Id. 1994, p. 209.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
Éd
suivi de Saint-Honorat-de-Lérins 231, désigné trois fois, de
Saint-Eutrope d’Orange, indiqué par deux testateurs. Les
autres lieux, Notre-Dame-des-Doms d’Avignon, Saint-Sifrein
de Carpentras 232, Saint-Jean-de-Garguier, Notre-Dame-deMiremer233, Notre-Dame-de-Moustiers et Notre-Dame-de-laGarde à Marseille igurent chacun dans un seul document234. De
ces sanctuaires, seul celui de Notre-Dame-des-Doms a livré une
enseigne en Provence, mais des souvenirs à l’eigie de Pierre
de Luxembourg sont connus hors de cette zone (ig. 23). Les
sept autres sanctuaires provençaux pour lesquels sont identiiés
des enseignes, et notamment Saint-Gilles, sont absents. Il n’est
de même nullement fait mention de la comtesse Delphine de
Puimichel, invoquée essentiellement dans le pays aptésien et à
Marseille à la in du xive siècle, ou encore d’Urbain V qui, à la
même époque, fait l’objet de sollicitations provenant de presque
toute la chrétienté méridionale235.
Les données rassemblées pour la Provence montrent qu’il
existe à l’évidence une certaine dichotomie entre les pèlerinages
mentionnés dans les testaments et ce qu’illustre l’archéologie.
Dans le contexte aixois des années 1390-1450, les mentions
de pèlerinages provençaux sont en proportion minoritaires.
Or le contraire est observé pour les enseignes répertoriées
pour le bas Moyen Âge. Arnaud Tixador a également mis en
évidence la provenance essentiellement locale, ou des régions
limitrophes, des souvenirs retrouvés à Valenciennes236. Il a déjà
été évoqué que la nature de l’acte peut inluencer le choix des
testateurs et il est probable que cette raison est la principale
cause de cette contradiction apparente. Il faut aussi considérer
que l’étude de N. Coulet s’applique à une ville unique et à un
laps de temps réduit ; qu’en est-il ailleurs ? Un autre travers,
et non des moindres, est le choix du support de dévotion fait
par le sanctuaire : une statuette en plâtre, une estampe sur
papier, un objet végétal, un simple chapelet, etc., peuvent
constituer des souvenirs de pèlerinage. L’intensité, variable,
des recherches archéologiques entreprises sur le territoire
provençal, qui se conjugue avec la nature des sites étudiés et
les contextes stratigraphiques rencontrés constituent d’autres
biais. À Aix-en-Provence, les fouilles archéologiques intra-urbaines sont rares, car le centre-ville est protégé, il n’est donc
guère surprenant qu’aucune enseigne de pèlerinage n’ait été
découverte. À Marseille, en dépit de nombreuses opérations
archéologiques dans la ville médiévale, aucune enseigne n’a
été retrouvée et une seule et unique ampoule a été mise au
s
prOvence
on
praTique du pèlerinage en
iti
la
121
Olivier ThuaudeT
N
R
S
s
Éd
L’analyse des contextes archéologiques révèle que les
ampoules de pèlerinage sont pratiquement absentes des
zones funéraires provençales et les enseignes métalliques y
sont rares – seulement deux exemplaires – au contraire des
coquilles Saint-Jacques, beaucoup moins fréquentes en dehors
des espaces funéraires. Ce constat peut être étendu, avec peu
d’adaptation, au territoire ouest européen241. Les coquilles sont
essentiellement découvertes isolées dans les sépultures, parfois
avec un bâton ferré242 ou avec d’autres dépôts tels qu’un pégau
ou une lampe en verre243. Il est d’usage de considérer que ces
coquilles sont cousues sur le vêtement du défunt, mais elles
peuvent également avoir été disposées sur le corps, éventuellement sur des zones où elles sont habituellement portées. Une
telle discrimination dans la nature des contextes de découverte
des insignes religieuses n’est pas anodine. Elle montre que
la coquille Saint-Jacques et les ampoules et enseignes métalliques possédaient des fonctions diférentes. Les enseignes
métalliques semblent avoir eu avant tout un rôle de protection
durant la vie terrestre. En revanche, il est attesté dans les
temps préhistoriques, durant l’Antiquité et le haut Moyen
Âge, que les coquillages, parfois percés, servaient d’ornements
ou d’ofrandes mortuaires244. Ce rôle protecteur dans l’au-delà
s’est très certainement transmis aux coquilles difusées par le
sanctuaire de Galice. Sans doute a-t-il joué un rôle important
dans le succès de ce pèlerinage. La fortune du saint de Galice
tient également à ce que, dans l’imaginaire médiéval, fondé
sur une interprétation de l’Épître de saint Jacques, celui-ci
on
3.3. COQUILLES SAINT-JACQUES, ENSEIGNES
ET AMPOULES MÉTALLIQUES : DES FONCTIONS
DIFFÉRENTES
est censé se manifester à l’heure de la mort, accompagnant le
défunt lors du passage de la Terre vers le Ciel, mais aussi être
présent dans le Royaume des Morts, lors du Jugement dernier,
et être lui-même capable de procéder à des résurrections245.
La présence d’une statue de saint Jacques, avec son chapeau
porteur d’une coquille sur le tombeau du cardinal Philippe de
Cabassole, mort en 1372, autrefois à la Chartreuse de Bonpas,
n’est pas sans valeur symbolique246. Il n’est nul besoin d’être allé
à Saint-Jacques en Galice pour se mettre sous sa protection.
Par extension, la coquille de type Pecten suit, quelle que soit
son origine, pour peu qu’elle ressemble à celle donnée aux
pèlerins en Galice. Le signe matériel, ou l’image, ont la même
valeur que la coquille véritable.
Le rôle prophylactique et de souvenir, des enseignes
et ampoules, est largement renseigné, mais les enseignes
peuvent également tenir un rôle signiiant dans le costume.
Un exemplaire particulièrement remarquable est la commande
par le roi René à un orfèvre, en 1451, de trois grandes enseignes
d’or pour la reine, sa ille Yolande et lui-même, de six petites
pour les chambellans, de deux douzaines de grandes enseignes
d’argent pour des gentilshommes et damoiselles, de quatre
douzaines de plus petites pour les oiciers. Une mise en scène
du rang social apparaît nettement, car le matériau et la taille
ont été choisis en fonction de l’attribution des enseignes et
selon une progression pyramidale chargée de symbolique.
Ces enseignes matérialisent la condition et la position de leur
possesseur dans le microcosme de la cour, tout en participant
de la magniicence royale. A contrario, le roi fait acheter à
d’autres occasions des enseignes de plomb (ig. 3), parfois
peut-être pour son usage personnel. Sans doute faut-il considérer l’acquisition de ces objets, intrinsèquement sans valeur
inancière, comme un « signe » réel d’humilité247, à l’image du
comportement vestimentaire de Louis XI, qui avait l’habitude
de porter sur son chapeau une enseigne en étain de la Vierge,
et d’autres enseignes similaires à son col248. En 1566, des nobles
néerlandais se mettent à arborer des enseignes de plomb en
forme de besace et de sébile, après le soulèvement des Pays-Bas,
en réaction à l’insulte de « gueux » dont ils avaient fait l’objet
par les autorités espagnoles. Très rapidement, cependant, ces
insignes deviennent en or ou en argent, des matériaux plus
appropriés au rang social des personnages249.
iti
un atelier de fabrication pourrait avoir existé, sont au mieux
attestées par quelques unités. L’enseigne à l’eigie de saint
Césaire retrouvée à Londres est trop isolée pour être représentative de la célébrité du lieu de culte : cet objet a pu être
acquis par un pèlerin ayant ajouté, à son périple initial, la visite
d’un sanctuaire voisin, ou par un marchand étranger ayant eu
afaire à Arles.
122
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
241. Rares sont les découvertes d’ampoules en contexte funéraire : il en a
été mise une au jour dans une sépulture du xe ou de la première moitié du
xie siècle dans l’église Saint-Laurent de Grenoble en Isère (Colardelle 1999,
t. 2, p. 49 ; Colardelle 2008, p. 297). Les enseignes de pèlerinage ne sont
guère plus fréquentes : se reporter à Spencer 1990, p. 144 pour un relevé de
quelques découvertes dans le nord de l’Europe.
242. Dans le quart sud-est de la France, il y a le cas des sépultures 1193 et 1201
(xive-xvie siècle) du site de la cathédrale Notre-Dame du Bourg de Digne. Non
loin de là, en Ardèche, deux sépultures avec coquilles (in xiie-xiiie siècle et
in xiiie-xive siècle) contenaient un bâton ferré (Esquieu et al. 1988, p. 71).
Dans la Drôme, à Notre-Dame de Montcham, à Malataverne, une inhumation
(xie-xive siècle) contenait un pégau près de la tête, une coquille sur la poitrine
et une ferrure de bâton près du tibia gauche (Gagnière et Granier 1971,
p. 184).
243. L’inhumation 1022 (xiv -xvie siècle) de la cathédrale de Digne contenait
trois coquilles et deux pégaus, la no 1118 (xive-xvie siècle), une coquille, une
lampe en verre et deux pégaus, la no 1148 (xiie-xiiie siècle), deux coquilles et
une lampe en verre, la no 1193, une coquille, un fer de bâton et une gargoulette,
la no 1216 (xiie-xiiie siècle), une coquille, une lampe en verre et un pégau, la
no 1402, une coquille et deux pégaus (xive-xvie siècle).
244. Köster 1985, p. 86.
3.4. LA DÉSAFFECTION DES ENSEIGNES ET
AMPOULES
Au bas Moyen Âge, les enseignes et ampoules de pèlerinage
peuvent être produites concurremment avec d’autres
souvenirs. Des clochettes et des silets en matériau blanc
(ig. 24) ont ainsi peut-être été fabriqués en Provence. Comme
signalé précédemment, des statuettes en plâtre de saint Pierre
245. Péricard-Méa 2000, p. 12, 57-76.
246. Les éléments restants de ce tombeau sont conservés au musée du Petit
Palais à Avignon.
247. Le roi René se déplaça à plusieurs reprises jusqu’à des sanctuaires de
pèlerinage, parfois en faisant une partie du parcours à pied.
248. La tenue du roi fut le sujet de moqueries de la part des espagnols lors
d’une rencontre à Bayonne en 1468 (Koldeweij 2006, p. 30).
249. Ibid., p. 28.
praTique du pèlerinage en
prOvence
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
Éd
iti
on
s
la
Fig. 24 Possibles souvenirs de pèlerinage ;
no 1 : Jardin ouest du Petit Palais, Avignon, Vaucluse, service archéologique du Vaucluse, dessin : O. Thuaudet ;
no 2, Castrum Saint-Jean, Rougiers, Var, Dépôt archéologique de La Ripelle, Toulon, dessin : O. Thuaudet ;
250. Il se raréie à la in du xviie siècle dans la cité vauclusienne ; il est alors
remplacé par la gravure sur cuivre, notamment au moyen de la taille-douce
(Chobaut 1943, p. III-IV).
251. Fournand 2001, p. 116, 121.
252. Thiriet 1997, p. 17.
commerce illicite des enseignes hors des sanctuaires, ainsi que
l’apparition de mendiants et escrocs portant le costume et les
enseignes des pèlerins pour provoquer plus de dons. Associés,
ces faits ont eu d’après lui raison de la valeur symbolique
détenue par l’objet253.
Toutefois, la pratique du pèlerinage perdure et la fabrication
d’objets souvenirs par les sanctuaires est documentée pour des
périodes tardives. À l’époque de la peste de 1720, il est ainsi
fabriqué à Carpentras des petits clous d’or et d’argent qui, mis
en contact avec le Saint-Clou, étaient considérés comme un
talisman contre l’épidémie254. Au début du xixe siècle, l’érudit
Aubin-Louis Millin remarque lors de sa visite du sanctuaire
contenant les reliques de Marie-Madeleine à Saint-Maximin
qu’il y a « une boîte remplie d’anneaux de verre, que l’on fait
toucher à la châsse, et que l’on distribue à six sous pièce »255.
Le pouvoir des reliques est transmis par contact à la bague
en verre, et la porter au doigt équivaut peut-être à s’unir avec
cette protection.
4. L’ÉTUDE DES MÉDAILLES RELIGIEUSES
MODERNES : UNE RECHERCHE À INITIER
La disparition progressive des enseignes et ampoules de
pèlerinage est marquée, au même moment, par l’apparition
et le développement des médailles religieuses. Les premières
253. Bruna 2006, p. 234-235.
254. Courrier de l’Institut 1925, p. 225.
255. Millin 1808, t. 3, p. 128.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
©
C
N
R
S
sont produites dans la seconde moitié du xive siècle pour
l’abbaye de Montmajour, et des images peintes à l’eigie de
Pierre de Luxembourg au milieu du xve siècle à Avignon.
L’impression d’images religieuses par xylographie est attestée
à Avignon dès 1420250. L’inventaire des biens saisis en 1561 à
Jean Cogorde, travailleur d’Aix, signale une « Veronicque de
toille » et « trois pièces de imagerie en papier » probablement à
sujet religieux. Chez le boucher aixois Jean Barnou, il est relevé
après son décès, en 1573, « deux Magdallenes en papier » et
dans le testament du procureur à la sénéchaussée d’Aix Claude
Arnaud, « une imaige en papier »251. C. hiriet relève également
de nombreuses images de papier à iconographie religieuse
dans les inventaires après-décès à Marseille, du troisième quart
du xvie siècle252. Ces images étaient sans doute, pour une part,
vendues aux pèlerins et, pour une autre part, distribuées par
des colporteurs et merciers s’approvisionnant chez des imprimeurs.
Ces objets ont-ils concurrencé les enseignes et ampoules
jusqu’à provoquer leur désafection au cours du xvie siècle ? La
réalité est probablement plus complexe. Denis Bruna pense que
le développement des techniques de reproduction sur papier
est une des causes. Mais, il mentionne également la banalisation de l’enseigne, suite au développement d’un pèlerinage de
masse et de la prolifération des pèlerinages locaux, mais aussi le
123
Olivier ThuaudeT
iti
on
s
précis. La Contre-Réforme catholique, au milieu du xvie siècle,
a eu une inluence sur l’iconographie. Cette période marque
un tournant dans la pratique de la foi et dans la liturgie. Les
résultats du concile de Trente sont pour beaucoup difusés,
de manière progressive dans la société, par deux ordres
religieux : les Capucins et les Jésuites. Des thèmes disparaissent des nouvelles productions d’images, quel qu’en soit le
support, au proit des thématiques du mystère du Rosaire, de
la bonne mort ou des âmes du Purgatoire. Progressivement, au
xviie siècle, de nouvelles igures saintes sont mises en avant :
François de Sales, François Xavier, Ignace de Loyola, Charles
Borromée. De nombreuses médailles religieuses découvertes
en Provence les représentent. La dévotion aux saints traditionnels, et notamment à Marie-Madeleine, reste néanmoins
vivace régionalement dans la sphère privée, mais aussi dans les
églises. En outre, que ce soit avant ou après le concile de Trente,
la dévotion au Christ soufrant et à la Vierge à l’Enfant reste
de loin la plus importante en Provence266. Ces deux dernières
thématiques sont courantes sur les médailles religieuses des
xviie-xixe siècles267.
Au xviie siècle, d’après l’iconographie et les découvertes en
contexte funéraire, la médaille est presque systématiquement
intégrée à des chapelets, traduction d’une évolution des
pratiques religieuses dont témoignent déjà les marges du livre
d’Heures Metteneye précédemment signalé. Elle a pu aussi être
portée en pendentif autour du cou, contre la peau, et recouvrer
un lien encore plus intime avec le divin. Des changements
d’ordres symboliques s’observent également : le chapelet avec
ses médailles est un signe identitaire de catholicité face aux
protestants268 ; alors que l’enseigne est pratiquement absente des
contextes sépulcraux, la médaille, généralement incluse dans un
chapelet, accompagne les morts dans leur dernier voyage et ce
indépendamment de l’âge et du sexe.
Le développement du chapelet et de la médaille, est le
témoin visible de modiications dans les pratiques et les symboliques religieuses, ainsi que l’a mis en évidence Emmanuelle
Friant 269 par l’étude des sources écrites et iconographiques.
Même si l’élément mobilier prend une place signiicative dans
son travail, il apparaît cependant nécessaire de procéder à un
inventaire systématique, sur une large échelle géographique,
des chapelets, et des médailles et cruciix qui leur sont ou non
associés. En efet, la forme des médailles, leur iconographie et
leur difusion ont évolué au il du temps. Ces objets sont des
témoins privilégiés, avec l’iconographie et les sources écrites,
de l’évolution des sujets de piété.
124
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
N
R
S
Éd
médailles métalliques apparaissent au milieu du xve siècle, en
Italie, où elles sont étroitement liées aux transformations des
habitudes emblématiques. Elles sont exclusivement circulaires
et conçues pour être bifaces256. La production des premières
médailles religieuses a pu suivre peu de temps après. La
maladrerie de Saint-Firmin de la Fère (Aisne) achète, en 1490,
du il à pendre des enseignes de saint Firmin, et en 1548, elle
reçoit livraison de petites « ymaiges de plomb » à pendre au
cou257. Il est probable qu’elles aient comporté une bélière de
suspension comme des enseignes igurant la Sainte Tunique
d’Argenteuil, datées de in xve-début xvie siècle, et qui
portent au droit le Christ sur sa croix, et, au revers, la Vierge à
l’Enfant258. Les médailles religieuses modernes ont cette même
bélière. Mais, les images de La Fère étaient-elles bifaces et circulaires ? S’agit-il donc de médailles ou de médailles naissantes
ainsi que les qualiie Denis Bruna259 ? Des enluminures du livre
d’Heures Metteneye, du début du xvie siècle, comportent des
marges igurant des chapelets porteurs de médailles circulaires et de croix avec bélière260. De petits disques blancs sont
suspendus au chapeau de personnages masculins dans des
peintures de Bruegel datées de la in des années 1560261. En
1565, l’inventaire des marchandises du marchand d’Avignon
Adrien Moret mentionne cinq « medailles » noires, six jolies
médailles bien dorées, une douzaine de médailles dorées
moins belles262. Leur nature n’est pas précisée : s’agit-il d’objets
religieux ? Si oui, sont-ce des souvenirs de pèlerinage ? À sa
mort en 1566, Honoré de Tributis, conseiller au parlement
de Provence, possède parmi ses bijoux deux médailles en or
portant des inscriptions en l’honneur de Dieu263. Le musée
national du Moyen Âge conserve des médailles en matériau
blanc portant l’image de la sainte Larme de Vendôme que
D. Bruna date du xvie siècle264. Dans le mobilier archéologique provençal, les médailles religieuses antérieures à 1650,
toutes en alliage cuivreux, sont particulièrement rares : la plus
ancienne, produite à l’occasion du Jubilé de 1600, provient
d’une sépulture du carré Saint-Jacques à La Ciotat265.
À la fin du xve siècle et au xvie siècle, l’enseigne perd
rapidement son rôle de signe d’identité. Dépossédée de son
sens, submergée par d’autres objets souvenirs, elle se transforme, inluencée par le développement de la médaille profane.
La parenté de matériau entre la plupart des premières médailles
religieuses et la majorité des enseignes tardives l’illustre, alors
que les médailles profanes contemporaines sont en alliage
cuivreux. Le stade inal de la transformation est l’emploi
systématique, d’après les données archéologiques, des alliages
cuivreux pour les médailles religieuses.
Contrairement à l’enseigne, la médaille n’est, en tout cas
au xviie siècle, plus que rarement rattachée à un sanctuaire
256. Pastoureau 1982, p. 207-208, 218 ; Pastoureau 1988, p. 233, 237, 242.
257. Matton 1868, p. 117-118.
258. Bruna 1996, p. 58-60, no 22 à 26.
259. Id. 2006, p. 235.
260. Koldeweij 2006, p. 251, ig. 18.4.
261. Le Repas de Noces et La Danse de paysans (Vienne, Kunsthistorisches
Museum).
262. AD Vaucluse, 3 E 12 1346, fol. 161v-164r.
263. Fournand 2001, p. 120.
264. Bruna 1996, p. 48-49
265. Richier (dir.) 2011, p. 128.
266. Se conférer à Coulet 1972 pour un dépouillement de testaments aixois
des années 1350-1450, à Berton 2000 pour une étude d’inventaires aprèsdécès varois des années 1693-1769, à Cousin 1999 pour une analyse des
tableaux et ex-voto provençaux du xviie au xixe siècle. On lira également avec
intérêt le travail de Henin 1984 sur la maison et la vie domestique à Marseille
au xviie siècle, plus particulièrement les pages 342 à 351.
267. Données extraites d’une base de données en cours d’élaboration sur les
médailles religieuses modernes.
268. Friant 2009, p. 314-330.
269. Ibid.
la
praTique du pèlerinage en
prOvence
à la fin du
MOyen Âge
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
BIBLIOGRAPHIE
Audisio G.
1988, « Deux contrats de travail temporaire
au xve siècle », dans Avignon au Moyen
Âge : recueil de textes originaux, Avignon,
IREBMA, Publications de la Faculté des
Lettres d’Avignon, p. 154-157.
Baratier É.
1969, Enquêtes sur les droits et revenus de
Charles Ier d’Anjou en Provence (1252
et 1278) avec une étude sur le domaine
comtal et les seigneurs de Provence au
xiiie siècle, Paris, Bibliothèque nationale.
Biraben J.- N.
1976, Les hommes et la peste en France et
dans les pays européens et méditerranéens,
Paris, Mouton et École des hautes études
en sciences sociales.
on
s
Bleu S. et Ganet I.
1996, Commune de Sisteron, prospection
- inventaire diachronique, déposé
au Service régional de l’archéologie
Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Bligny-Bondurand É.
1915, Les coutumes de Saint-Gilles (xiiexive siècles), Paris, Picard.
Berger J.
2009, « Les enseignes de pèlerinage du
Puy », dans Maes B., Moulinet D. et
Vincent C. (dir.), Jubilé et culte marial
(Moyen Âge-époque contemporaine),
Actes du colloque international organisé
au Puy-en-Velay, du 8 juin au 10 juin
2005, Saint-Étienne, Publications de
l’université de Saint-Étienne, p. 87-114
(tiré à part avec pagination diférente).
Berton O.
2000, Les objets de piété dans les inventaires
après décès de l’arrière-pays varois :
1693-1789, mémoire de maîtrise d’histoire moderne sous la direction de
G. Audisio, Aix-en-Provence, Université
d’Aix-Marseille I.
Berton L.
2011, « Les enseignes médiévales en plombétain », Détection-Passion, no 92, p. 16-23.
Beuningen H. J. E., Koldeweij A. M.
1993, Heilig en profaan 1, 1000 laatmiddeleeuwse insignes uit de collectie
H. J. E. Beuningen, Cothen, Stichting
Middeleeuwse Religieuze en Profane
Insignes (Rotterdam Papers, VIII).
Beuningen H. J. E., Koldeweij A. M. et
Kicken D.
2000, Heilig en profaan 2, 1200 laatmiddeleeuwse insignes uit openbare en parti-
Bondurand É.
1890, « Les péages de Tarascon », Mémoires
de l’Académie de Nîmes, VIIe série, t. XIII,
p. 135-160.
1901, « La leude et les péages de Saint-Gilles
au xiie siècle, textes en langue d’oc et en
latin », Mémoires de l’Académie de Nîmes,
VIIe série, t. XXIV, p. 267-292.
Bonnemant L.
1876, « Mémoires de Bertrand Boysset
contenant ce qui est arrivé de plus remarquable, particulièrement à Arles et en
Provence depuis M.CCC.LXXII jusqu’en
M.CCCC.XIIII » (copié et annoté par
Laurent Bonnemant), Le Musée, revue
arlésienne, historique et littéraire, pag.
mult.
Bosq L.-C. et Bosq P.-J.,
1854, « Notice sur divers objets de l’Antiquité
et du Moyen Âge », Répertoire des travaux
de la Société de statistique de Marseille,
t. XVII, p. 318-322.
Breton R.
1991, « Le voyage, le passage en Provence et
la visite en Avignon du cardinal d’Aragon
(1517) », Annuaire de la société des amis
du Palais des papes et des monuments
d’Avignon, LXVII e-LXVIII e années,
p. 45-55.
Brun R.,
1935, « Annales avignonnaises de 1382 à
1410 extraites des Archives de Datini »,
Mémoires de l’Institut historique de
Provence, t. XII, p. 17-142.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
N
©
C
Arnaud d’Agnel G.
1906, « Notice sur le reliquaire de Saignon dit
de la Reine Jeanne », Annales de la Société
d’études provençales, 3e année, p. 383-390.
1908-1910, Les comptes du roi René, 3 t.,
Paris, Picard.
culiere collecties, Cothen, Stichting
Middeleeuwse Religieuze en Profane
Insignes (Rotterdam Papers, XII).
iti
Benoit F.
1927, « Note sur une inscription carolingienne et des objets provenant de l’abbaye
de Montmajour », Bulletin de la Société
nationale des antiquaires de France,
p. 110-114.
R
Albanès J.-H. et Chevalier U.
1899, Gallia christiana novissima, histoire des
archevêchés, évêchés et abbayes de France,
t. 2, Marseille (évêques, prévôts, statuts),
Valence, Imprimerie Valentinoise.
1901, Gallia christiana novissima, histoire
des archevêchés, évêchés et abbayes de
France, t. 3, Arles (archevêques, conciles,
prévôts, statuts), Valence, Imprimerie
Valentinoise.
1920, Gallia christiana novissima, histoire
des archevêchés, évêchés et abbayes de
France, t. 7, Avignon (évêques, archevêques, prévôts), Valence, Imprimerie
Valentinoise.
Baudat M.
1994, De la Thébaïde à Montmajour :
les reliques de Saint-Antoine Abbé,
Arles, Société des Amis du Vieil Arles
(Collection “Histoire d’Arles”, 6).
1999, « Les reliques de saint Antoine abbé, une
vénération “municipale” arlésienne ? »,
dans Bastié A. (dir.), Abbaye Saint-Pierre
de Montmajour : histoire et patrimoine,
Arles, Les Amis du Vieil Arles, p. 75-91.
2001, « La dévotion à saint Antoine abbé »,
Bulletin des amis du Vieil Arles, no 111,
p. 29-38.
Éd
Albanès J.-H.
1879, La vie de sainte Douceline, fondatrice des Biguines de Marseille composé
au treizième siècle en langue provençale
publiée pour la première fois, avec la
traduction en français et une introduction
critique et historique, Marseille, Camoin.
1897, Actes anciens et documents concernant
le bienheureux Urbain V, pape, sa famille,
sa personne, son pontiicat, ses miracles et
son culte, Paris, Picard.
Baratier É., Duby G. et Hildesheimer E.
1969, Atlas historique : Provence, Comtat,
Orange, Nice, Monaco, Paris, Armand
Colin.
S
Abel V. et Parent F.
2014, « L’exception marseillaise : absences
surprenantes et luxe étonnant », dans
Abel V., Bouiron M. et Parent F. (dir.),
Fouilles à Marseille, Objets quotidiens
médiévaux et modernes, Arles, Éditions
Errance, Aix-en-Provence, Centre
Camille Jullian, Bibliothèque d’Archéologie Méditerranéenne et Africaine, 16 ;
Études massaliètes, 13, p. 351-365.
125
Olivier ThuaudeT
N
126
Carru D., Gagnière S.
1992, « Notes sur quelques objets de dévotion
populaire, ampoules et enseignes de
pèlerinage du Moyen Âge tardif provenant
d’Avignon », Mémoires de l’Académie de
Vaucluse, 8e série, t. 1, p. 55-92.
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
Carru D.
1998, « Notre-Dame des Doms au Moyen
Âge, notice sur la représentation de la
cathédrale d’Avignon au xive siècle »,
Annuaire de la société des amis du Palais
des papes et des monuments d’Avignon,
LXXVe année, p. 47-54.
Charlet J.-L.,
1986, « Un petit trésor de florins découverts à Silvacane », Bulletin de la Société
française de numismatique, 41e année,
no 3, p. 39-42.
s
Duhil G., Chupin A., Girault M. et
Girault P.-G. (éd.),
2007, « Livre des Miracles de saint Gilles,
Liber miraculorum sancti Egidii », dans
Girault M. et Girault P.-G. (dir.),
Liber miraculorum sancti Egidii, Livre
des Miracles de saint Gilles, Orléans,
Paradigme, p. 33-207, Medievalia, no 60.
Enlart C.
1916, Manuel d’archéologie française
depuis les temps mérovingiens jusqu’à la
Renaissance. Tome III. Le costume, Paris,
Picard.
iti
Cohen E.
1976, “In haec signa : Pilgrim-badge trade
in southern France”, Journal of Medieval
History, t. II, fasc. 3, p. 193-214.
Desnoyers F.-E.
1873, « Objets trouvés dans la Loire durant
l’été de 1870 », Mémoires de la Société
archéologique de l’Orléanais, t. XII,
p. 245-295.
1876, « Nouveaux objets trouvés dans la
Loire pendant les années 1872, 1873
et une partie de 1874 », Mémoires de la
Société archéologique de l’Orléanais, t.
XV, p. 113-196.
on
Colardelle R.
1999, L’église Saint-Laurent, de la nécropole
gallo-romaine au monument historique,
Genoble (Isère), 10 vol. hèse d’Archéologie médiévale sous la direction de
G. Démians d’Archimbaud, Aix-enProvence, Université d’Aix-Marseille I.
2008, La ville et la mort : Saint-Laurent de
Grenoble, 2000 ans de tradition funéraire,
Turnhout, Brepols (Bibliothèque de
l’Antiquité tardive, no 11).
Éd
Coulet N.
1972, « Jalons pour une histoire religieuse
d’Aix au bas Moyen Âge (1350-1450) »,
Provence historique, t. XXII, fasc. 89,
p. 203-260.
Courrier de l’institut
1925, « Courrier de l’Institut Historique de
Provence », Mémoires de l’Institut historique de Provence, t. II, p. 225.
Cousin B.
1999, « Image des saints et imaginaire de la
sainteté en Provence (xviie-xixe siècle) »,
Provence historique, t. XLIX, fasc.
195-196, p. 179-189.
R
Bulgarelli F., Gardini A. et Melli P.
(dir.)
2001, Archeologia dei pellegrinaggi in Liguria,
Savone, Marco Sabatelli.
Chobaut L.
1943, « Introduction sur les graveurs,
marchands d’estampes et lithographes
avignonnais », dans Gagnière S.,
Catalogue de l’imagerie populaire
religieuse avignonnaise, Avignon,
Imprimerie Rullière frères, p. 3-8.
S
Bruna D.
1991, « Les enseignes de pèlerinage et les
coquilles Saint-Jacques dans les sépultures
du Moyen Âge en Europe occidentale »,
Bulletin de la Société nationale des
antiquaires de France, p. 178-190.
1992, « Un moule pour enseignes de
pèlerinage à l’image de la Belle Vierge
de Ratisbonne », Bulletin de la Société
nationale des antiquaires de France,
p. 317-324.
1994, « La marchande d’enseignes de
pèlerinage des stalles de la cathédrale
d’Amiens », Bulletin de la Société nationale
des antiquaires de France, p. 199-206.
1996, Enseignes de pèlerinage et enseignes
profanes, Paris, Éditions de la Réunion
des musées nationaux.
1998, « Témoins de dévotion dans les livres
d’heures à la in du Moyen Âge », Revue
Mabillon, t. 70, no 9, p. 127-161.
2003, « Enseignes de pèlerinage de la Via
Tolosana Provence et Languedoc :
nouvelles découvertes et état de la
question », dans Rucquoi A. (dir.), SaintJacques et la France, Actes du colloque
des 18 et 19 janvier 2001 à la fondation
Singer-Polignac, Paris, Éditions du Cerf,
p. 65-82.
2006, Enseignes de plomb et autres menues
chosettes du Moyen Âge, Paris, Le Léopard
d’Or.
2007, Saints et diables au chapeau. Bijoux
oubliés du Moyen Âge, Paris, Seuil.
Démians d’Archimbaud G.
1980a, Rougiers, village médiéval de Provence,
Lille, Service de reproduction des thèses
de Lille III.
1980b, Les fouilles de Rougiers (Var).
Contribution à l’archéologie de l’habitat
rural médiéval en pays méditerranéen,
Valbonne, CNRS.
Deonna W.
1946, « Les crucifix de la vallée de Saas
(Valais) : Sol et Luna. Histoire d’un thème
iconographique (premier article) », Revue
de l’histoire des religions, vol. 132, p. 5-47.
1947, « Les crucifix de la vallée de Saas
(Valais) : Sol et Luna. Histoire d’un thème
iconographique (deuxième article) »,
Revue de l’histoire des religions, vol. 133,
p. 49-102.
Esquieu Y.
1979, « L’église Sainte-Marthe de Tarascon »,
Congrès archéologique de France, 134,
Arles, Paris, Société française d’archéologie, p. 126-151.
Esquieu Y., Leenhardt M., Olive C. et
Vallauri L.
1988, « Le cimetière du cloître cathédral de
Viviers : rites et mobilier funéraires »,
dans Esquieu Y. (dir.), Viviers, cité
épiscopale : études archéologiques, Lyon,
Direction des antiquités historiques de
Rhône-Alpes, Documents d’archéologie en Rhône-Alpes et en Auvergne, 2,
p. 67-100.
Faillon E.-M.
1865, Monuments inédits sur l’apostolat de
sainte Marie-Madeleine en Provence et sur
les autres apôtres de cette contrée, saint
Lazare, saint Maximin, sainte Marthe,
les saintes Maries Jacobé et Salomé, etc.,
etc., 2 t., Paris, Migne.
Falgairolle P.
1898, « Le péage de Saint-Gilles au
xive siècle », Revue du Midi, 12e année,
no 7, p. 553-562.
Ferrando P.
2001a, « Quatre enseignes de pèlerinage
inédites pour Sainte-Croix de
Montmajour », Bulletin des amis du Vieil
Arles, no 110, p. 5-15.
Fingerlin I.
1971, Gürtel des hohen und späten
Mittelalters, Regensburg, Deutscher
Kunstverlag.
Fixot M. et Pelletier J.-P. (dir.),
1990, « Porteries, bâtiments d’accueil et
métallurgie aux abbayes de Silvacane et
du Thoronet », Archéologie Médiévale,
t. 20, p. 181-252.
Forgeais A.
1863, Collection de plombs historiés trouvés
dans la Seine, deuxième série : enseignes
de pèlerinages, Paris, Arthur Forgeais et
Auguste Aubry.
1865, Collection de plombs historiés trouvés
dans la Seine, quatrième série : Imagerie
religieuse, Paris, Arthur Forgeais et
Auguste Aubry.
Ganshof F. L.
1966, « Pèlerinages expiatoires flamands
à Saint-Gilles pendant le xive siècle »,
Annales du Midi, t. 78, n o 77-78,
p. 391-407.
Gasnault P.
1989, « Un nouveau témoignage sur le
pèlerinage de Larchant à la fin du
xve siècle », Cahiers saint Mathurin, t. I,
p. 18-20.
Gay V.
1887, Glossaire archéologique du Moyen Âge
et de la Renaissance, t. 1, Paris, Librairie
de la société bibliographique.
Gazay J.
1913, Le roman de saint Trophime et l’abbaye
de Montmajour, Toulouse, Privat.
Girault M. et Girault P.-G.,
2007a, « Introduction », dans Girault M. et
Girault P.-G. (dir.), Liber miraculorum
sancti Egidii, Livre des Miracles de saint
Gilles, Orléans, Paradigme (Medievalia,
60), p. 11-31.
2007b, « La vie d’un sanctuaire de pèlerinage
au xiie siècle », dans Girault M. et
Girault P.-G. (dir.), Liber miraculorum
sancti Egidii, Livre des Miracles de saint
Gilles, Orléans, Paradigme, Medievalia,
60, p. 211-342.
R
Fournand A.
2001, Le cadre de vie à Aix et ses environs
d’après les inventaires après décès (15601575), mémoire de maîtrise d’histoire moderne sous la direction de
G. Audisio, Aix-en-Provence, Université
Aix-Marseille I.
archéologie, environnement et histoire
d’un espace fluvial en bord de Saône,
Paris, Maison des Sciences de l’Homme,
p. 241-305.
C
N
Friant E.
2009, Le catholicisme matériel : les objets de
la piété privée dans la France des xvie et
xviie siècles, thèse d’histoire moderne
sous la direction de P. Martin, Nancy,
Université de Nancy 2.
©
Gagnière S.
1981, « Enseigne de pèlerinage de SainteCroix de Montmajour trouvée à
Avignon », Annuaire de la Société des amis
du Palais des Papes, années 1980-1981,
p. 49-53.
Gagnière S. et Granier J.
1971, « Le cimetière médiéval du plateau de
Cancabeau à Châteauneuf de Gadagne
(Vaucluse) », Revue d’études ligures,
XXXVIIe année, p. 172-188.
Galtier C., Mille P., Poirot A., Bérard
F., Cochet A., Médard F., Cécillon C.
2013, « Aspects de la vie quotidienne », dans
Ayala G. (dir.), Lyon, Saint-Georges :
Guyon J., Carrazé F., Fixot M. et
Jouanaud J.-L.
1996, Les premiers monuments chrétiens
de Saint-Maximin (11) : rapport d’une
fouille programmée sur le site de l’ancien
presbytère, place de l’Hôtel-de-Ville avril-mai 1996, déposé au Service régional
de l’archéologie Provence-Alpes-Côte
d’Azur.
Hayez A.-M.
1985, « Les environs de l’église Saint-Pierre
d’Avignon au xive siècle », Annuaire de
la Société des amis du Palais des papes
et des monuments d’Avignon, LXI eLXIIe années, p. 25-44.
1987, « À la cour pontiicale d’Urbain V,
réceptions et déplacements », Annuaire
de la Société des amis du Palais des papes
et des monuments d’Avignon, LXIIIeLXIVe année, p. 15-24.
2003, « La paroisse Notre-Dame la Principale
au temps des papes d’Avignon »,
Annuaire de la Société des amis du Palais
des papes et des monuments d’Avignon,
LXXXe année, p. 85-108.
Grassi M.-C.
1970, Les voies de communication en
Provence Orientale de l’époque romaine
à la in du xviiie siècle, thèse d’histoire
médiévale présentée sous la direction de
G. Duby, Aix-en-Provence, Université
Aix-Marseille I.
Gruet Y., Bonnissent D.
2002, « Des coquilles Saint-Jacques (Pecten
Maximus) taillées avant d’être vendues
aux pèlerins ? », Revue d’Archéométrie,
no 26, p. 113-123.
Guarnieri C.
1998, « Due insegne di pellegrinaggio
provenienti da scavi urbani a Ferrara ed
Argenta (FE) », Archeologia medievale,
t. XXV, p. 265-270.
Guillaume P.
1884, « Le mystère de Sant Anthoni de
Viennès publié d’après une copie de l’an
1503 », Gap, Société d’étude des HautesAlpes, Paris, Maisonneuve.
Hénin B.
1984, Maisons et vie domestique à Marseille au
xviie siècle, 3 t., thèse d’histoire médiévale
sous la direction de P. Joutard, Aix-enProvence, Université d’Aix-Marseille I.
Hucher E.
1853, « Des enseignes de pèlerinage », Bulletin
monumental ou collection de mémoires
et de renseignements sur la statistique
monumentale de la France, 2e série, t. 9,
p. 505-535.
Jacomet H.
1990, « Le bourdon, la besace et la coquille »,
Archéologia, no 258, p. 42-51.
Janninck C., Du Sollier J.-B. et Pien J.
1719, Acta sanctorum julii : ex latinis
et graecis, aliarumque gentium
monumentis, servata primigenia veterum
scriptorum phrasi, 1ère édition, Anvers,
Jacob du Moulin.
Koldeweij J.
2006, Foi et bonne fortune, parure et dévotion
en Flandre médiévale, Arnhem, Uitgeverij
Terra Lannoo.
Köster K.
1983, Pilgerzeichen und Pilgermuscheln von
mittelalterlichen Santiagostraϐen : SaintLéonard, Rocamadour, Saint-Gilles,
Santiago de Compostela, Schleswiger
Funde und Gesamtüberlieferung,
Neumünster, Wachholtz.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
Feuillas M.
1985, « Une tradition hagiographique : les
panégyriques latins du Bienheureux
Pierre de Luxembourg dans l’église des
Célestins d’Avignon au xvii e siècle »,
Mémoire de l’Académie de Vaucluse,
7e série, t. VI, p. 87-105.
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
s
2001b, « Sept enseignes de pèlerinage consacrées à saint Antoine », Bulletin des amis
du Vieil Arles, no 111, p. 39-45.
MOyen Âge
on
à la fin du
iti
prOvence
Éd
praTique du pèlerinage en
S
la
127
Olivier ThuaudeT
Lassure J.-M. et Villeval G.
2002, « Enseignes de pèlerinage du xive siècle
trouvées à Toulouse et au Pouget
(Hérault) », L’Auta que bufo un cop cado
mes, no 35, p. 200-206.
Lecoy de la Marche A. de
1875, Le roi René, sa vie, son administration,
ses travaux artistiques et littéraires d’après
les documents inédits des archives de
France et d’Italie, Paris, Firmin-Didot
Frères.
Moulinier J.-C.
1997, « Saint-Victor de Marseille, centre
ancien de pèlerinage », Provence historique, t. 47, fasc. 190, p. 605-612.
Nicholson A.
1998, « he copper alloy », dans Hill P. (dir.),
Whithorn and St. Ninian, he excavation
of a monastic Town 1984-91, s.l., Sutton
publishing, p. 360-384.
Paillard P.
1969, « Vie économique et sociale à Salon
de Provence. De 1470 à 1550 », Provence
historique, t. XIX, fasc. 78, p. 277-306.
N
R
Massebeuf G.
1987, « À propos d’une gravure découverte sur l’épave Lardier, Notre-Dame
du Puy et le jubilé du 25 mars 1502 »,
Cahiers d’archéologie subaquatique, t. VI,
p. 163-170.
Motteau J.
1991, « Catalogue des objets des fouilles
1973-1977 », Recherches sur Tours, no 5,
Tours, Association pour le développement des études d’archéologie urbaine
à Tours (supplément à la Revue archéologique du Centre de la France, 2).
128
Maxe-Werly L.
1898, « Médaille du Bienheureux Pierre de
Luxembourg du xve siècle », Mémoires
de la Société des lettres, sciences et arts de
Bar-le-Duc, 3e série, t. VII, p. 49-56.
©
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
C
Matton A.
1870, « Les enseignes et les lavages de SaintFirmin de la Fère », Bulletin de la Société
académique de Laon, t. 18, 1866-1868,
p. 115-119.
Michaud F.
2009, « Dévotions laïques. Le testament d’une
pèlerine, Elena Sclavonia, en 1301 », dans
Pécout T. (dir.), Marseille au Moyen
Âge entre Provence et Méditerranée. Les
horizons d’une ville portuaire, MeolansRevel, Désiris, p.323-324.
Papon J.-P.
1780, Voyage littéraire de Provence, Paris,
Barrois l’aîné.
Paris G. et Bos A. (éd.)
1881, La vie de saint Gilles par Guillaume
de Berneville : poème du xiie siècle, Paris,
Didot.
s
Pasqualini M., Turc P. et Mafart B.
1991, Abbaye Saint-Pierre de l’Almanarre
(Hyères), recherches 1988-1991 (rapport
de fouilles), déposé au Service régional
de l’archéologie Provence-Alpes-Côte
d’Azur.
on
Laclotte M. et Thiébaut D.
1983, L’école d’Avignon, Paris, Flammarion.
Montagnes B.
1978, « Une image de dévotion à saint
Dominique thaumaturge », Mémoires de
l’Académie de Vaucluse, sixième série,
t. X, p. 109-115.
d’Avignon et du Comtat Venaissin,
16e année, p. 119-122.
Pastoureau M.
1982, « La naissance de la médaille : le
problème emblématique », Revue numismatique, 6e série, t. XXIV, p. 206-221.
1988, « La naissance de la médaille : des
impasses historiographiques à la théorie
de l’image », Revue numismatique,
6e série, t. XXX, p. 227-247.
iti
Labaune-Jean F. (dir.)
2016, Petits objets de dévotion pour les pèlerins
du Mont-Saint-Michel, de la conception
à la production (xive-xve siècles), Caen,
Presses universitaires de Caen, Collection
des Publications du Craham.
Mognetti É.
1981, « Francesco Laurana sculpteur du roi
René en Provence », Le roi René en son
temps 1382-1481, catalogue de l’exposition du musée Granet, Aix-en-Provence,
Musée Granet, p. 132-182.
Éd
Labande L.-H.
1899, « Notes sur deux médailles du
Bienheureux Pierre de Luxembourg et sur
son portrait conservé au Musée Calvet »,
Mémoires de l’Académie de Vaucluse,
t. XVIII, p. 409-413.
Millin A.-L.
1808, Voyage dans les départemens du
Midi de la France, t.3, Paris, Imprimerie
impériale.
S
1985, « Les coquilles et enseignes de pèlerinage
de Saint-Jacques de Compostelle et des
routes de Saint-Jacques en Occident »,
dans Santiago de Compostela, 1000 ans
de pèlerinage européen, Gand, Crédit
Communal de Belgique, p. 85-95.
Pansier P.
1912a, « Les œuvres charitables d’Avignon en
1433 », Annales d’Avignon et du Comtat
Venaissin, 1ère année, p. 219-242.
1912b, « Note sur une bulle de Callixte III
accordant des indulgences à l’Œuvre du
Pont d’Avignon », Annales d’Avignon
et du Comtat Venaissin, 1 ère année,
p. 169-176.
1919, « Les débuts du théâtre à Avignon à la
in du xve siècle », Annales d’Avignon et
du Comtat Venaissin, 6e année, p. 5-52.
1926, « La version provençale des vies
d’Elzéar et de Delphine de Sabran »,
Annales d’Avignon et du Comtat
Venaissin, 12e année, p. 65-136.
1929, « Les anciens hôpitaux d’Avignon »,
Annales d’Avignon et du Comtat
Venaissin, 15e année, p. 47-56.
1930, « Le guide d’Avignon à Saint-Jacques
de Compostelle au xive siècle », Annales
Péricard-Méa D.
2000, Compostelle et cultes de saint Jacques
au Moyen Âge, Paris, PUF.
Pollino A. et Viallant J.-P.
1987, « Une épave au cap Lardier : sondages,
couverture photographique, matériel »,
Cahiers d’archéologie subaquatique, t. VI,
p. 85-98.
Puech A.
1885, « La vie de nos ancêtres d’après leurs
livres de raison ou les Nîmois dans la
seconde moitié du xviie siècle d’après
des documents inédits », Mémoires de
l’Académie de Nîmes, VIIe série, t. VII,
p. 439-490.
Ramière de Fortanier A. (dir.)
1979, Testaments provençaux du Moyen Âge.
Documents paléographiques, Marseille,
Institut historique de Provence, Archives
de la ville de Marseille.
Rapp F.
2000, « Jubilé et indulgences sous les papes
d’Avignon », Annuaire de la société des
amis du Palais des papes et des monuments
d’Avignon, LXXVIIe année, p. 85-97.
Raimbault M.
1921, Inventaire sommaire des archives
départementales d’Auriol antérieures
à 1790, Département des Bouches-duRhône, Marseille, Burotto & Sauvon.
Rodet-Belarbi I.
2013, « Le bourdonnet : une miniaturisation
du bourdon du pèlerin de Saint-Jacques-deCompostelle : quelques exemples archéologiques en os », Bulletin Instrumentum,
no 37, p. 47-49.
Sagnier A.
1988, « Les fouilles de Gadagne, un cimetière
ligure », Mémoires de l’Académie de
Vaucluse, t. VI, p. 183-202.
Saint-Jean R.
1985, « La sculpture à Saint-Gilles du
Gard », dans Lugand J., Nougaret J.,
Saint-Jean R. et Burgos A. (dir.),
Languedoc roman, le Languedoc méditerranéen, Saint-Léger-Vauban, Zodiaque.
Santiago de compostela
1985, Santiago de Compostela, 1000 ans
de pèlerinage européen, Gand, Crédit
Communal de Belgique.
Stouff L.
1991, « Deux voyageurs allemands à Arles à
la in du xve siècle », Provence historique,
t. XLI, fasc. 166, p. 567-573.
1999, « L’abbaye de Montmajour et la ville
d’Arles », dans Bastié A. (dir.), Abbaye
Saint-Pierre de Montmajour : histoire et
patrimoine, Arles, Les Amis du Vieil Arles,
p. 25-37.
Tixador A.
2004, Enseignes sacrées et profanes médiévales
découvertes à Valenciennes : Un peu plus
d’un kilogramme d’histoire, Valenciennes,
Service archéologique de Valenciennes.
Thiriet C.
1997, Les relets de la foi dans les inventaires
après décès. Marseille 1556-1575, 2 t.,
mémoire de maîtrise d’histoire moderne
sous la direction de G. Audisio, Aix-enProvence, Université Aix-Marseille I.
Thuaudet O. et Chazottes M.-A.
2014, « Étude du mobilier manufacturé non
céramique », dans Abel V., Bouiron M.,
Parent F. (dir.), Fouilles à Marseille,
Objets quotidiens médiévaux et modernes,
Arles, Errance, Aix-en-Provence, Centre
Camille Jullian (Bibliothèque d’Archéologie Méditerranéenne et Africaine, no 16 ;
Études massaliètes, 13), p. 295-349.
Vallet S.
2008, « La coquille du pèlerin dans les sépultures médiévales du sud-ouest de la
France : nouveaux résultats et perspectives de recherches », Archéologie du Midi
médiéval, t. 26, p. 238-247.
R
Sclafert J. (éd.)
2009, Miracles de sainte Marie-Madeleine,
introduction et traduction de Jacqueline
Sclafert, Paris, CNRS Éditions.
2010, Pilgrim souvenirs and secular badges,
Woodbridge, he Boydell Press (Medieval
inds from excavations in London, 7).
©
C
N
Spencer B.
1990, Salisbury and South Wiltshire museum,
medieval catalogue, part. 2, pilgrim
souvenirs and secular badges, Salisbury,
Salisbury and Southwiltshire museum.
saint Pierre de Luxembourg (à Avignon),
novembre 1389 », dans Montaiglon
A. (dir.), Archives de l’art français, Paris,
Dumoulin, t. 5, p. 342-346.
Valon L. de
1935, « Les pèlerinages expiatoires et
judiciaires de la Belgique aux Sanctuaires
de la Provence au Moyen Âge », Provincia,
t. XV, p. 30-52.
Veyssière G.
1987, Société et vie en Provence à travers des
sources hagiographiques du xive siècle, 2 t.,
thèse d’histoire médiévale sous la direction
de L. Stouf, Aix-en-Provence, Université
d’Aix-Marseille I.
1994, « Miracles et merveilles en Provence
aux xiii e et xiv e siècles à travers des
textes hagiographiques », dans Miracles,
prodiges et merveilles au Moyen Âge,
Actes de la Société des historiens médiévistes de l’enseignement supérieur public,
Orléans, juin 1994, Paris, Publications de
la Sorbonne, p. 191-214.
Vallet de Viriville A.
1857-1858, « Statue de cire du roi Charles
VI oferte par ce prince au tombeau de
Vielliard J. (éd.)
1984, Le guide du pèlerin de Saint-Jacques de
Compostelle, texte latin du xiie siècle, édité
et traduit en français d’après les manuscrits
de Compostelle et de Ripoll, Paris, Librairie
philosophique J. Vrin.
Vivre au Moyen Âge
2002, Vivre au Moyen Âge : archéologie du
quotidien en Normandie, xiiie-xve siècles,
Milan, 5 continents.
Wyzewa T. de (éd.)
1998, Jacques de Voragine, La légende dorée
(traduit du latin), Paris, Le Seuil.
Zingarelli N.
1901, « Le roman de saint Trophime », Annales
du Midi, t. XIII, p. 297-345.
Archéologie médiévale, 47, 2017, p. 89-129
Richier A. (dir.),
2011, Bouches-du-Rhône, La Ciotat, Carré
Saint-Jacques. L’Îlot Saint-Jacques : du
vignoble champêtre au cimetière paroissial
(rapport de fouilles), déposé au Service
régional de l’archéologie ProvenceAlpes-Côte d’Azur.
eT au débuT de l’épOque MOderne d’après les enseignes eT les aMpOules
s
Ribbe C. de
1898, La société provençale à la in du Moyen
Âge d’après des documents inédits, Paris,
Perrin.
MOyen Âge
on
à la fin du
iti
prOvence
Éd
praTique du pèlerinage en
S
la
129
©
S
R
N
C
s
on
iti
Éd